Intervention de Agnès Pannier-Runacher

Réunion du 2 juillet 2019 à 9h30
Questions orales — Problématique de la « fabrication détachée »

Agnès Pannier-Runacher :

Monsieur le sénateur Bourquin, vous m’interrogez sur les conditions de recours à la sous-traitance dans les marchés publics. Aussi, je tenais à préciser plusieurs points.

Les dispositions existantes permettent déjà aux acheteurs de connaître les sous-traitants d’un marché. La loi relative à la sous-traitance, récemment codifiée dans le code de la commande publique, impose en effet aux titulaires de marchés publics de faire accepter par l’acheteur chacun de leurs sous-traitants. Elle leur impose également de faire agréer par l’acheteur les conditions de paiement de chaque contrat de sous-traitance.

Ainsi, lorsqu’une entreprise envisage d’avoir recours à des sous-traitants pour l’exécution d’un marché, elle doit déclarer, soit au moment du dépôt de son offre, soit en cours d’exécution du contrat, la nature des prestations sous-traitées, le nom et l’adresse du sous-traitant, le montant maximal des sommes à lui verser et les conditions de paiement prévues dans le sous-traité. En cas de sous-traitance occulte, l’acheteur a au demeurant l’obligation de mettre en demeure son cocontractant de régulariser la situation de son sous-traitant.

Les dispositions existantes permettent également aux acheteurs de lutter d’ores et déjà contre la sous-traitance pratiquée à des prix anormalement bas. C’est très important pour répondre à votre attente, monsieur le sénateur. Lorsque le montant des prestations sous-traitées est anormalement bas, l’acheteur peut ainsi exiger que le sous-traitant justifie son prix ou les coûts proposés dans le sous-traité. À défaut de justification suffisante, ou s’il est établi que la sous-traitance est anormalement basse parce qu’elle contrevient à la réglementation applicable en matière environnementale et sociale, ou encore au droit du travail, l’acheteur est tenu de refuser le sous-traitant concerné.

Ainsi, le droit de la commande publique en vigueur permet déjà aux acheteurs publics de s’assurer que le recours à la sous-traitance dans les marchés publics n’est pas susceptible de créer des situations de concurrence déloyale, notamment à l’égard des PME françaises, ou de compromettre la bonne exécution du marché.

J’estime qu’il faut à présent que de telles dispositions soient mise en œuvre dans leur plénitude afin de répondre pleinement aux situations que vous signalez, qui sont effectivement anormales.

Quant à l’idée d’imposer au titulaire d’un marché public de conserver les entreprises sous-traitantes présentées dans son offre initiale, si elle paraît intéressante, sa mise en pratique se heurterait à la réalité de l’exécution. On rencontre des changements dans la vie des entreprises. L’exécution d’un contrat peut se heurter à de nombreux aléas, qui imposent que les relations d’affaires entre entreprises bénéficient d’une certaine souplesse. Il serait embêtant de devoir repasser un marché public parce que l’un des sous-traitants initialement proposés ferait défaillance.

Je peux en tout cas vous assurer, monsieur le sénateur, que le Gouvernement est très attentif à la question de la sous-traitance. Ce sujet sera examiné lors des prochains travaux menés par l’Observatoire économique de la commande publique. J’assisterai d’ailleurs personnellement à ces travaux le 4 juillet prochain.

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