Intervention de Hervé Marseille

Réunion du 13 juin 2019 à 9h30
Politique générale — Débat et vote sur une déclaration du gouvernement

Photo de Hervé MarseilleHervé Marseille :

Depuis deux ans, les signaux se sont multipliés, qui ont forgé l’impression que collectivités et territoires étaient les parents pauvres des politiques publiques, voire qu’ils faisaient l’objet d’un certain dédain jacobin. Il va falloir transformer l’essai du grand débat et convaincre définitivement nos territoires qu’ils sont écoutés. J’ai entendu vos propositions, monsieur le Premier ministre, et je ne doute pas qu’elles seront largement comprises et entendues dans les territoires.

Nous sommes également la chambre de la continuité, du temps long. Nous nous souvenons ainsi de l’engagement pris par le Président de la République, lorsqu’il était candidat, de réduire la dépense publique. Or nous n’avons jamais autant dépensé, et rien ne laisse entrevoir un retournement. De façon structurelle, nous le savons, la démographie exercera une pression à la hausse sur les dépenses de retraite et de santé.

Reste une inconnue : le financement des mesures prises ou les économies à réaliser – vous y avez fait largement référence, monsieur le Premier ministre. En fait, cette inconnue est connue : elle s’appelle le déficit. Si nous sommes attachés à la baisse de la dépense publique, ce n’est pas par fétichisme, mais parce que sont en jeu notre indépendance et le fardeau que nous laisserons à nos enfants. Nous leur laissons déjà un monde au bord de l’abîme : nous ne pouvons pas leur nouer, en plus, une corde autour du cou…

Vous auriez cependant tort de ne pas le faire un peu. Ceux qui vous ont précédé l’ont fait. Reconnaissons que, au moins, le Gouvernement ne fait pas semblant. Mais, pour notre part, ne pouvons pas faire semblant de ne pas voir. De ce point de vue, malheureusement, les gouvernements se succèdent et emploient les mêmes recettes.

Enfin, monsieur le Premier ministre, le scrutin européen a constitué un révélateur en ce qui concerne les priorités écologiques.

Cette révélation succède au spectacle plus ou moins réjouissant d’une course-poursuite entamée voilà quelques années. La course a commencé avec Nicolas Hulot sur la ligne de départ, mais, de même qu’une hirondelle ne fait pas le printemps, M. Hulot à lui seul ne pouvait pas faire le verdissement. Son départ a d’ailleurs prouvé qu’il n’était pas l’arbre qui cachait la forêt, mais plutôt le palmier qui masquait le désert… §

La course a repris avant les élections européennes. Elle se poursuit aujourd’hui avec ce que l’on appelle l’« accélération écologique ». Cette accélération, vous la traduisez par des mesures auxquelles personne ne saurait s’opposer : qui peut être favorable au gaspillage ou à l’utilisation du plastique dans les administrations ? Qui peut encore défendre les niches anti-écologiques ? Évidemment, personne. Vous avez annoncé des textes importants, et c’est avec impatience que nous les attendons.

Notre premier combat est celui pour la biodiversité. En la matière, vous avez décidé d’abandonner le projet de la Montagne d’or. Quand on sait ce que chaque mètre carré de forêt vierge représente, ce n’est pas rien. S’agissant du plastique, l’un des fléaux qui menacent toutes les espèces, vous avez décidé d’agir, mais uniquement sur la consommation, alors que la production est au cœur du problème : les industriels ont fait le choix du plastique pour des raisons économiques, et il va nous falloir les contraindre intelligemment, lorsque des alternatives existent.

Le second combat décisif est celui contre le réchauffement climatique. À cet égard, nous adhérons pleinement à l’idée que la meilleure énergie est celle que l’on ne consomme pas. Nous soutiendrons donc votre plan de révision des aides à la rénovation énergétique, réforme qui s’inscrit dans la droite ligne du Grenelle de l’environnement de Jean-Louis Borloo, celle d’une écologie incitative et non punitive et moralisatrice.

Toutefois, compte tenu des besoins énergétiques à venir, l’efficience ne fera pas tout. Une question essentielle se pose : peut-on simultanément sortir des énergies fossiles et réduire la part du nucléaire ? Nous espérons que l’examen prochain du plan énergie-climat y répondra. Même en relançant l’éolien offshore, il sera difficile d’atteindre la neutralité carbone.

Il nous faut ainsi clarifier notre politique énergétique, faute de quoi – pardonnez-moi, monsieur le Premier ministre – l’accélération écologique plafonnera vite à 80 kilomètres par heure…

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