Intervention de Corinne Imbert

Réunion du 11 juin 2019 à 15h00
Organisation et transformation du système de santé — Explications de vote sur l'ensemble

Photo de Corinne ImbertCorinne Imbert :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, avec près de 250 amendements émanant des différents groupes, adoptés en commission des affaires sociales puis en séance, le Sénat a contribué, dans un esprit constructif, à enrichir ce projet de loi.

Je tiens à saluer en particulier le travail du rapporteur, le président Alain Milon, et des rapporteurs pour avis, Laurent Lafon et Jean-François Longeot.

Par-delà nos divergences, nous avons tous eu à cœur, lors de cette semaine de débats souvent passionnés, de traduire dans ce texte l’urgence d’agir pour refonder un système de santé à bout de souffle. Cette urgence, les membres du groupe Les Républicains l’entendent dans les territoires depuis de trop nombreuses années. Les inquiétudes voire le sentiment d’abandon qu’expriment nos concitoyens sont à la mesure de leur attachement fort à notre modèle de prise en charge solidaire des soins.

Au regard de ces attentes pressantes, nous avons été nombreux à formuler des regrets sur le projet de loi transmis au Parlement.

Le regret, d’abord, de discuter d’un texte qui laisse un sentiment d’inachevé et bon nombre d’interrogations en suspens, puisque ce sont des ordonnances qui donneront le ton de la réforme, y compris pour des mesures essentielles.

Le regret, ensuite, de ne pas trouver dans ce texte des éléments structurants sur la gouvernance ni le financement de notre système de santé, car des enjeux majeurs pour l’avenir de notre modèle de prise en charge des soins sont ainsi esquivés.

Toutefois, nous avons reconnu des inflexions positives, que nous avons cherché à améliorer et à approfondir.

Le texte issu de nos débats confirme des évolutions attendues, comme la refonte des études de santé, qui permettra une sélection plus progressive des futurs professionnels médicaux et une diversification de leurs profils.

Il confirme également la nécessité urgente de faire entrer notre système de santé dans l’ère numérique. Nous pouvons saluer le travail accompli par la commission des affaires sociales et, plus généralement, le Sénat pour enrichir substantiellement ce volet en rendant automatique l’ouverture de l’espace numérique de santé, tout en prenant en compte les enjeux de protection des données, de médiation numérique et, surtout, les exigences d’interopérabilité.

Les enjeux sont considérables pour faciliter les transmissions d’informations et constituer un levier pour l’indispensable coordination des parcours de soins. Après les atermoiements sur le dossier médical partagé, nous ne pouvions plus nous permettre de prendre un nouveau retard.

Nous avons souhaité marquer l’empreinte du Sénat sur ce texte au travers d’une autre priorité : les territoires.

La réforme du numerus clausus limitera sans doute le gâchis universitaire de la Paces pour bon nombre d’étudiants, et c’est heureux ; mais elle ne conduira pas demain à ce qu’il y ait plus de médecins dans les cabinets médicaux et les hôpitaux. De même, la redéfinition des hôpitaux de proximité ne se fera pas sans ressources médicales, sauf à accélérer le déclassement d’établissements locaux, tant redouté par de nombreux élus.

Nous savons bien qu’il n’existe pas de solution miracle pour répondre à l’urgence de la présence médicale dans les territoires. J’entends les arguments avancés par chacun sur les stages, le conventionnement sélectif ou les autres modalités de contrainte ou de régulation des installations. Je ne pense pas que l’une ou l’autre de ces mesures porte en elle la panacée. C’est une palette d’outils qu’il nous faut mobiliser.

Précisément, madame la ministre, avec ce texte, nous vous proposons de compléter la boîte à outils.

D’abord, sur l’initiative du rapporteur, nous avons décidé d’aller plus loin dans l’incitation forte et rapide des jeunes médecins à s’installer en libéral, au sortir des études. Ensuite, nous voulons négocier avec les médecins sur leur contribution à la réduction des inégalités territoriales. Enfin, nous avons prévu de professionnaliser la dernière année d’internat de médecine sous la forme d’une pratique ambulatoire, en autonomie, qui se déroulerait en priorité dans les zones sous-dotées.

Cette dernière proposition, émanant de diverses travées de notre hémicycle, offre une réponse rapide et pragmatique – j’insiste sur ces qualificatifs – à des difficultés dont le traitement ne peut plus attendre dix ou quinze ans. J’entends les réserves de jeunes étudiants, qui craignent que cela ne conduise à raboter leurs études et la qualité de leur formation, mais je pense, au contraire, que la professionnalisation fait partie de leur formation.

Il n’appartient toutefois qu’à vous, madame la ministre, d’inscrire cette proposition dans la rénovation des études médicales, pour faire de cette année sur le terrain une réponse au besoin des jeunes praticiens d’être mieux accompagnés dans la construction de leur projet professionnel.

Nous souhaitons que la voix du Sénat sur ce sujet crucial soit entendue, sans être déformée. Pour la médecine générale, environ 3 500 internes viendraient en renfort à court terme, au côté de médecins installés, sur les territoires fragilisés en termes démographiques, soit, en moyenne, trente-cinq médecins par département.

Madame la ministre, le Sénat vous tend la main et tend la main aux internes, au service de l’intérêt général !

Nous n’avons pas dans ce domaine oublié les outre-mer, en adoptant une mesure qui répond aux besoins spécifiques de la zone de la Caraïbe.

S’agissant de l’organisation territoriale de la santé, notre conviction s’appuie sur la confiance faite aux acteurs de terrain. Nous avons été nombreux à plaider pour la souplesse et la simplification contre la tentation d’une hyperadministration de la santé. Ne décourageons pas les porteurs de projet en les enferrant dans des carcans trop rigides.

Selon la même logique, nous avons privilégié les démarches de volontariat des établissements pour poursuivre l’acte II des groupements hospitaliers de territoire. Nous avons souhaité également rééquilibrer les rôles de l’État et de la région, au travers des agences régionales de santé et des élus du territoire, en renforçant les prérogatives du conseil de surveillance de ces agences et en en confiant la présidence à un élu, le président de région.

Tout au long de ces débats, nous avons défendu une certaine idée d’une transformation indispensable de notre système de santé. Le texte qui résulte de nos travaux offre des réponses concrètes, complémentaires, simples sans être simplistes, nourries de notre vécu. Madame la ministre, écoutez la voix du Sénat, car elle exprime notre souhait à tous de voir réussir cette réforme, pour moderniser un système de santé en crise et répondre à l’urgence des territoires et à l’appel de nos concitoyens.

Le groupe Les Républicains votera le projet de loi relatif à l’organisation et à la transformation du système de santé tel que le Sénat l’a modifié !

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