Soyez les bienvenus, mes chers collègues. Conformément à la mission de simplification des normes applicables aux collectivités territoriales que le Bureau du Sénat a confiée à notre délégation, nous avons lancé un cycle d'auditions sur le sujet. Nous avons notamment entendu :
- les représentants de l'Association des ingénieurs territoriaux de France et du Syndicat national des directeurs généraux des collectivités territoriales, sur l'impact, pour les collectivités territoriales, des textes récents en matière de simplification des normes (cette audition n'a pas été la plus riche, faute d'avoir été suffisamment préparée) ;
- les préfets de Vendée et du Haut-Rhin, sur l'impact du décret du 29 décembre 2017 relatif au pouvoir de dérogation aux normes des préfets, qui ont su nous rendre compte de l'expérimentation qui a été confiée à six préfets, dont eux deux ;
- le Secrétaire général du Gouvernement, Marc Guillaume, sur l'application du principe « 2 normes retirées pour 1 norme créée » ;
- le président du Conseil national d'évaluation des normes (CNEN), Alain Lambert, qui est revenu sur l'ensemble de ces sujets.
À la suite de ces rencontres, il nous a paru intéressant de travailler sur un rapport centré sur la notion d'interprétation facilitatrice des normes et sur l'expérimentation en cours qui tend à attribuer aux préfets un pouvoir de déroger à certaines normes réglementaires.
Depuis plusieurs années, les gouvernements successifs tentent de maîtriser l'inflation normative. Le tournant pris sous l'impulsion du Président Larcher consiste à ne plus en parler comme d'une fatalité, mais de se donner les moyens, en tant que Parlement, de remédier à cette plaie française, y compris en balayant devant notre propre porte. Le Sénat, et en particulier notre délégation, est à cet égard en première ligne. Les initiatives parlementaires ont été multiples :
- la résolution, que nous avons portée avec Rémy Pointereau, tendant à simplifier certaines normes réglementaires relatives à l'urbanisme ;
- la proposition de loi portant accélération des procédures et stabilisation du droit de l'urbanisme, déposée par nos collègues Marc Daunis et François Calvet, sous la houlette de Rémy Pointereau ;
- la proposition de loi portant Pacte national de revitalisation des centres-villes et centres-bourgs, présentée par Rémy Pointereau et Martial Bourquin, qui a abouti à l'injection de dispositions de simplification dans la loi ELAN ;
- la résolution tendant à simplifier certaines normes réglementaires relatives à la pratique et aux équipements sportifs, présentée par Dominique de Legge, Christian Manable et Michel Savin.
Pour autant, et pour l'instant, les résultats ne sont pas à la hauteur des espérances.
Il faut rappeler quelques chiffres qui illustrent la difficulté de réduire significativement le flux des nouvelles normes et le stock des anciennes.
Pour le flux, chaque année sont publiés : environ 50 à 60 lois, hors conventions ; entre 1 600 et 1 800 décrets ; plus de 8 000 arrêtés ministériels ; entre 1 300 et 1 400 circulaires. Quant au stock, il s'établissait début 2018 à plus de 80 000 articles législatifs et plus de 240 000 articles réglementaires en vigueur.
Confrontés à cette difficulté, les pouvoirs publics se sont tournés vers une nouvelle méthode. Elle consiste à réduire le poids des normes en aval de leur production, d'une part, en sollicitant des services de l'État une interprétation « facilitatrice » de ces normes et, d'autre part, en confiant à certains préfets, dans le cadre d'une expérimentation, le pouvoir de déroger à certaines d'entre elles. C'est cette méthode que nous voulons vous présenter.
