Intervention de Agnès Buzyn

Réunion du 5 juin 2019 à 14h30
Organisation et transformation du système de santé — Article additionnel avant l'article 7 A

Agnès Buzyn :

Je vais m’exprimer de façon large, parce que j’entends les critiques qu’expriment beaucoup d’élus locaux ces derniers mois, à propos de leur relation avec les ARS.

Monsieur le sénateur, vous proposez de supprimer ces agences régionales de santé, au motif qu’elles auraient échoué à assurer leur mission ; je ne partage pas ce constat, non plus que la solution que vous proposez et je vais essayer de vous convaincre.

Les ARS, tout d’abord, ont rempli avec succès la très grande majorité des missions qui leur ont été confiées en 2009 par le législateur : elles ont su développer une vision globale de la santé intégrant la prévention et la promotion de la santé, ainsi que la santé environnementale ; elles voient la totalité de l’offre de soins, libérale et hospitalière – contrairement aux agences régionales d’hospitalisation qui existaient auparavant –, ainsi que l’offre médico-sociale ; elles ont, surtout, largement contribué, en liaison avec le réseau de l’assurance maladie, au respect de l’Objectif national de dépenses d’assurance maladie, voté chaque année par le Parlement et dont M. le rapporteur soulignait qu’il avait été particulièrement restrictif ces dernières années.

Il leur a fallu œuvrer sous cette contrainte, que vous avez vous-même votée et dont, peut-être, vous avez ensuite subi les effets sur le territoire.

Je me dois d’ajouter que les ARS ne sont pas non plus responsables de la raréfaction des ressources médicales sur les territoires, qui découle de décisions prises en matière de numerus clausus il y a une trentaine d’années. Ce phénomène, je l’ai dit, touche tous les pays industrialisés.

Les ARS mettent tout en œuvre pour faire en sorte que les médecins aient envie de s’installer : elles les accompagnent dans leur installation, notamment dans les zones sous-denses, et elles les orientent grâce à des dispositifs incitatifs.

En outre, vous évoquez le peu d’écoute dont bénéficieraient les élus. Tout d’abord, ce constat varie d’une région à l’autre ; ensuite, il est lié à une autre loi votée par le Parlement : la loi NOTRe.

Du jour au lendemain, au 1er janvier 2017, les ARS, qui avaient des délégations territoriales puissantes, se sont retrouvées dans de très grandes régions au sein desquelles elles ont été recentralisées. Ces directions d’ARS très centralisées, très éloignées des élus locaux ont, certes, plus de mal à gérer les quelque 35 000 communes avec les maires, l’ensemble des députés, des sénateurs, des conseillers régionaux et départementaux, alors qu’elles sont extrêmement sollicitées.

Les ARS ne sont donc responsables ni de l’Ondam, ni de l’absence de médecins sur le territoire, ni de la loi NOTRe. On veut leur en faire porter le chapeau, on les accuse d’être insuffisamment présentes, de ne pas être à l’écoute, quand, en réalité, elles font le maximum pour accompagner les territoires.

J’ai introduit dans la loi beaucoup d’éléments visant à améliorer leur fonctionnement, notamment en ce qui concerne la présence des élus locaux dans les différents projets régionaux de santé ou dans les conseils locaux de santé ; j’ai également placé des parlementaires au sein des conseils de surveillance des ARS. Cela a été voté, il y aura bien un député et un sénateur dans ces organes.

Enfin, il me semble que la difficulté que vous ressentez est également liée à la faiblesse des cent délégations territoriales, que j’ai souhaité renforcer par l’ajout d’emplois fonctionnels. Un arbitrage positif a été rendu à ce sujet il y a une quinzaine de jours. Nous allons donc recruter ou transférer des personnes capables de rencontrer les élus dans les délégations territoriales, parce que c’est effectivement en ce domaine que pêche notre capacité à interagir avec vous.

De nombreux mécanismes de concertation et de coordination ont été inscrits dans le projet de loi que vous allez être amenés à voter. Cessons de charger les ARS de tous les maux, dont un certain nombre de lois antérieures sont responsables.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

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