Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, si l’annonce du plan Ma santé 2022 avait suscité un large consensus, sa traduction législative, à travers une question centrale – ces mesures concourent-elles à un meilleur accès à des soins de qualité ? –, interroge, interpelle et soulève, du fait du recours aux ordonnances, de fortes oppositions.
Il y a une interrogation sur la superposition et la complexité des outils d’exercice coordonné. La volonté de mettre en réseau les professionnels d’un territoire pour organiser la prise en charge de tous les habitants et la cohérence entre des niveaux de coordination clinique, territoriale, complexe pour les cas difficiles, doivent se traduire dans des cadres juridiques souples, à la main des professionnels, pour leur permettre de s’en saisir facilement, de l’adapter aux besoins locaux, en ayant l’assurance de financements pérennes.
Il y a un doute sur le lien entre proximité et efficacité dans l’évolution souhaitée des GHT. J’insiste sur trois points de vigilance. D’abord, il faut que les nouvelles synergies permettent bien aux établissements périphériques de bénéficier des ressources médicales de l’établissement support pour garantir leur attractivité ! Ensuite, quel sera le rôle, maintenu ou non, en matière de qualité et de sécurité des soins pour les commissions médicales d’établissement ? Enfin, le rendez-vous de la loi de financement posera la question cruciale de la situation financière des hôpitaux. Dans le contexte de la grève actuelle des urgences, comment demander aux personnels de s’investir dans un projet de transformation si aucune réponse n’est apportée à leur problème de court terme ?
Et il y a une forte opposition quand le Gouvernement, par le biais des articles 8, 9 et 10, se prépare à redessiner par ordonnance la carte de l’offre de soins hospitalière sur l’ensemble de la France. Les autorisations sont « le trésor de guerre des hôpitaux », m’expliquait récemment un chef d’établissement, d’autant plus dans un contexte de grandes inégalités territoriales. Madame la ministre, vous vous engagez à un travail de concertation. Mais c’est dans la discussion parlementaire que les élus doivent définir précisément les critères et règles d’une nouvelle organisation.
Mes chers collègues, les membres du groupe socialiste et républicain sont résolument engagés dans la lutte contre les « déserts médicaux ». Après avoir formulé de nombreuses propositions, parce qu’il s’agit de l’intérêt général et parce que l’urgence est de répondre aux demandes de nos concitoyens désemparés, nous sommes totalement partie prenante d’une démarche commune, au-delà des sensibilités politiques. Madame la ministre, nous vous demandons de voir cette démarche comme une formidable occasion d’avancer.
En juin 2018, le Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie évoquait une « crise majeure d’un système touché dans toutes ses composantes ». Il invitait à « reconsidérer explicitement ce système de valeurs et de principes ». J’insiste sur les termes « valeurs » et « principes ». C’est leur réaffirmation qui conduira à la construction d’un système de santé conjuguant égalité, efficacité, innovation et solidarité, en mesure de répondre aux énormes besoins de santé des territoires.