Le premier volet, celui de l'interprétation facilitatrice des normes, s'est traduit par deux instructions aux préfets des Premiers ministres Ayrault (2013) et Valls (2016). Ces instructions étaient lapidaires. Je cite celle de 2013 : « À l'exception des normes touchant à la sécurité, il vous est demandé désormais de veiller personnellement à ce que vos services utilisent toutes les marges de manoeuvre autorisées par les textes et en délivrent une interprétation facilitatrice pour simplifier et accélérer la mise en oeuvre des projets publics ou privés ». C'est probablement l'un des textes officiels les plus courts de l'histoire administrative, et il laisse une marge à l'interprétation assez large. Ces textes lapidaires, de simples circulaires, constituaient une base juridique fragile. Enfin, de manière assez étonnante, ils étaient dépourvus de tout dispositif de suivi et d'évaluation. Il est donc pratiquement impossible de savoir comment ils ont été appliqués et, a fortiori, de les évaluer.
En fait, plus qu'un principe juridique, l'interprétation facilitatrice des normes est tout à la fois un principe de bon sens et un principe de management. Mais son application est donc tributaire de la volonté et de la capacité d'engagement des préfets. Faut-il s'en désintéresser ? Nous ne le pensons pas, mais notre rapport avance des propositions pour le faire entrer dans les moeurs de l'administration déconcentrée et en encourager le déploiement. En effet, comme tout principe de management, il ne peut porter ses fruits qu'enraciné dans la culture professionnelle des agents chargés de le mettre en oeuvre. Or, cette culture est traditionnellement davantage centrée sur l'application stricte de la norme.
Pour ne pas laisser le préfet seul sur le sujet, pour l'encourager, mais aussi plus largement pour renforcer le dialogue entre les collectivités et l'État, dont tous nos travaux montrent la dégradation, le rapport propose d'instituer une instance départementale auprès du préfet, compétente pour donner un avis sur des cas complexes d'interprétation des normes, les dérogations sollicitées au titre décret du 29 décembre 2017 - dont nous allons parler -, mais aussi pour identifier les difficultés locales en matière de mise en oeuvre des normes, et pour porter ses difficultés à la connaissance de l'administration centrale (recommandation 2).
Le pouvoir de dérogation aux normes, qui constitue le second volet, s'appuie, lui, sur une base juridique plus solide, à savoir un décret de décembre 2017. Il s'agit d'une expérimentation dans 20 départements et régions, permettant aux préfets, dans un certain nombre de domaines limitativement énumérés, de déroger aux seules décisions individuelles relevant de leur compétence et fondées sur des mesures réglementaires. Nous parlons donc de compétences de l'État qui relèvent du préfet.
Cette expérimentation a véritablement débuté en avril 2018 et doit s'achever en décembre 2019. Comme elle fait l'objet d'un véritable suivi par le ministère de l'Intérieur, nous avons pu l'évaluer.
Ce pouvoir de dérogation a d'ores et déjà joué un rôle utile dans les territoires où il est expérimenté. Il a pu, selon les cas, réduire les délais d'obtention de décisions, voire « sauver » des projets complexes ou souffrant de défauts bénins, tels des dépassements de délais.
Néanmoins, ce dispositif n'a pas encore été exploité à plein, notamment en raison de sa méconnaissance par ses bénéficiaires potentiels, en particulier les collectivités, mais aussi en raison des limites étroites imposées au moment de sa conception. À la fin de l'année, le Gouvernement doit décider de son extension ou non. Il nous semble qu'il doit être pérennisé, étendu à tout le territoire et voir son champ élargi.
Le rapport propose 20 pistes pour renforcer cette méthode de maîtrise des normes en aval de leur production, et en particulier le pouvoir de dérogation.
Il s'agit, en premier lieu, d'améliorer la connaissance du dispositif par les élus et fonctionnaires territoriaux, mais aussi de mieux former les services de l'État à une méthode qui va à l'encontre de leur culture professionnelle centrée sur l'application de la règle (recommandations 4 à 15). Certaines mesures sont très simples. Par exemple, nous recommandons d'insérer sur les sites internet des préfectures et du ministère de l'Intérieur une rubrique aisément accessible sur la simplification des normes, en particulier sur le dispositif de dérogation (recommandation 15).
Autre exemple : nous proposons de tirer de l'expérimentation un guide de bonnes pratiques qui serait diffusé aux préfectures et aux exécutifs locaux (recommandation 9). La recommandation la plus emblématique est probablement d'inclure des modules de formation sur la politique de lutte contre la prolifération des normes dans les écoles du service public, en particulier l'ENA, ou ce qui la remplacera, l'INET et les IRA (recommandation 12).
