Intervention de Frédérique Vidal

Réunion du 4 juin 2019 à 14h30
Organisation et transformation du système de santé — Article 2

Frédérique Vidal :

Madame la sénatrice, le service public de l’éducation, dont font partie les études de médecine, a vocation à répondre à l’intérêt général et aux missions qui lui sont dévolues en respectant le principe de neutralité dans toutes ses dimensions, dont la neutralité commerciale, à laquelle vous faites référence.

L’indépendance des formations initiale et continue des professionnels de santé est un objectif que nous partageons. Tout ce qui participe à la qualité et à la pertinence des soins, objectifs centraux de l’ensemble des transformations que porte le Gouvernement, est bien sûr au cœur de nos préoccupations. C’est une exigence que nous devons à nos concitoyens.

Cependant, il s’agit ici de ce que l’on appelle des formations « professionnalisantes », inscrites dans des environnements d’exercice. La garantie de cette indépendance ne peut donc pas se limiter à des principes législatifs ou réglementaires ; elle suppose une attention prononcée dans deux directions.

Tout d’abord, il faut exercer une vigilance permanente dans la pratique d’enseignement. Toutefois, cela ne doit pas empêcher de travailler avec le monde de l’entreprise ou les industries. Nous sommes l’un des pays qui produisent le plus de connaissances, mais aussi, pour des raisons multiples, l’un de ceux qui sont le moins capables d’innover à partir de ces connaissances. Or l’une des raisons pour lesquelles l’innovation se heurte à des difficultés en France est la suspicion qui transparaît au travers de votre intervention. Par exemple, si, dans le cadre de la mise en place d’un module d’apprentissage de la chirurgie par simulation, on recourt à telle marque de scialytique, cela peut faire naître le soupçon que l’on veut former les futurs chirurgiens à utiliser cette marque plutôt qu’une autre. Nous nous tirons ainsi parfois nous-mêmes des balles dans le pied !

Il faut, par ailleurs, maintenir une vigilance permanente quant à l’évolution des pratiques. Nos étudiants ont besoin d’une lecture critique des informations scientifiques et de pratiques pédagogiques innovantes. C’est un objectif philosophique qui est très largement partagé.

Cet amendement, qui questionne les liens de la formation des professionnels de santé avec l’industrie, porte un risque majeur de contentieux à terme. Il est très important de veiller au respect du principe d’indépendance, mais il ne convient pas d’inscrire celui-ci dans la loi. C’est la raison pour laquelle j’émets un avis défavorable.

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