Le rapport propose 20 pistes pour renforcer cette méthode de maîtrise des normes en aval de leur production, et en particulier le pouvoir de dérogation.
Il s'agit, en premier lieu, d'améliorer la connaissance du dispositif par les élus et fonctionnaires territoriaux, mais aussi de mieux former les services de l'État à une méthode qui va à l'encontre de leur culture professionnelle centrée sur l'application de la règle (recommandations 4 à 15). Certaines mesures sont très simples. Par exemple, nous recommandons d'insérer sur les sites internet des préfectures et du ministère de l'Intérieur une rubrique aisément accessible sur la simplification des normes, en particulier sur le dispositif de dérogation (recommandation 15).
Autre exemple : nous proposons de tirer de l'expérimentation un guide de bonnes pratiques qui serait diffusé aux préfectures et aux exécutifs locaux (recommandation 9). La recommandation la plus emblématique est probablement d'inclure des modules de formation sur la politique de lutte contre la prolifération des normes dans les écoles du service public, en particulier l'ENA, ou ce qui la remplacera, l'INET et les IRA (recommandation 12).
En second lieu, nos propositions visent à étendre le champ de la dérogation aux normes relevant des décisions des préfets, de trois façons :
- d'abord, en supprimant la liste limitative de domaines pour lesquels la dérogation est possible. Cette liste induit des ambiguïtés sur le champ réel du décret. Bien sûr, les domaines régaliens et sensibles, comme la sécurité, demeureraient exclus (recommandation 18). Il y a là une légère prise de risque, car il y aura toujours - y compris en notre sein - des critiques à l'égard de tout ce qui peut aller à l'encontre du principe sacré d'égalité devant la loi. Il nous faut cependant accepter de vivre ces temps où priment l'adaptation, la différenciation et la souplesse ;
- ensuite, en écartant la condition relative à l'existence de « circonstances locales » pour déroger (recommandation 19). La notion de « circonstances locales » est en effet imprécise. Elle a conduit un préfet à refuser au conseil départemental une dérogation dans la mesure où la demande portait sur l'ensemble du département, ce qui est absurde. Surtout, le cumul entre la condition de l'existence d'un motif d'intérêt général et celle de circonstances locales paraît inutile et superfétatoire. Comment, s'agissant d'une dérogation à des normes, un acte motivé par l'intérêt général et pris par une autorité locale comme le préfet, dans le cadre de ses compétences et dans un cadre local comme le département, ne serait-il pas ipso facto adapté aux circonstances locales ?
- enfin, en autorisant le représentant de l'État à déroger à des décisions relevant de la compétence des autorités supérieures. Par exemple, le préfet de département pourrait déroger pour des textes relevant du préfet de région, voire du ministre (recommandation 20).
J'ai souhaité le maintien de cette dernière recommandation, bien qu'elle soit un peu provocatrice. En pratique, elle fera l'objet d'une mise en oeuvre concertée ; un préfet de département qui passerait outre l'opposition de son préfet de région à une dérogation fragiliserait évidemment sa situation.