Intervention de Laurence Rossignol

Réunion du 11 juin 2019 à 15h00
Organisation et transformation du système de santé — Article 28

Photo de Laurence RossignolLaurence Rossignol :

Je ferai une seconde remarque. Je ne peux pas laisser dire, sous-entendre ou présupposer que, après l’allongement des délais de l’IVG à quatorze semaines, on passerait à seize, puis à dix-huit, voire plus. C’est mal connaître les femmes ! Quand une femme enceinte ne peut pas garder un enfant, plus vite elle avorte, mieux c’est. §

Je vais vous expliquer pourquoi il faut allonger les délais. En France, chaque année, entre 3 000 et 5 000 femmes partent à l’étranger pour y avorter, et ce pour plusieurs raisons : il peut s’agir de difficultés d’accès aux soins, de la désorganisation des services, du manque de médecins, des vacances d’été – elles sont dramatiques pour l’accès à l’IVG – ou de raisons personnelles. Il faut savoir que 75 % des femmes qui ont recours à un avortement sont sous contraception. Elles ne comprennent donc pas immédiatement qu’elles sont enceintes et que leur retard de règles est le signe d’une grossesse, et non un déséquilibre de leur contraception. Enfin, les mineures, les jeunes filles, elles, ne savent même pas ce qui leur arrive et n’osent pas en parler.

Voilà de bonnes raisons d’allonger de deux semaines le délai d’IVG, comme cela se pratique dans bien d’autres pays.

En fait, la décision que vous allez prendre, mes chers collègues, va accroître les injustices sociales. Celles qui ont les moyens continueront d’aller à l’étranger – merci aux pays voisins de faire ce qu’on ne veut pas faire ! Quant aux autres, elles se débrouilleront comme elles le pourront.

Madame la ministre, j’avoue que je suis surprise. Votre liste aux élections européennes a promu le « pacte Simone Veil », le « bouquet législatif », la solidarité entre les femmes de tous les pays d’Europe pour les meilleures lois sur l’IVG. Quel message envoyez-vous aujourd’hui ?

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