Intervention de Augustin de Romanet

Mission d'information Transports aériens — Réunion du 6 juin 2019 à 10h30
Audition de M. Augustin de Romanet président-directeur général du groupe aéroports de paris

Augustin de Romanet, président-directeur général d'Aéroports de Paris :

Monsieur Guerriau, la qualité de service est une notion capitale pour nous. Cette expression n'est apparue qu'en 2010 chez ADP : jusque-là, on considérait que le client était la compagnie aérienne. Je me souviendrai toujours du comité exécutif de l'entreprise en 2015, lorsque j'ai fait admettre aux équipes que notre client était le passager et non uniquement la compagnie. Cela a entraîné une profonde mutation intellectuelle et mentale. Il reste toujours des progrès à faire. Quand je suis arrivé, ADP refusait de figurer dans le classement Skytrax car celui-ci était géré et établi par des anglo-saxons... Cela a changé et nous avons rejoint le classement. La première année Roissy-Charles-de-Gaulle a été classé 95e. Et puis ensuite, nous avons été 37e ; cette année nous sommes 30e sur les 500 plus grands aéroports du monde, et 9e sur les 30 plus grands. La situation est donc perfectible pour la qualité de service, mais il y a eu beaucoup d'améliorations depuis quelques années. Nous dépensons plusieurs centaines de milliers d'euros par an pour des enquêtes de qualité. Nous adhérons au programme de l'organisation mondiale des aéroports (ACI) qui a défini un indicateur « Airport Service Quality » (ASQ) et nous suivons trimestre par trimestre son évolution : notre note est actuellement de 3,80 sur 5 et nous visons la note de 4. Nous avons une direction clients qui s'occupe de la qualité de service. Nous devons aussi améliorer les accès aux aéroports qui ont été mal conçus et renforcer la pédagogie. En effet, comme l'ont dit MM. Raynal et Fichet, la maîtrise du temps est cruciale. À cet égard il faut penser le parcours passager dans son ensemble, en incluant les transports en commun. C'est pour cela que je milite pour le CDG Express qui permet de diviser par deux le temps de trajet entre Paris et l'aéroport : 20 minutes, quatre fois par heure, entre la gare de l'Est et l'aéroport Charles de Gaulle. Pourtant le dossier traîne depuis 2012 et rencontre beaucoup d'oppositions.

N'hésitez pas à nous faire remonter vos observations. Lorsque M. Fichet évoquait les problèmes qu'il a rencontrés à Orly, je pensais à la remarque d'une étudiante sur Twitter qui déplore que les Orlybus ne partent que d'Orly 4. Les passagers arrivant à Orly 1 doivent ainsi marcher pendant 12 ou 15 minutes pour rejoindre Orly 4. Ce n'est pas satisfaisant.

Monsieur Raynal, merci pour vos propos sur notre sensibilité aux territoires. Comment se prémunir en cas de privatisation de l'entreprise ? Les prérogatives de la puissance publique vont demeurer les mêmes et seront même légèrement accrues. Lorsque le groupe ADP fixe ses tarifs chaque année, il les soumet préalablement à l'agrément de l'État dans le cadre d'un contrat de régulation économique. Si l'État observe une dégradation des services, il peut contraindre ADP à réaliser des investissements dans le cadre de ce contrat. Je vous rassure, la capacité de l'État à veiller à la qualité de service demeurera intacte.

Les affectations de terminaux sont largement au choix d'Air France. Mais je ne me défausserai pas. L'accès des taxis au terminal 3 dans les premières semaines a été une catastrophe parce que les centrales de réservation des grandes compagnies continuaient à aller chercher leur client au terminal 4, forçant les passagers à marcher le long d'un parcours qui n'est pas encore bien aménagé. J'ai insisté pour renforcer le continuum, les aménagements seront inaugurés en septembre.

Merci Monsieur Fichet, au nom des équipes, pour vos propos. La question principale est celle de la maîtrise du temps. Mais dans un aéroport lorsqu'il y a un problème, personne ne veut être responsable et chacun - aéroport, compagnies, sous-traitants - cherche à se repasser le mistigri. Nous considérons que c'était notre responsabilité de faire en sorte que toute la chaîne fonctionne bien. Nous devons donc parfois intervenir auprès des sous-traitants des bagages ou des sous-traitants des autobus. L'été dernier, j'ai voulu prendre un vol Paris-Clermont-Ferrand qui devait partir à 8 heures du matin : l'équipage n'était pas là mais jusqu'au dernier moment on nous a fait croire qu'il allait arriver. Ce n'est pas satisfaisant. J'insiste pour que nos équipes disent la vérité aux usagers. Pour bien faire, on a tendance à ne pas dire la vérité, car les clients souhaitent être rassurés. Mais si on sait qu'un vol sera annulé ou en retard, mieux vaut informer aussitôt les clients pour qu'ils puissent prendre leurs dispositions. Mais changer les réflexes pour passer à une culture de la vérité prend du temps.

La gestion de la hausse du trafic est un vaste sujet. Les infrastructures seront vite saturées. Nous passons notre temps à courir après cette hausse pour nous adapter. C'est ce qui explique les travaux permanents. Tous les 2 ans le nombre de passagers accueillis par ADP augmente de 7 millions, ce qui représente le nombre annuel de passagers accueillis par l'aéroport de Nantes. C'est un vrai défi opérationnel pour ADP ; le contrat de régulation économique pour la période 2021-2025 prévoit des investissements de 6 milliards d'euros, deux fois plus que dans la période précédente. Le développement des aéroports de province est une bonne nouvelle. Le développement des avions monocouloirs, capables de réaliser des liaisons transatlantiques, peut être une bonne nouvelle pour les territoires car, dès lors que le nombre de passagers potentiels sera suffisant, il sera possible de réaliser plus de liaisons internationales depuis les aéroports régionaux sans passer par Paris. La décongestion des grands aéroports parisiens passera par un travail en réseau avec les petits aéroports et le développement de connexions directes.

Monsieur Cuypers, la superficie de l'aéroport Charles-de-Gaulle est de 3 257 hectares, celle d'Orly de 1 540 hectares. Nous avons environ 400 hectares en réserve foncière qui nous permettraient de construire 1,5 million de mètres carrés de bureaux, soit un doublement de la superficie existante. La superficie commerciale s'élève à 58 000 mètres carrés, l'équivalent d'un grand magasin comme le Printemps, et l'objectif est de passer à 80 000.

L'aéroport de Vatry a été conçu à une époque où le transport en camion n'était pas contesté pour ses émissions de gaz à effet de serre. Pour le fret, l'essentiel est que la marchandise, une fois arrivée à l'aéroport, puisse rejoindre très vite sa zone de consommation. À Orly, l'essentiel des 300 000 tonnes de fret annuelles est destiné à Rungis.

Sur les biocarburants, Alexandre Juniac, président-directeur général de l'Association internationale du transport aérien, remarquait qu'aucun nouveau mode d'énergie ne s'était développé sans un investissement initial subventionné par les pouvoirs publics : ce fut le cas des panneaux solaires ou de l'énergie éolienne. L'utilisation de la biomasse, pour produire du biofuel, constitue sans doute une nouvelle frontière pour le transport aérien mais cela exigera beaucoup de recherches. Si une taxe sur le kérosène devait être instaurée, il faudrait qu'elle puisse contribuer à financer des recherches sur ce thème.

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