Intervention de Olivier Dussopt

Réunion du 26 juin 2019 à 21h00
Transformation de la fonction publique — Article 22 bis B

Olivier Dussopt :

Jusqu’au 31 décembre 2018, les régions exerçaient la compétence en matière d’apprentissage, finançaient les CFA et les frais de formation des apprentis. Certaines régions finançaient l’apprentissage dans la fonction publique, à des niveaux inégaux, en fonction des choix politiques des présidents de région et de leurs exécutifs.

En réalité, les politiques de soutien à l’apprentissage des régions étaient intégralement financées par la taxe d’apprentissage, acquittée par les seules entreprises du secteur privé. Ainsi, depuis longtemps, le financement par certaines régions de l’apprentissage dans la fonction publique territoriale reposait sur une recette exclusivement privée.

La réorganisation du secteur de l’apprentissage et la création de France Compétences ont souligné cette forme d’incongruité qui consistait à financer une activité de formation publique avec de l’argent privé.

Aujourd’hui, nous devons trouver une solution pour permettre un meilleur financement de l’apprentissage.

Un amendement en ce sens a été adopté à l’Assemblée nationale. J’avais indiqué devant la commission des lois que le Gouvernement était ouvert à une discussion sur le positionnement du curseur et le niveau de soutien public au développement de l’apprentissage, votre commission jugeant trop élevé un taux de 75 %. Nous estimons que retenir un taux global de 50 % peut être une bonne solution.

En quoi notre position diffère-t-elle maintenant de celle de la commission des lois ? Cette dernière a prévu une répartition de ces 50 % en deux tranches : 20 % seraient apportés par le CNFPT en fonds propres, en application de la loi de 2016 qui lui donne compétence en matière d’apprentissage, et 30 % par un prélèvement sur recettes de l’État. Le Gouvernement ne peut agréer cette proposition de la commission des lois. Nous considérons que les employeurs territoriaux et les organismes qui les fédèrent sont compétents en matière de formation des agents territoriaux, de même que l’État est compétent pour la formation de ses agents. J’ai dit sous forme de boutade, à l’occasion d’une autre discussion, que si l’on entérinait le principe d’un financement de l’apprentissage dans les collectivités par un fonds d’État, il faudrait peut-être envisager un financement de la formation continue des agents de l’État par un fonds de concours des collectivités, pour que chacun puisse s’y retrouver !

Je pense qu’il nous faut travailler versant par versant sur cette question. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement, revenant sur la proposition de la commission tendant à créer un prélèvement sur recettes de l’État, dépose un amendement visant à prévoir que le CNFPT finance l’apprentissage à hauteur de 50 %. S’il y avait une montée en charge de 8 000 à 15 000 apprentis d’ici à 2022, cela représenterait pour le CNFPT une dépense supplémentaire d’environ 45 millions d’euros, dans la mesure où, dans la fonction publique territoriale, l’apprentissage est le plus développé pour les métiers dont les référentiels, en termes de coûts de formation, ne sont pas parmi les plus élevés. Nous considérons que le financement pourrait être assuré par une réorientation et une optimisation des moyens du CNFPT, qui s’élèvent au total à 387 millions d’euros par an, dont 300 millions d’euros directement consacrés à la formation des agents locaux.

Nous pensons que le dynamisme des cotisations au CNFPT et le recouvrement des indus récurrents, qui s’élèvent à environ 5 millions d’euros par an, pourraient permettre de financer l’apprentissage. La mise en œuvre des « Parcours professionnels, carrières et rémunérations », les PPCR, se traduit par un dynamisme de la masse salariale, même avec une diminution des effectifs de la fonction publique territoriale. Dans la mesure où les cotisations au CNFPT sont fondées sur la masse salariale, les recettes de cet organisme progressent de façon constante.

Par ailleurs, nous pouvons ouvrir un certain nombre de chantiers, tel le réajustement du principe de gratuité de formations qui sont théoriquement payantes.

Enfin, un certain nombre d’offres subsidiaires du CNFPT pourraient être revues.

Nous partageons le point de vue de la commission des lois sur l’évolution des modalités de concours, qui pourrait justifier une minoration du versement au profit des centres de gestion, dont le montant est aujourd’hui de 22 millions d’euros. Vous nous avez convaincus, madame, monsieur les rapporteurs : ces 22 millions d’euros ne peuvent être supprimés intégralement ; il ne peut s’agir que d’un réajustement partiel. Je précise à l’adresse de ceux qui nourriraient des inquiétudes que, d’un point de vue consolidé, le fonds de roulement des centres de gestion est tout de même significatif, puisqu’il s’établit à 284 millions d’euros.

J’ajoute que l’on ne pourra faire l’économie d’une réflexion sur les charges de gestion du CNFPT, qui s’élèvent à 12 % de ses recettes, soit 40 millions d’euros. Ce montant est important. Un certain nombre des dispositions adoptées par votre commission des lois, notamment en matière de réorganisation territoriale, nous semblent devoir concourir à cette réflexion.

Pour toutes ces raisons, sous réserve d’un approfondissement et d’un travail plus technique sur les chiffres que je viens d’évoquer, nous considérons qu’une participation du CNFPT à hauteur de 50 % serait viable et respectueuse de la différenciation entre la fonction publique territoriale et la fonction publique d’État.

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