En second lieu, nos propositions visent à étendre le champ de la dérogation aux normes relevant des décisions des préfets, de trois façons :
- d'abord, en supprimant la liste limitative de domaines pour lesquels la dérogation est possible. Cette liste induit des ambiguïtés sur le champ réel du décret. Bien sûr, les domaines régaliens et sensibles, comme la sécurité, demeureraient exclus (recommandation 18). Il y a là une légère prise de risque, car il y aura toujours - y compris en notre sein - des critiques à l'égard de tout ce qui peut aller à l'encontre du principe sacré d'égalité devant la loi. Il nous faut cependant accepter de vivre ces temps où priment l'adaptation, la différenciation et la souplesse ;
- ensuite, en écartant la condition relative à l'existence de « circonstances locales » pour déroger (recommandation 19). La notion de « circonstances locales » est en effet imprécise. Elle a conduit un préfet à refuser au conseil départemental une dérogation dans la mesure où la demande portait sur l'ensemble du département, ce qui est absurde. Surtout, le cumul entre la condition de l'existence d'un motif d'intérêt général et celle de circonstances locales paraît inutile et superfétatoire. Comment, s'agissant d'une dérogation à des normes, un acte motivé par l'intérêt général et pris par une autorité locale comme le préfet, dans le cadre de ses compétences et dans un cadre local comme le département, ne serait-il pas ipso facto adapté aux circonstances locales ?
- enfin, en autorisant le représentant de l'État à déroger à des décisions relevant de la compétence des autorités supérieures. Par exemple, le préfet de département pourrait déroger pour des textes relevant du préfet de région, voire du ministre (recommandation 20).
J'ai souhaité le maintien de cette dernière recommandation, bien qu'elle soit un peu provocatrice. En pratique, elle fera l'objet d'une mise en oeuvre concertée ; un préfet de département qui passerait outre l'opposition de son préfet de région à une dérogation fragiliserait évidemment sa situation.
Le rapport pose la question d'une différenciation territoriale plus ambitieuse, sous une forme qui reste toutefois prudente. Il suggère ainsi d'envisager d'étendre le droit de dérogation aux actes des collectivités territoriales. Ce droit de dérogation serait exercé par les autorités décentralisées, par exemple après avis du préfet (recommandation 16) ;
Nous proposons également de réfléchir à la possibilité d'autoriser des dérogations à des normes législatives ou réglementaires sollicitées par les collectivités territoriales et relatives à leurs compétences, sous réserve, bien sûr, d'une révision constitutionnelle, et d'un mécanisme politique destiné à éviter les abus (recommandation 17). Il s'agit d'envisager un mode de dérogation à la fois plus simple et mieux encadré que celui actuellement prévu à l'article 15 du projet de révision constitutionnelle.
Vous savez en effet que la rédaction actuelle de ce texte aboutirait à ce que chaque dérogation soit autorisée par la loi lorsqu'elle touche à des normes législatives, ou par décret du Premier ministre lorsqu'elle concerne des mesures réglementaires. Dans le premier cas, à savoir les mesures de nature législative, nous ne sommes que dans une différenciation « déléguée », puisqu'il faudra à chaque fois que le pouvoir central, à savoir le Parlement et l'Exécutif, accepte la dérogation. La procédure est lourde, peut être bloquée par une majorité hostile à l'Assemblée, et risque fort d'être aussi décevante que celle que prévoit déjà le troisième alinéa de l'article 72 de la Constitution depuis 2008, qui n'a été appliqué que quatre fois en plus de dix ans.
Quant au second cas, c'est-à-dire pour les dérogations à des textes réglementaires, le texte du Gouvernement se contente d'une autorisation par un simple décret du Premier ministre, ce qui, pour le coup, ne garantirait pas un contrôle très strict et, surtout, évacue le Parlement du dispositif, alors même que la question sous-jacente est celle de l'unité nationale.
