Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la proposition de loi qui nous est aujourd’hui soumise vise à inscrire dans le code civil le principe selon lequel l’autorité parentale s’exerce sans violences physiques ou psychologiques. Cela permettra à la France de se conformer à ses engagements internationaux et de rejoindre les autres pays européens, dont la quasi-totalité ont affirmé un principe analogue.
L’adoption de ce texte conduira également à faire évoluer la jurisprudence pénale, qui admet pour l’heure un « droit de correction » des parents.
Cette proposition de loi prévoit la formation des assistantes maternelles à la prévention des violences éducatives ordinaires. Elle comporte aussi une demande d’un rapport dressant un état des lieux des violences éducatives et envisageant les moyens de renforcer les politiques publiques de soutien à la parentalité et de formation des professionnels de l’enfance.
Ce texte part d’une bonne intention : lutter contre les violences faites aux enfants. Cette intention, nous la partageons tous au sein de cet hémicycle, bien évidemment. Maltraiter un enfant est inacceptable, le violenter est intolérable. Je ne peux toutefois m’empêcher de m’interroger sur le bien-fondé de cette énième proposition de loi « anti-fessées »…
Au mois de mars dernier, déjà, nous avions examiné et adopté un texte similaire, déposé par notre collègue Laurence Rossignol. Aujourd’hui, nous sommes saisis d’une proposition de loi déposée à l’Assemblée nationale par la députée Maud Petit.
Or, en son état actuel, notre droit offre tous les outils nécessaires : l’article 222-13 du code civil interdit déjà toute forme de violence physique envers les enfants et érige en circonstance aggravante le jeune âge de la victime.
La règle posée ici est de nature exclusivement civile. Elle n’est pas assortie d’une sanction. Sa portée reste donc limitée. Elle vise simplement à affirmer un principe devant guider l’attitude des parents à l’égard de leurs enfants. Ce texte a surtout une portée symbolique et pédagogique.
Dès lors, nous sommes légitimement amenés à nous interroger sur notre mission de législateur, car la loi ne saurait être seulement symbolique : elle doit avoir une portée certaine ! De même, la loi ne saurait être floue ou imprécise. Or ce texte ne définit à aucun moment ce que sont les violences éducatives ordinaires contre lesquelles il s’agit de lutter.
Il s’agit bien d’un texte symbolique, qui ne prévoit pas de sanction pénale et ne désigne pas précisément les faits ou comportements entrant dans son périmètre.
Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, aucune violence contre les enfants, qu’elle soit physique, verbale ou psychologique, n’est acceptable ni excusable. Nous souscrivons tous à ce principe, mais, tout comme celle de notre collègue Laurence Rossignol, cette proposition de loi suscite au sein du groupe Les Indépendants un sentiment très mitigé.
Toutefois, il apparaît inutile de prolonger la navette sur un texte dont la disposition centrale, à l’article 1er, a déjà été adoptée dans les mêmes termes par les deux assemblées.
Cette proposition de loi s’inscrivant dans le prolongement des lois du 5 mars 2007 et du 14 mars 2016 relatives à la protection de l’enfance, son adoption sans délai mettra la France en phase avec la majorité de ses partenaires européens. C’est donc dans un esprit de consensus que le groupe Les Indépendants la votera.