Intervention de Philippe Dominati

Réunion du 25 juin 2019 à 14h30
Débat à la suite de la réunion du conseil européen des 20 et 21 juin 2019

Photo de Philippe DominatiPhilippe Dominati :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la réunion du Conseil européen qui s’est tenue la semaine dernière, la première depuis les élections européennes, était très attendue pour fixer le cap de l’Union européenne jusqu’en 2024.

Or, loin de tenir ses promesses, cette réunion a surtout confirmé l’existence de divergences majeures entre les États membres, le Conseil européen renvoyant d’ailleurs à une date ultérieure la prise des décisions concernant les principaux sujets intéressant la commission des finances.

Premièrement, le Conseil reste prudent, dans ses conclusions, sur l’état d’avancement des négociations relatives au prochain cadre financier pluriannuel.

Il se contente en effet de « saluer » les travaux déjà réalisés, tout en prévoyant un « échange de vues » sur le sujet en octobre prochain. Certes, le temps européen relève du temps long, et le prochain cadre financier pluriannuel déterminera les moyens financiers de l’Union européenne jusqu’en 2027.

Toutefois, ce retard pèsera nécessairement sur les conditions de démarrage des programmes nationaux bénéficiant des fonds européens, alors que ceux de l’actuelle programmation ont déjà pâti de difficultés importantes. Espérons, madame la secrétaire d’État, que la présidence finlandaise trouvera une issue favorable à ces négociations. Elle dispose pour cela d’un délai serré.

Deuxièmement, à défaut de réussir à s’accorder sur la nomination du futur président de la Commission européenne, et, plus globalement, sur la répartition des nominations aux postes clés des institutions européennes, les vingt-sept États membres ont adopté un programme stratégique pour les années à venir.

Ce programme stratégique vise à orienter les travaux des institutions européennes au cours des cinq prochaines années. Il s’articule autour de quatre priorités, dont celle de construire une « base économique solide et dynamique » ; reste à savoir qui l’incarnera.

Ce programme stratégique, sans apporter de propositions concrètes, maintient l’approfondissement de l’union économique et monétaire au rang des priorités de l’Union européenne. Or l’affirmation de cette priorité contraste quelque peu avec les conclusions du sommet de la zone euro qui s’est tenu vendredi en format élargi.

En effet – c’est le troisième point que je souhaite développer –, ledit sommet a confirmé la révision à la baisse des ambitions de réforme pour la zone euro, que l’Eurogroupe avait déjà esquissée la semaine précédente.

Les États membres ont validé l’accord a minima trouvé sur la capacité budgétaire de la zone euro, abandonnant ainsi la fonction de stabilisation de ce budget que préconisait la France depuis deux ans maintenant. Madame la secrétaire d’État, je ne reviendrai pas sur l’ampleur et l’utilité réduites de ce nouvel instrument budgétaire. Le président de la commission des finances, Vincent Éblé, a lui-même, en la matière, exposé ses réserves la semaine dernière.

Les vingt-sept États membres se sont en revanche accordés sur la nécessité de progresser s’agissant du troisième pilier de l’union bancaire, à savoir le système européen de garantie des dépôts. Pour rappel, en décembre 2015, la commission des finances avait déjà adopté une proposition de résolution sur l’approfondissement de l’union économique et monétaire, dans laquelle elle avait souligné l’effort contributif significatif que représentait le système européen de garantie des dépôts pour les établissements bancaires français.

Elle restera attentive à ces évolutions ; il convient néanmoins de noter que les discussions sont bloquées, sur ce sujet, depuis près de trois ans. Il semble donc peu réaliste de croire à un accord à brève échéance.

Enfin, les États membres ont validé l’accord de l’Eurogroupe relatif à la réforme des statuts du mécanisme européen de stabilité, le MES. Ce dernier devrait constituer un filet de sécurité du Fonds de résolution unique d’ici à 2024. La commission des finances a déjà salué les progrès réalisés en ce sens, permettant de renforcer la résilience de notre système bancaire.

Toutefois, je veux attirer votre attention, madame la secrétaire d’État, sur le poids des contributions des banques françaises au Fonds de résolution unique. En 2018, celles-ci ont représenté 2, 3 milliards d’euros au total. Or, l’ACPR, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, prévoit qu’elles devraient s’élever à 15, 5 milliards d’euros en 2023, soit près de sept fois plus !

La montée en puissance du Fonds de résolution unique doit s’accompagner de règles claires du calcul des contributions, afin de rendre le montant de ces dernières prévisible. Un équilibre doit être trouvé entre la sécurisation du système bancaire européen et les performances de nos établissements financiers.

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