Intervention de Claude Haut

Réunion du 25 juin 2019 à 14h30
Débat à la suite de la réunion du conseil européen des 20 et 21 juin 2019

Photo de Claude HautClaude Haut :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues – je salue particulièrement notre collègue Robert del Picchia, qui nous fait le plaisir d’être revenu auprès de nous aujourd’hui –, ce Conseil européen de juin, le premier depuis les élections européennes de mai, était un moment décisif, à plusieurs égards.

Parmi toutes les questions qui ont été abordées, j’évoquerai seulement trois points.

Premièrement, à l’occasion du sommet de la zone euro qui était accolé à cette rencontre, les chefs d’États et de gouvernement ont formellement adopté l’accord sur la création d’un budget de la zone euro conclu le 14 juin par les ministres des finances de la zone euro. Cet accord, dont notre groupe se félicite, est une bonne nouvelle. Il marque un pas de plus vers le renforcement des investissements et de la convergence entre les dix-neuf économies de la zone euro, pour leur permettre de mieux résister aux chocs économiques.

En effet, l’accord vise trois mesures majeures.

D’abord, pour la première fois, un budget opérationnel sera mis en place, afin d’encourager des réformes favorisant la convergence entre économies. Ensuite, le renforcement du Mécanisme européen de stabilité le transformera en un véritable pare-feu d’intervention rapide et efficace en cas de crise. Enfin, la création d’un filet de sécurité en cas de crise est une nouvelle forme de protection des économies des épargnants français, comme de ceux de toute la zone euro. C’est un engagement du Président de la République, énoncé dans son discours de la Sorbonne. Comme il l’a évoqué à la sortie du Conseil européen, nous allons « dans la bonne direction », mais il faudra « aller beaucoup plus loin sur ces ambitions, […] au bout de la fonction de stabilisation, […] acter évidemment la réforme du mécanisme européen, mais […] bâtir un véritable budget avec gouvernance propre et financement suffisant. » Madame la secrétaire d’État, quelle sera désormais la suite à donner à cet accord ?

Deuxièmement, le sommet a permis des échanges sur un nouvel agenda stratégique pour les cinq années à venir. Comme vous venez de le rappeler, cet agenda a été adopté à l’unanimité. Il s’inscrit dans la continuité des résultats du sommet de Sibiu du 9 mai et est destiné à orienter les travaux des institutions, au lendemain d’élections européennes déterminantes, alors que le renouvellement des institutions est encore en cours.

Les citoyens européens, qui se sont exprimés dans les vingt-huit pays de l’Union européenne, ont notamment voulu attirer l’attention de leurs dirigeants sur la transformation de nos économies et ses conséquences sur leur vie, sur la protection de leurs libertés et des frontières extérieures, ainsi que sur l’urgence climatique.

Nous nous réjouissons que cet agenda stratégique ait su prendre en compte à la fois ces attentes fortes et les défis qui s’imposent désormais à l’Europe, en traçant quatre axes prioritaires : la protection des citoyens et des libertés ; une Europe économiquement solide et dynamique, en passant notamment par une approche plus intégrée autour de la politique industrielle, de la transformation numérique et d’une fiscalité juste et efficace ; une Europe neutre pour le climat, équitable et sociale ; enfin, la défense des intérêts et des valeurs européennes sur la scène internationale et l’affirmation de l’Europe comme un rempart face aux défis mondiaux. Notre groupe restera bien évidemment vigilant quant à la mise en œuvre de cet agenda durant les cinq années à venir. Madame la secrétaire d’État, sur ces quatre axes, des dossiers prioritaires vont-ils émerger ?

Troisièmement, l’un des enseignements cardinaux de ces dernières élections est l’affirmation saine et massive de la préoccupation environnementale. Celle-ci ne s’est pas seulement exprimée en nombre de sièges. Elle s’est aussi durablement installée au cœur du débat pour chacune des formations politiques en jeu. Et elle continuera de s’exprimer ainsi, à la manière d’une force bienveillante… et pas souvent tranquille ! Les revendications pleines d’espoir de notre jeunesse en attestent.

Notre groupe se réjouit que le Conseil européen ait su faire écho à une telle préoccupation en inscrivant ce sujet brûlant à son ordre du jour et en adoptant des conclusions spécifiques.

Ces conclusions invitent le Conseil et la Commission à faire avancer leurs travaux sur les mesures incitatives et sur le cadre qui permettra d’assurer une transition vers une Union européenne neutre pour le climat, conformément à l’accord de Paris.

De même, comme je viens de le souligner, la construction d’une Europe neutre pour le climat, verte et équitable figure bien dans l’agenda stratégique.

La France a réussi à franchir une étape supplémentaire, en rassemblant désormais vingt-quatre pays européens autour de l’objectif d’une économie décarbonée pour 2050, pour appliquer pleinement l’accord de Paris.

Certains préféreront peut-être voir le verre à moitié vide ; je préfère le voir à moitié plein. Et permettez-moi de vous citer un proverbe chinois : « Ne craignez pas d’être lent, … » – en Europe, il faut parfois être un peu lent – « … craignez seulement d’être à l’arrêt ».

L’espoir nous est d’autant plus permis que, rappelons-le, au sommet de Sibiu, seuls huit pays, et non vingt-quatre comme aujourd’hui, étaient convaincus par l’objectif d’une économie décarbonée d’ici à 2050.

Madame la secrétaire d’État, comment réussir à convaincre nos partenaires que sont la Pologne, la République tchèque, la Hongrie et l’Estonie du bien-fondé d’un tel objectif politique pour nos générations futures ? Surtout quand, nous le savons, les énergies fossiles sont au fondement de leurs systèmes économiques ? Pourriez-vous d’ores et déjà nous informer sur la manière dont la présidence finlandaise compte se saisir de ce dossier ?

L’urgence climatique est de mise, et la paralysie politique n’est plus permise. Ce serait la pire des stratégies que d’agir isolément sur ce phénomène global, dans l’attente d’être vertueusement imité.

Nous devons donc mettre les bouchées doubles dans les efforts diplomatiques que nous déployons aujourd’hui à tous les niveaux, et demain au G20 d’Osaka des 28 et 29 juin, puis le 23 septembre lors du sommet onusien sur le climat. Il est de notre devoir de combattre la résignation en tout temps et en tout lieu, car le réchauffement climatique, nous nous en rendons bien compte, c’est le déplacement des populations, c’est la guerre de l’eau, c’est aussi l’effondrement de la biodiversité, du monde animal et végétal tel que nous l’avons toujours connu.

Madame la secrétaire d’État, quel bilan dressez-vous des efforts diplomatiques multipliés de la France quant au respect et à la mise en œuvre de l’accord de Paris ?

Au Sénat, c’est avec cette conscience que nous prendrons bientôt notre part lors de l’examen du projet de loi relatif à l’énergie et au climat. Nous tenterons de répondre au mieux aux attentes qui se sont exprimées – je pense au poids de l’écologie – lors de ce récent vote.

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