Intervention de Annie Delmont-Koropoulis

Réunion du 3 juin 2019 à 15h00
Organisation et transformation du système de santé — Discussion générale

Photo de Annie Delmont-KoropoulisAnnie Delmont-Koropoulis :

Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, voilà plus d’un an, le Premier ministre nous annonçait vouloir mettre fin aux « rafistolages en santé ». Cette volonté s’est ensuite traduite avec la présentation, au mois de septembre 2018, du plan Ma santé 2022. Avec ce projet de loi, vous ajoutez une pierre à l’édifice bancal qu’est ce plan.

Madame la ministre, ce texte était attendu par les patients, par les professionnels de santé et par les étudiants en médecine, car le diagnostic est grave et partagé par tous, y compris sur ces travées. Si notre système de santé est aujourd’hui à bout de souffle, les Français sont, eux, tout simplement à bout.

Chacun dans cet hémicycle est en effet confronté dans son territoire à l’une de ces situations : manque de moyens financiers pour un hôpital, manque de personnels soignants ou encore développement de zones en voie de désertification médicale.

Il n’est pas anodin que la question de l’accès aux soins se soit imposée lors du grand débat national. De nombreux citoyens renoncent aux soins faute de professionnels disponibles.

Annoncé comme une « transformation du système de santé », ce texte ne traite pas de plusieurs sujets essentiels, comme la prévention ou la revalorisation et l’attractivité des professions de santé libérales et hospitalières. Il n’y a rien non plus sur la recherche et l’innovation, alors même que la compétitivité de la France se dégrade dans le domaine pharmaceutique.

Madame la ministre, je regrette également que le Parlement ne soit pas pleinement associé à cette réforme. En effet, le projet de loi comporte de trop nombreuses mesures qui relèvent de futures ordonnances, comme les hôpitaux de proximité. Nous voilà privés d’un débat qui aurait pu enrichir le texte grâce à nos expériences dans les territoires, notre connaissance du terrain, des établissements et des besoins.

Toutefois, ce projet de loi comporte tout de même quelques points positifs qu’il faut souligner, comme la réforme du statut de praticien hospitalier et la création de l’espace numérique de santé.

Mais plusieurs dispositions nous interrogent. Si la suppression du numerus clausus et la refonte des premiers cycles des études vont dans le bon sens, qu’en est-il de l’accueil des nouveaux effectifs ? Qu’est-il prévu pour que les universités s’adaptent à l’arrivée de nouveaux élèves alors que la plupart des amphithéâtres sont déjà saturés ? Même question pour l’accueil de nouveaux internes dans les hôpitaux. Comment être certain que la suppression du numerus clausus profitera aux déserts médicaux, alors que moins de 15 % des étudiants en médecine choisissent le secteur libéral et qu’il n’est absolument pas souhaitable d’envisager des mesures coercitives d’installation ?

Le maillage du territoire et la coordination entre acteurs sont nécessaires pour répondre au mieux aux situations de désertification médicale. Veillons à ne pas suradministrer la santé. Laissons se développer les initiatives locales. Laissons les professionnels s’organiser librement.

Ce projet de loi est donc un début de réponse aux maux dont souffre notre système de santé. S’il contient quelques avancées, il n’est pas assez ambitieux. Et nous déplorons encore une fois le nombre important d’ordonnances prévues. Cela va nous priver d’une nécessaire visibilité sur les mesures et leurs conséquences.

Madame la ministre, nous sommes dans le flou. Mais nous sommes disponibles pour travailler avec vous et faire avancer le texte dans le bon sens, afin qu’il améliore le quotidien des patients et des professionnels de santé.

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