Intervention de Frédérique Vidal

Réunion du 3 juin 2019 à 15h00
Organisation et transformation du système de santé — Article 1er

Frédérique Vidal :

Monsieur le sénateur Ouzoulias, peut-être votre propos va-t-il me permettre de clarifier un certain nombre de choses par rapport au déroulement actuel des études de santé.

Un peu plus de 57 000 étudiants s’inscrivent en première année. S’ils réussissent quasiment tous leur année, ils sont seulement 13 000 à passer en deuxième année à l’issue du concours. C’est justement contre cette situation que nous souhaitons lutter en nous inspirant de ce qui a été mis en place à Angers avec l’AlterPaces. Notre objectif est d’éviter de contraindre au redoublement ces étudiants qui ont réussi une première année à l’université sans avoir néanmoins été admis à poursuivre leurs études de santé.

Si vous voulez absolument des chiffres, le redoublement de la première année de Paces coûte 55 millions d’euros. Cette somme pourrait trouver une utilisation beaucoup plus judicieuse que le redoublement imposé à des étudiants dont certains vont échouer une seconde fois ! C’est exactement sur ce sujet que nous sommes en train de travailler.

On peut maintenir une sélection à l’entrée des études médicales, notamment pour satisfaire nos compatriotes peu enthousiastes à l’idée que les futurs médecins soient moins bien formés que leurs prédécesseurs, et néanmoins garantir la réussite des étudiants, c’est-à-dire permettre à ceux qui n’atteindront pas la deuxième année de médecine de poursuivre leur cursus. Nous proposons non une fausse suppression du numerus clausus, mais une véritable modification du processus, ce qui me paraît important. Nous allons ouvrir la voie de la diversification, qui permet de privilégier les qualités humaines sans pour autant négliger la qualité de la formation. C’est sur ces deux pieds que nous devons être capables de marcher.

Le diplôme de médecin, délivré par une université, conservera évidemment sa dimension nationale. Le processus de sélection sera précisé par décret. Les universités, qu’elles comportent ou non des facultés de médecine, sont justement en train de le préparer sur le modèle des expérimentations qui ont fonctionné.

Monsieur Jomier, vous avez exprimé votre crainte de ne pas voir augmenter le numerus clausus. Je veux dissiper un malentendu mis en avant par quelques-uns. Cette année, certaines universités parisiennes, qui pratiquaient l’expérimentation et étaient donc en avance sur la loi, ont augmenté le numerus clausus. Et il y a eu maintien du numerus clausus dans un certain nombre d’autres universités : elles n’étaient pas entrées dans un processus d’expérimentation, car la loi n’était pas votée et elles n’ont pas pu faire valoir leur pleine capacité d’accueil. C’est précisément pour remédier à cette situation que nous souhaitons avancer.

La sélection cessera d’être exclusivement fondée sur des QCM. Il existe dans de très nombreux pays des oraux normés, validés, qui permettent de maintenir la qualité de la formation suivie par les jeunes sans pour autant tout faire reposer sur des QCM. Il faudra bien sûr diversifier le contenu des formations, mais je remercie sincèrement la commission de n’avoir pas souhaité entrer dans le détail de ce contenu, qui relève vraiment de l’équipe pédagogique et de l’ensemble des professionnels concernés.

À ce moment, je vais faire une allusion qui fera probablement rougir la personne qui siège près de moi. PluriPass a été mis en place à l’université d’Angers notamment grâce au doyen de la faculté de médecine de l’époque, qui est devenue ma conseillère. Croyez bien que le texte qui vous est soumis a été pour une large part inspiré de cette expérimentation qui n’est cependant pas forcément adaptable partout.

En tout cas, la philosophie et le principe qui nous guident – et je vous remercie, monsieur le sénateur Piednoir, de l’avoir signalé – visent en effet à garantir un large succès dans ces formations et une bien meilleure qualité de vie pour les étudiants tout en leur maintenant un très haut niveau de formation. Tout cela sera évalué au fur et à mesure, à l’instar de ce qui a été fait dans les universités qui ont expérimenté.

Pour toutes ces raisons, l’avis du Gouvernement est défavorable.

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