Je formulerai tout d’abord une remarque qui ne porte pas directement sur cet amendement.
L’alinéa 2 de l’article 3 prévoit une aggravation des peines, puisque la peine de prison passerait de sept à dix ans et l’amende pénale, de 700 000 à 1 million d’euros. Si je comprends l’esprit d’une telle mesure, je dois souligner qu’elle ne correspond absolument pas à la réalité. À ma connaissance, la peine d’emprisonnement la plus lourde qui ait été prononcée en France était de six mois pour un trafiquant chinois qui avait introduit 4 000 contrefaçons de produits Microsoft. Ainsi les dispositions du projet de loi semblent-elles quelque peu irréelles.
J’en viens à l’amendement n° 197.
Nous sommes tous favorables à la lutte déterminée contre la contrefaçon. J’ai participé activement, avec notre collègue Laurent Béteille, à la rédaction de la loi du 29 octobre 2007, laquelle a prévu, je vous le rappelle, mes chers collègues, un doublement des peines dans les cas où la contrefaçon met en danger la sécurité des personnes. Il s’agit notamment des pièces mécaniques, comme les freins ou des pièces destinées aux avions, des médicaments ou des produits alimentaires.
Les dispositions que nous examinons aujourd’hui, qui visent à instaurer une aggravation des peines lorsque l’infraction est commise via Internet, me laissent assez rêveur. En quoi l’utilisation d’Internet constitue-t-elle en soi un facteur d’aggravation ? Il y a là une confusion entre le moyen utilisé et l’acte frauduleux lui-même.
Si nous retenons le principe inscrit à l’article 3, une personne qui vend des produits de contrefaçon sur un carton au pied de la tour Eiffel pourra encourir une peine d’un mois d’emprisonnement. Si elle vend ces mêmes produits dans un magasin ayant pignon sur rue, la peine passera à trois mois. Si elle a recours à une publicité dans les journaux ou à la radio pour vanter ses produits, la peine sera alors de six mois. On entre donc dans une mécanique qui n’a aucun sens et ne correspond absolument pas à la réalité de la lutte contre la contrefaçon. Les auteurs du projet de loi se sont égarés, en introduisant une confusion entre le but recherché et le moyen utilisé.
Nous proposons donc, comme notre ami Yves Détraigne, la suppression des alinéas 3, 4 et 5 de l’article 3. Mais sans doute faudrait-il également réfléchir plus en amont à toutes ces questions !
Je souligne également que les vols commis par le truchement d’Internet ne font pas l’objet d’une telle aggravation. Décidément, nous sommes en pleine incohérence !