Nous avons des échanges réguliers avec nos partenaires d'Arabie Saoudite et des Émirats sur le comportement de leurs armées dans ces zones de conflit. Surtout, ce qui compte, c'est notre appréciation du risque de mauvaise utilisation des équipements. Nous respectons scrupuleusement le traité sur le commerce des armes et, s'il y a un risque prépondérant d'usage contraire à ce traité, nous en tirons les conséquences. Nous avons refusé certaines licences, et cela pourra arriver encore. D'ailleurs, les industriels le savent, et il arrive qu'ils s'autocensurent.
Nous avons l'ambition d'investir sur quarante ans avec notre partenaire allemand dans des programmes structurants, mais nous avons besoin de savoir dans quelles conditions ces équipements pourront être exportés. Si nous devions par principe limiter le champ de nos exportations à l'Union européenne, j'en serais ravie, mais il faudrait que nos partenaires cessent d'acheter majoritairement américain ! Il faut de surcroît que nous dépassions les blocages qui se sont manifestés sur les programmes existants, et qui sont d'autant plus forts que la part qu'y prend l'industrie allemande est faible. Peut-être l'attitude allemande serait-elle différente si ses industriels y prenaient une plus forte part... Il faut que de simples composants ne deviennent pas des éléments bloquants pour l'exportation. Nous discutons donc avec l'Allemagne pour fixer un seuil en-deçà duquel on ne pourra bloquer l'exportation. Pour l'instant, ces discussions n'ont pas abouti.
Le Fonds européen de défense est une véritable révolution, car l'Union européenne a longtemps refusé d'investir le moindre euro dans la recherche militaire. Cet outil, ciblé sur la phase amont, aidera à faire émerger une base industrielle et technologique à l'échelle de l'Europe, dont nous avons besoin dans la compétition mondiale. Les règles ont été négociées avec pragmatisme et bon sens. Exiger la présence de trois pays ne me paraît pas excessif. En tous cas, ce fonds suscite un très grand intérêt, et facilitera les rapprochements entre eux.
Le Parlement peut souhaiter exercer un contrôle plus strict, mais la Constitution interdit de lui confier un rôle en amont dans l'attribution de licences d'exportation. Pour autant, il peut y avoir d'autres façons de dialoguer avec le Parlement et, depuis quelques années, des étapes ont été franchies en ce sens, notamment avec le rapport annuel, qui va encore s'enrichir.
M. Bockel a rappelé que nous avons un rôle particulier à jouer dans le conflit qui n'a que trop duré au Yémen. Nous apportons notre soutien au Représentant spécial des Nations Unies, et M. Le Drian vous a sans doute exposé les initiatives que nous prenons pour faire émerger une solution diplomatique - car il n'y a évidemment aucune solution militaire.
Outre la Belgique, avec laquelle nous aurions aimé doubler le contrat CAMO d'une coopération dans l'aviation, un partenariat sur des chasseurs de mine devrait être annoncé incessamment. Mais il est dommage que nous ne puissions vendre nos avions aux Belges - ce qui serait une manière de promouvoir une forme de préférence européenne.
Beaucoup de nos clients réclament un transfert de technologies. Certaines peuvent être transférées, d'autres n'ont pas vocation à l'être, et la CIEEMG se livre à un examen au cas par cas, car la supériorité technologique de nos armées est l'un des intérêts fondamentaux de la France.