Intervention de Guillaume Collinot

Mission d'information Transports aériens — Réunion du 18 juin 2019 à 15h30
Table ronde avec les compagnies aériennes opérant des lignes d'aménagement des territoires

Guillaume Collinot, directeur général de Twin Jet :

Nous sommes les parents pauvres parmi mes confrères. Nous n'avons que 12 avions : des Beechcrafts 1900 D de 19 sièges. Ces avions ont été mis au point pour faire des vols d'une heure à 2 heures maximum avec 15 à 19 passagers à bord. C'est dans ces conditions qu'ils sont le plus efficaces. Nous opérons 16 destinations, dont 4 à l'international. Une seule destination est subventionnée sous forme OSP. C'est la ligne entre le Puy-en-Velay et Paris. Auparavant, nous opérions aussi la ligne de Périgueux. Malheureusement, la difficulté pour Périgueux de trouver des fonds a mis fin à cette ligne. La situation devient difficile pour les acteurs économiques de ce territoire. Ils doivent soit se rendre à Limoges, soit à Bordeaux pour prendre le TGV. Je tiens d'ailleurs à signaler que si le trajet vers Bordeaux paraît simple sur une carte, il se complique dans la réalité : il faut prendre la rocade, avec les dangers de la route que cela implique.

Là où des gros appareils peuvent jouer avec le « yield management » - faire varier le prix du billet - en fonction du nombre de sièges restants, avec un avion de 19 sièges, on ne peut pas proposer des billets à 40 euros. Nos billets sont au minimum à 120 ou 150 euros. Ces tarifs ne sont pas éhontés, mais correspondent au minimum que l'on peut facturer un billet, en prenant en compte la subvention pour OSP, pour atteindre notre point d'équilibre.

Parmi les compagnies aériennes françaises, aucune n'est une « chasseuse de subventions ». Une seule de nos destinations est subventionnée. Il n'est pas dans notre modus operandi d'attendre qu'une OSP se libère, pour pouvoir s'y engouffrer et voler aux frais du contribuable. J'irai même plus loin. Je pense que certaines lignes de désenclavement sont « des lignes trop luxueuses » lorsqu'elles sont opérées par des ATR 42. Le coût en valeur absolu d'un ATR 42 est logiquement plus cher qu'un plus petit avion. Rapporté en nombre de passagers effectifs, le Beechcraft 1900 coûte moins cher.

Vous avez indiqué l'importance de la ponctualité. L'absence de ponctualité et de régularité était reprochée à HOP sur la ligne d'Agen. Ils ont été accusés de « sabotage » de la ligne. Je pense que cette expression est un peu forte. Il y a peut-être des difficultés pour maintenir un avion et être réactif. En tant que petite compagnie, notre lot quotidien est d'être plus réactif que les grosses compagnies pour pouvoir survivre dans ce monde concurrentiel.

Vous avez évoqué l'accueil réservé aux lignes régionales par le groupe ADP. Il est certain que l'on a mal vécu en 2016 et 2017 les changements de politique tarifaire d'ADP, où par le biais d'un lissage de la taxe passager on faisait croire aux compagnies que cela leur coûtait moins cher. Mais les petits avions ont moins de passagers. Dès lors, la taxe passager, même si elle baisse, ne vient pas contrebalancer la redevance d'atterrissage. Cela a eu pour effet de multiplier par 6 le prix global de l'atterrissage à Paris. Cela peut se comprendre, car d'un point de vue économique pur, nous allons prendre le même « slot » - le même espace temps -, et même parfois plus car nos avions vont moins vite que les gros avions. Mais la taxe passager qui va revenir à ADP sera de 12 passagers dans notre cas, et de 380 passagers pour un gros avion. Dès lors, il faut savoir ce que l'on veut : ADP a-t-il une pure approche économique, ou bien doit-il jouer un rôle en matière de désenclavement ? Dans ce cas, il faut permettre aux petits porteurs d'opérer dans de bonnes conditions.

Il faut également laisser la possibilité aux plus petits porteurs de répondre aux OSP. Cela n'est pas toujours le cas. On a vu récemment que les OSP de Limoges et d'autres villes demandaient un nombre minimal de 29 passagers. Forcément, les avions de 19 places ne peuvent pas répondre. Je ne vois pas bien le risque pris par les collectivités de ne pas laisser la possibilité aux petits transporteurs de répondre.

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