Intervention de Agnès Buzyn

Réunion du 5 juin 2019 à 21h30
Organisation et transformation du système de santé — Articles additionnels après l'article 7 quinquies

Agnès Buzyn :

Il est lié aux catégories socioprofessionnelles et aux territoires les plus défavorisés, car des freins financiers font renoncer les femmes à ces frottis. En effet, nombre de gynécologues sont en secteur 2.

En outre, de nombreuses femmes ne savent pas que les sages-femmes peuvent accomplir cet acte. C’est pourquoi, dans toutes les campagnes d’information, il est bien précisé que les sages-femmes sont pleinement autorisées à faire ces actes – seuls 2 % des frottis aujourd’hui réalisés en France le sont par des sages-femmes, alors qu’elles sont 30 000 sur le territoire. Il y a donc une sous-utilisation de cette ressource humaine.

Enfin, il faut payer les analyses anatomopathologiques et les femmes jeunes n’ont pas toujours de mutuelle.

Dans le cadre du plan Cancer, nous avons voulu organiser le dépistage du cancer du col de l’utérus au même titre que le dépistage du cancer du sein et du dépistage colorectal, ce qui permet une prise en charge à 100 % par l’assurance maladie. De nombreux scénarios de dépistage ont été évalués avec des expérimentations. Il est apparu qu’un dépistage tous les trois ans qui reposait sur une lettre d’invitation envoyée à toutes les femmes dans la tranche d’âge 25-65 ans, pris en charge par l’assurance maladie, permettait une bonne participation des femmes.

Ce dépistage organisé, qui sera le troisième, sera mis en place dès cette année, sans doute à partir du 1er juillet prochain – la date exacte m’échappe.

Nous avons bon espoir que les femmes, lorsqu’elles recevront cette invitation et qu’elles sauront qu’elles n’auront rien à débourser, car l’examen sera pris en charge à 100 %, n’auront plus ce frein financier. La lettre précisera bien qu’elles pourront faire ce dépistage chez un médecin généraliste – je rappelle que tous les nouveaux médecins généralistes, dans le cadre de leur maquette de formation, ont un stage obligatoire en santé de la femme pour apprendre à faire des frottis et compenser le manque de gynécologues médicaux –, une sage-femme ou un gynécologue, quand il y en a.

Il est recommandé que, lors de cette consultation, une évaluation globale de la santé des femmes soit réalisée, avec une palpation des seins, pour ne pas passer à côté d’un cancer du sein.

Je tiens particulièrement à inscrire ce frottis dans un parcours de dépistage des cancers, avec un examen clinique complet que ne pourront pas faire les pharmaciens biologistes. Je ne veux pas d’une dérive où les femmes, tous les trois ans, iront voir leur pharmacien, parce que ce sera plus facile, et n’auront jamais de palpation des seins.

C’est pourquoi je m’oppose à ces amendements identiques, car ils ne sont pas de bonne pratique. Il faut favoriser les frottis par les sages-femmes.

J’en profite pour rappeler qu’aujourd’hui de nombreuses femmes réalisent des frottis tous les ans. Or la Haute Autorité de santé, la HAS, ne fait pas de telles recommandations : les cancers du col de l’utérus évoluent lentement et il y a des stades progressifs. En matière de prévention, un frottis tous les trois ans suffit donc.

Par conséquent, si nous utilisons les ressources financières et le temps médical dédié à faire des frottis inutiles tous les ans pour parvenir à un frottis tous les trois ans réalisé par toutes les femmes, nous aurons une bien meilleure couverture.

Enfin, le test de dépistage du virus HPV détecte le virus à l’origine du cancer et non le cancer lui-même. Il s’agit donc d’une autre forme de dépistage. Ce test-là n’a pas été retenu par la direction générale de la santé lors des expérimentations ; il n’est pas remboursé, parce que la HAS ne l’a pas validé à ce jour comme étant utile. Lorsque ce sera le cas, il fera l’objet d’un remboursement et peut-être que nous changerons aussi nos méthodes de dépistage et que ce sera non plus le frottis, mais la recherche du virus en première intention. Aujourd’hui, ce n’est pas la stratégie retenue.

Madame Imbert, je vérifierai ce que publie le site Santé publique France et vous remercie de m’avoir signalé cet article. En réalité, ce n’est une recommandation ni de la HAS ni de l’Institut national du cancer.

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