Nous proposons donc de réfléchir à un mécanisme politique unique de contrôle, pour les mesures législatives et réglementaires, qui pourrait être un accord au cas par cas du Sénat, représentant constitutionnel à la fois de la Nation et des collectivités territoriales, et qui a donc toute légitimité pour être positionné sur le sujet. Vous l'aurez compris, il s'agit d'une simple contribution au débat qui ne va pas manquer de s'engager sur la différenciation territoriale et que nous ne prétendons pas clore aujourd'hui. Il nous semble néanmoins important de bien réfléchir aux meilleures hypothèses pour ce droit à la différenciation territoriale.
Je remercie pour son implication dans ce dossier M. le premier vice-président de la délégation, qui est, outre mon co-rapporteur, le référent de notre délégation sur la problématique des normes.
Merci pour ce rapport, qui est très intéressant. J'y retrouve certains points que nous avons travaillés avec Marc Daunis et Rémy Pointereau, notamment sur la constitution d'un comité local qui puisse aider le préfet dans sa décision. Comme le principe de dérogation se heurte dans les préfectures à la peur du contentieux juridique ou pénal, le fait de pouvoir s'appuyer sur une décision plus collective peut aider les préfets à franchir certains obstacles.
J'appelle aussi de mes voeux, dans le cadre d'une vraie réforme du Sénat, la création d'un service d'études d'impact, afin que nous puissions anticiper l'application des normes. On ne peut se contenter des études d'impact du Gouvernement, qui sont souvent insuffisantes, légères...
Cette création nous permettrait de répondre à une critique fréquente consistant à nous reprocher de voter des normes sans nous préoccuper de leur viabilité sur le terrain. J'ajoute que les études d'impact sur les propositions de loi devraient être obligatoires.
Je suis également favorable à la création d'une instance départementale ayant vocation à éclairer les décisions de dérogation des préfets. Quelle en serait, selon vous, la composition ?
Nous savons qu'en tant que producteurs de normes, nous faisons partie du problème. Il faut donc accepter que ce que nous reprochons à autrui, c'est-à-dire à l'État, nous soit également reproché par les élus locaux, bien que nous soyons convaincus que nos amendements aux propositions et aux projets de lois soient indispensables.
Le Sénat a déjà fait des progrès, sous l'impulsion de son président, en se donnant des moyens d'expertise et d'étude dédiés, malgré un contexte budgétaire difficile. C'est un premier pas. On peut aussi citer le dispositif qui a été mis en place pour questionner le terrain de manière institutionnalisée. Il faut continuer à plaider, à travers nos différentes instances, pour que des moyens spécifiques soient dévolus aux études d'impact, ou au moins que l'accès aux moyens existants soit facilité. Cependant, « qui trop embrasse mal étreint », et je doute que nous puissions, au Sénat, prendre en charge des études d'impact sur toutes nos propositions de loi, dont certaines sont mises en avant pour des raisons politiques, afin de faire bouger des lignes ou de faire passer des messages plus que pour être réellement appliquées. Il faut donc cibler ce qui mérite d'être évalué par nous.
Je partage cette approche. Alain Lambert a aussi proposé, pour éviter que les études d'impact soient très légères et orientées, de procéder à une évaluation de leur mise en oeuvre après trois ans, ce qui nécessiterait évidemment des moyens.
S'agissant de la commission départementale évoquée, on peut imaginer qu'elle réunisse les agents des services de l'État concernés, des élus des collectivités, des juristes, des représentants de la juridiction administrative, mais aussi des personnes qualifiées qui pourraient enrichir les débats.
Les parlementaires pourraient-ils en faire partie, au moins ponctuellement ?
Ce serait d'autant plus pertinent qu'il existe un risque, dans le contexte de fin du cumul des mandats, de déconnexion des parlementaires avec le terrain. Ces derniers peuvent décider, lorsqu'ils n'ont pas d'autres responsabilités, d'avoir le temps de s'impliquer dans ce type d'instance.
