Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, au lendemain de ce grand rendez-vous démocratique qu’ont été les élections européennes, et juste après l’adoption lors du Conseil européen des 20 et 21 juin du nouveau programme stratégique, j’interviens dans le cadre de ce débat au Sénat pour dire ma satisfaction, exprimer mes attentes sur l’Union européenne et réaffirmer mes convictions quant à une Union européenne mieux coordonnée et qui s’impose dans un contexte mondial tant déstabilisé. Rarement l’humanité aura eu à faire face à autant de dangers et de défis !
Nous sommes nombreux à nous réjouir des ambitions européennes, alors que certains dirigeants de grands pays, plus ou moins ouvertement, voulaient détruire la construction européenne et que la machine à fabriquer des fake news était à la manœuvre pour que l’Union sorte affaiblie de ces élections et marque le pas. C’est finalement l’inverse qui s’est produit. La participation des électeurs a été importante, avec un beau pourcentage de jeunes, et le vote populiste a été contenu.
Madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, tout cela nous engage et nous oblige à ne plus perdre de temps. Si les Vingt-Sept ont été trop accaparés par le Brexit, ils sont néanmoins sortis unis de l’épreuve. Nous devons maintenant accélérer la marche tant au niveau européen qu’au niveau international. Nous ne pouvons pas nous résigner à être les sous-traitants de l’Asie et du continent américain. Il n’est pas acceptable que nous soyons cantonnés à devenir une simple destination touristique !
Le plan stratégique adopté la semaine dernière va dans le bon sens en nous donnant les moyens de nos ambitions. Une augmentation et une plus grande mutualisation de nos moyens et de nos savoir-faire permettront de renforcer la performance de tous les secteurs de production industrielle, agricole, alimentaire et de services, y compris dans les domaines de l’économie numérique et de l’intelligence artificielle. Elle nous permettra d’être un acteur déterminant dans la lutte contre le réchauffement climatique et en faveur du développement durable que nous devons à nos enfants. Dans ce domaine, efforçons-nous cependant d’adopter une démarche qui ne soit pas d’abord punitive, mais qui suscite plutôt l’enthousiasme.
Ce plan stratégique permettra également de renforcer la protection des Européens sur leur sol et de défendre mieux nos intérêts partout dans le monde. Plus de moyens pour nos armées coordonnées et nos gardes-frontières renforceront également la souveraineté de l’Europe et permettront à notre diplomatie d’être moins dépendante.
Ce plan, enfin, permettra d’être à l’initiative d’un plan de développement économique destiné aux pays pauvres, à l’image du plan Marshall pour aider à la reconstruction de l’Europe au sortir de la guerre. Ainsi, nous réduirions significativement les migrations subies. Cette démarche est à entreprendre en même temps que le renforcement du contrôle des flux migratoires à nos frontières, car il est illusoire de croire que nous pouvons accueillir toute la misère du monde.
Ainsi, ensemble, nous irons plus vite et plus loin. Mais ces ambitions vitales pour nos pays européens ne pourront se concrétiser que si l’Europe se dote d’un budget beaucoup plus élevé que celui de la période qui s’achève.
Il devra être alimenté de plusieurs manières. Tout d’abord, par des ressources propres en lui affectant, par exemple, une part significative de la fiscalité généralisée des géants du numérique. Après la France et quelques pays européens, tous les membres de l’OCDE, États-Unis d’Amérique compris, vont enfin décider de taxer les GAFA. Ensuite, via le versement par chaque pays des sommes qu’ils consacraient jusque-là aux actions désormais déléguées à l’Union européenne. C’est ainsi qu’ont procédé les communes avec les communautés de communes.
Madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la dangerosité du monde, agité par certains dirigeants aux comportements incertains et irresponsables, oblige les responsables européens à se rassembler sur l’essentiel et à ne pas être passifs et soumis au contexte international imposé par d’autres. Les bons sentiments comme une certaine naïveté n’ont que trop duré.
Si nous voulons agir plus efficacement contre la pauvreté, pour un développement durable réaliste et promouvoir la démocratie partout dans le monde, l’Europe ne peut plus être celle du temps long, car les urgences nous obligent à accélérer ce temps.
Oui, l’Europe est à réformer pour la mettre plus au cœur de la vie de chacun d’entre nous. Oui, l’Europe doit être plus qu’une zone de libre-échange fondée sur le commerce et la finance. Oui, elle doit être synonyme de progrès social, d’humanisme et de développement durable. Oui, l’Europe doit être moins technocratique. Oui, elle doit mieux s’organiser pour concourir à armes égales dans la compétition mondiale. Oui, face à toutes les menaces, l’Europe doit continuer à renforcer la protection due à chacun de ses concitoyens.
Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, même si nous ne nous en rendons pas toujours compte, l’Europe avance.