Intervention de Albéric de Montgolfier

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 3 juillet 2019 à 11h00
Projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2018 — Examen du rapport

Photo de Albéric de MontgolfierAlbéric de Montgolfier, rapporteur général :

Aucun décret d'avance n'a été pris en cours d'année, la réserve de précaution hors dépenses de personnel a été limitée à 3 %, et les ouvertures de crédits ont eu lieu dans une loi de finances rectificative limitée aux mesures de fin de gestion. L'amélioration du solde en cours d'exécution est d'abord due à un effet artificiel : un montant élevé de droits de mutation a été comptabilisé sur l'exercice 2018 au lieu de l'exercice 2017.

Ces bonnes surprises concernent les ressources. Du côté des dépenses, l'exécution n'a pas permis de dégager des économies nouvelles. Les crédits consommés ont été pratiquement ceux qui ont été prévus en loi de finances initiale. Les reports vers l'exercice suivant sont comparables aux reports depuis l'exercice précédent. Les fonds de concours ont apporté 900 millions d'euros de plus que prévu, ce qui correspond à peu près aux montants de crédits annulés en loi de finances rectificative ou en loi de règlement.

Au niveau des missions, les écarts à la prévision ne sont pas aussi spectaculaires qu'en 2017, année où trois missions avaient connu un dérapage supérieur à 1 milliard d'euros, mais ils n'en sont pas pour autant négligeables.

La surexécution de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » est liée à un afflux non prévu de fonds de concours, notamment de la part de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf). À l'inverse, la sous-exécution de la mission « Travail et emploi » provient de la baisse du nombre de contrats aidés et de l'extinction du dispositif d'aide à l'embauche, pourtant déjà prévue dans le projet de loi de finances.

Enfin, il faut mettre l'accent sur les ouvertures de crédits complémentaires prévues par l'article 4 du présent projet de loi de règlement, qui concernent la mission « Remboursements et dégrèvements », pour un montant inhabituel de 1,4 milliard d'euros. Le ministre de l'action et des comptes publics nous a indiqué par courrier, au mois de mai, que ce dépassement résultait de contentieux individuels à fort enjeu au titre de l'impôt sur les sociétés, intervenus en fin d'année.

Les explications sont peu satisfaisantes, alors que les dégrèvements et restitutions liés à des contentieux sur l'impôt sur les sociétés s'élèvent au total à 3,2 milliards d'euros, contre une prévision de 0,8 milliard d'euros. Il est indispensable de mieux comprendre les raisons qui semblent entraîner une multiplication de contentieux importants perdus par l'administration en matière d'impôt sur les sociétés, mais aussi d'autres impôts tels que l'impôt sur le revenu. On parle de milliards d'euros.

Je prendrai enfin quelques instants pour aborder la démarche de performance. C'est un bel acquis de la LOLF, mais force est de constater que son potentiel n'est pas toujours pleinement exploité. Mme la ministre de la santé Agnès Buzyn nous parlait encore récemment de cet indicateur sur l'espérance de vie ressentie par les Français. Les indicateurs sont souvent théoriques et peu utiles. La maquette de performance en compte encore trop, même si ce phénomène s'est atténué depuis 2015. En 2018, le budget de l'État ne comptait plus que 765 indicateurs contre 1 025 en 2014. La lisibilité de la maquette s'est aussi améliorée avec la mise en place, depuis 2012, d'indicateurs considérés comme les plus représentatifs de la mission, au nombre de 93 en 2018. Cependant, en 2018, moins de 65 % de ces indicateurs sont exploitables, alors qu'ils sont censés être les plus représentatifs d'une mission.

Certaines des missions du budget général sont complètement sinistrées sous cet angle de la performance : pour les missions « Santé » ou « Travail et Emploi », par exemple, aucun sous-indicateur n'est exploitable. Dès lors, à quoi sert la démarche de performance ?

Pour conclure, ce projet de loi de règlement comporte les articles habituels, qui sont de pure constatation et n'appellent pas d'observation particulière. L'article liminaire concerne l'ensemble des finances publiques : la publication du compte provisoire 2018 complet par l'Insee, le 29 mai dernier, a conduit les députés à amender cet article afin de tenir compte de la révision de la croissance et de diminuer de 0,2 point le solde structurel et en améliorant du même montant le solde conjoncturel ; cela n'a pas d'effet sur le solde effectif, mais réduit l'ajustement structurel de 0,1 point.

Les articles 2 à 6 présentent le résultat budgétaire de l'État, son tableau de financement en 2018, le compte de résultat et le bilan en comptabilité générale, le montant définitif des crédits pour le budget général, les budgets annexes et les comptes spéciaux. Il s'agit d'articles de pure constatation qu'il n'y a pas lieu d'amender.

L'article 7 ratifie deux décrets intervenus en décembre 2018, concernant, d'une part, certains services rendus par le ministère de la défense et, d'autre part, les redevances des services de navigation aérienne. Cette ratification permet à ces décrets d'éviter de devenir caducs.

Enfin l'article 8, introduit par amendement à l'Assemblée nationale, prévoit que le « jaune budgétaire » relatif aux opérateurs de l'État distingue ceux qui sont considérés comme des organismes divers d'administration centrale (ODAC) et ceux qui ne le sont pas. Je ne suis pas sûr que le passage par la loi soit indispensable pour enrichir un document budgétaire, mais toute amélioration relative à la connaissance des opérateurs de l'État est utile.

Ce projet de loi de règlement est, pour l'essentiel, un texte de constatation qui témoigne d'une exécution plutôt conforme à l'autorisation. Il découle toutefois du projet de loi de finances pour 2018, dans le cadre duquel le Sénat avait marqué son désaccord avec plusieurs choix du Gouvernement. Je m'en remettrai donc à la sagesse de la commission sur le texte.

Enfin, je dois vous préciser, en ce qui concerne le périmètre du texte qui nous est soumis, que tout amendement déposé en vue de l'examen du texte en séance, pour être recevable, doit respecter le domaine des lois de règlement. Celui-ci est défini par l'article 37 de la LOLF, auquel les auteurs d'amendement sont invités à se reporter.

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