Le président du Sénat s'était engagé, lors de sa visite en Savoie en présence de Jean-Marie Bockel et de Mathieu Darnaud, à plaider pour l'instauration de « préfets simplificateurs » en zones de montagne, compte tenu des problématiques spécifiques qui les caractérisent. Au-delà des documents que m'ont transmis les services de la délégation à la suite de l'audition des deux préfets, j'ai constaté que ce dispositif de « préfet simplificateur » était assez réduit. Envisage-t-on de l'amplifier et de l'enrichir ou, au contraire, de l'abandonner parce que cette instauration n'a pas été très productive ?
Nous préconisons que cette expérimentation soit élargie à l'ensemble du territoire national. Le principe du « préfet simplificateur » est à même de prendre en compte les spécificités territoriales, à l'image de l'aménagement des retenues d'eau collinaires qui, comme en Savoie, impactent une partie de l'économie de montagne.
Après l'audition, fort intéressante, de deux des préfets impliqués dans l'expérimentation, l'un des axes forts du présent rapport est de passer à la vitesse supérieure, car nous disposons de tous les éléments d'une démarche bien encadrée qui pourrait s'étendre.
Nous avons proposé, avec François Calvet, de mettre en place la commission départementale précédemment évoquée sur les décombres de la commission de conciliation de l'urbanisme. Il s'agirait ensuite de casser le fonctionnement en silos de l'administration départementale pour ensuite instaurer un débat tripartite avec l'État, les porteurs de projets et les collectivités, de façon à fixer en amont la règle du jeu et éviter ainsi d'avoir à retravailler chaque projet à mesure qu'il progresse et se heurte aux exigences des directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) et autres directions départementales des territoires et de la mer (DDTM). Cela permettrait aussi de sortir l'État de sa posture « d'empêcheur d'avancer », puisqu'il se positionnerait comme accompagnateur, dans le cadre d'un dialogue qui marquerait le passage d'un urbanisme réglementaire à un urbanisme de projet.
S'agissant de la participation des parlementaires, je me demande si elle ne relèverait pas d'une régulation qui interviendrait dans un deuxième temps, au sein d'une instance de régulation qui étudierait ce qui s'est passé en commission, c'est-à-dire la mise en oeuvre à l'échelon départemental de la volonté de simplification et d'adaptation.
J'ai été frappé par les aveux faits par l'administration centrale lors de nos auditions, qu'il s'agisse des DREAL ou du Secrétariat général pour la modernisation de l'action publique (SGMAP), reconnaissant être dans l'incapacité d'évaluer l'efficacité des lois sur la simplification faute de disposer de remontées de données de terrain. L'instance de régulation que je viens de proposer pourrait pallier cette lacune. Elle se réunirait lors d'un rendez-vous annuel formalisé, afin d'éviter que la force des habitudes ou les réticences des uns et des autres la fassent tomber progressivement en désuétude.
Quelle sera la différence entre la différenciation et la dérogation aux normes ?
La notion de différenciation n'est pas arrêtée, mais il semble qu'elle porte plutôt sur l'adaptation à la diversité des territoires, sur un plan quasi institutionnel, mais son acception commune actuelle renvoie cependant à une application souple, département par département, de normes nationales. La dérogation, notons-le, ne fait pas disparaître la norme concernée.
La différenciation prend en compte le fait que certaines dynamiques territoriales sont suffisamment spécifiques, comme en zones de montagne, pour que l'on admette certaines dispositions sortant du champ national. D'une certaine façon, la différenciation est une dérogation pérenne qui prend en compte le champ territorial.
Le rapport d'information « Réduire le poids des normes en aval de leur production : interprétation facilitatrice et pouvoir de dérogation aux normes» est adopté à l'unanimité.
Le Président de la République a évoqué à plusieurs reprises, y compris pendant le Grand débat, la nécessité de mettre en oeuvre certaines dispositions visant à améliorer les conditions d'exercice des mandats locaux, en faisant parfois explicitement référence au travail de notre délégation. J'ai rencontré début mai à sa demande Mme Jacqueline Gourault, pour faire un tour d'horizon du sujet. Cela a été l'occasion d'évoquer beaucoup de choses, la ministre exprimant à cette occasion plutôt ses opinions personnelles qu'une véritable position gouvernementale. Au terme de cette réunion et de plusieurs contacts préparatoires, j'ai eu le sentiment qu'entre l'annonce que l'on allait travailler et le début du travail il y aurait encore un chemin...
