Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, comme cela a été rappelé, nous nous retrouvons pour la deuxième fois dans cet hémicycle pour examiner des dispositions législatives qui doivent permettre à la France de faire des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 une grande réussite.
Disons-le d’emblée, madame la ministre : le Sénat adhère au but fixé par ces textes, car nous sommes tous conscients que, derrière l’organisation de cet événement sans précédent, c’est l’image de la France dans le monde qui sera en jeu. Toutefois, pour réussir, nous devrons relever un double défi.
Le premier défi est financier. Chacun a en mémoire les dérives financières qui ont secoué les précédentes éditions – je sais ce dont je parle, car Rio est voisin de la Guyane. Il est donc primordial que la France soit à la hauteur de l’enjeu et maîtrise les coûts annoncés.
Le second défi est plus profond. Il réside dans notre capacité à valoriser l’olympisme par-delà l’événement lui-même, par-delà l’élan d’enthousiasme sportif qu’il suscitera jusqu’à ce que la flamme soit éteinte.
À cet égard, l’olympiade culturelle qui précédera de quatre ans l’ouverture des Jeux est un très bon outil. Pour autant, elle ne doit pas se limiter aux sites olympiques et aux bases arrière, auxquelles je préfère, pour ma part, les termes de « bases avancées ». Elle doit également permettre de faire rayonner les valeurs de l’olympisme dans toute la France, y compris dans tous les outre-mer.
Cela étant dit, nous nous retrouvons aujourd’hui pour l’examen d’un texte pour le moins singulier. En effet, d’abord conçu de manière purement technique, ce projet de loi a rapidement évolué face à la nécessité posée par le Conseil d’État de passer par la loi pour créer l’Agence nationale du sport.
Tout d’abord, il nous est proposé, avec deux premiers articles bienvenus, la ratification de l’ordonnance relative aux voies réservées à la circulation de certains véhicules et à la police de la circulation. Si l’on pouvait légitimement penser que ces mesures concernaient davantage le domaine réglementaire, le recours à la loi était toutefois nécessaire. En effet, la répartition des compétences, s’agissant de la police de la circulation, relève directement du pouvoir normatif.
La perspective des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 est donc une chance à saisir pour faire évoluer le modèle sportif français, régulièrement mis à l’index. Celui-ci doit être en phase avec les nouvelles attentes des pratiquants et des acteurs sportifs représentés dans toute leur diversité et, plus largement, avec les enjeux de notre société.
Aussi l’article 3 vient-il préciser l’Agence nationale du sport sous la forme d’un groupement d’intérêt public, ou GIP, dont l’objectif est précisément de renforcer les capacités sportives du pays sur le fondement d’une gouvernance collégiale et concertée.
Le principe ne pose aucun souci majeur. Au contraire, notre rapporteur a lui-même souligné la pertinence du recours au GIP, en ce qu’il permet une souplesse de gestion et de financement. Pour autant, reconnaissons-le, il est quelque peu frustrant pour les parlementaires que nous sommes d’effleurer ainsi l’Agence nationale du sport sans évoquer davantage son organisation, son mode de gouvernance ou encore sa pérennité.
Le sujet n’est pas anecdotique. Comme l’observe le Conseil d’État, la création de cette nouvelle agence revient pour l’État à se dessaisir des principales dimensions de la politique du sport : le soutien au sport de haut niveau et à la haute performance, d’une part, le développement de l’accès à la pratique sportive, d’autre part. C’est la raison pour laquelle notre rapporteur, que je salue de nouveau pour son travail, a souhaité profiter de ce texte pour ouvrir le champ de notre débat. Je me réjouis personnellement de l’occasion qui nous est donnée de parler de sport, tant les débats techniques autour des JO 2024 peuvent parfois se révéler frustrants.
Dans le détail, notre commission a voulu préciser la gouvernance, l’organisation territoriale et les moyens de cette nouvelle agence.
Les membres de notre groupe soutiennent les modifications opérées en faveur d’un rôle accru des parlementaires dans la politique sportive de la France. Il semble en effet important que certaines commissions puissent donner un avis sur la convention d’objectifs. Ils portent également un regard bienveillant sur le recentrage du rôle du préfet de région comme délégué territorial ainsi que sur la création d’une conférence régionale du sport. En revanche, nous sommes opposés à la décision de confier au responsable de la haute performance de l’Agence l’affectation et l’évaluation des conseillers techniques sportifs dans les fédérations agréées.
Si j’ai personnellement soutenu la position récente de notre commission contre un transfert obligatoire des CTS aux fédérations sportives, c’est précisément parce qu’un temps de concertation me paraît indispensable. Aussi, il me semble tout autant précipité de confier la gestion des CTS à l’Agence nationale du sport, tout juste créée. Je note d’ailleurs que le collectif des 1 300 CTS comme l’association des directeurs techniques nationaux n’y sont eux-mêmes pas favorables.
Madame la ministre, je vous sais pleinement investie pour faire évoluer le modèle sportif français ; un modèle en vertu duquel l’État est partenaire auprès des acteurs responsables et engagés que sont les fédérations, les collectivités et le monde de l’entreprise. Aussi, je ne doute pas que vous saurez nous rassurer pour poser ensemble la première pierre d’un débat plus large ; un grand débat que nous aurons en 2020, je l’espère, autour du projet de loi Sport, texte qui vous est cher et que nous appelons tous de nos vœux. Pour l’heure, notre groupe votera le présent projet de loi.