Or il a été arbitré dans le courant du mois de mai que le sujet serait porté, comme celui des irritants de la loi NOTRe, par Sébastien Lecornu. Après s'être entretenu avec le président du Sénat, le président de la commission des lois et le rapporteur de la loi NOTRe, nous nous sommes rencontrés la veille de l'Ascension.
Au-delà de la réputation d'élu de Sébastien Lecornu, je l'ai réellement vu à l'oeuvre sur le dossier Fessenheim, sur lequel il avait été excellent, de l'opinion générale, alors que c'était un dossier que je n'hésite pas à qualifier de « pourri ». C'est donc a priori un interlocuteur avec lequel nous allons pouvoir avancer. Le sujet des conditions d'exercice des mandats locaux faisant l'objet d'une demande explicite du président du Sénat, nous n'avons pas avancé d'un pas s'en l'en tenir informé. Il s'est véritablement agi d'une co-construction, selon le terme employé par le ministre lui-même.
En synthèse, Sébastien Lecornu m'a tenu en substance ce langage : « Votre travail est formidable, je suis prêt à prendre tout de suite la moitié de vos propositions ; le premier quart restant est pertinent, mais on ne pourra pas le faire tout de suite, car il nécessite des évaluations ; quant au dernier quart, le plus sensible, qui touche notamment aux indemnités, je ne peux rien promettre ». Bien que la moitié évoquée prenne en compte sans doute des avancées déjà récemment actées avec Jacqueline Gourault, notamment sur des sujets non législatifs dont l'administration de notre délégation a fait une recension très précise, j'ai jugé ce discours très positif. Il comporte en effet des avancées substantielles, en particulier sur le statut de l'élu.
En termes de délais, la perspective est l'automne, afin de pouvoir faire des annonces lors des grands congrès. Un projet de loi semble se préciser pour une présentation en juillet en conseil des ministres. Des réunions techniques vont avoir lieu cet après-midi entre le cabinet du ministre, d'une part avec nos collaborateurs et moi-même, puis avec Mathieu Darnaud et la commission des Lois.
Nous avons reçu par ailleurs un courrier du ministre faisant référence à la réunion de l'Ascension et à la conférence de presse du Président de la République du 25 avril dernier, en reprenant les éléments évoqués sous le thème de « l'engagement ». Il y est écrit : « Je serais très intéressé de connaître les propositions complémentaires qui amélioreraient, selon vous, et plus généralement selon les membres de la délégation que vous présidez, la vie pratique des maires dans leur mandat ».
Une copie du courrier de Sébastien Lecornu au président de la délégation est remise aux membres de la délégation.
Après concertation avec le président du Sénat, nous avons proposé et obtenu une audition du ministre par notre délégation, qui a été programmée le 2 juillet à 18 heures. Je ne peux que vous inciter à préparer cette échéance avec un soin tout particulier, car ce sera un moment où nous pourrons collectivement faire part au ministre de nos attentes, de nos craintes et de nos espérances.
Sébastien Lecornu envisage un texte de loi comportant un volet consacré à l'exercice des mandats locaux, en s'inspirant fortement des travaux réalisés par la délégation, et un volet dévolu aux irritants de la loi NOTRe. Sur ce dernier sujet, le gouvernement souhaite notamment revenir sur des dispositions propres au bloc communal, avec la possibilité d'ajuster à la marge le périmètre des intercommunalités dites « XXL », mais aussi en introduisant une distinction entre des compétences de proximité et des compétences plus stratégiques.
Le projet de loi serait aussi l'occasion de clore le sujet eau et assainissement, en enlevant la date butoir de 2026 pour les communautés de communes.
À propos des irritants de la loi NOTRe, je vous rappelle que notre déplacement du 17 juin à Mâcon est ouvert à l'ensemble de la délégation et je vous incite chaleureusement à vous y joindre.