Merci. Je ne répondrai pas sur les questions de forme. Nous en avons déjà parlé avec madame la présidente. C'est une gymnastique complexe que de faire entrer l'examen des textes prévus dans l'ordre du jour. Je serais le premier satisfait si nous avions plus de temps pour le travail préparatoire des textes. En l'occurrence, les huit articles que j'ai présentés au conseil des ministres sont connus depuis de nombreuses semaines. Les sujets ne sortent pas de nulle part.
Ce projet de loi répond à une attente citoyenne forte, celle d'une action plus forte et plus rapide sur les enjeux écologiques en général et climatiques en particulier. La semaine de canicule que nous venons de vivre est une manifestation concrète du dérèglement climatique. N'oublions pas non plus les événements de l'automne dernier dans l'Aude, qui ont rappelé que le dérèglement climatique tue dans notre pays. Ce ne sont pas simplement des dégâts ou un inconfort. Ce sont aussi des risques. La pollution de l'air est aggravée, la formation de l'ozone étant directement due à la chaleur. Nous devons faire face à l'urgence mais aussi traiter le problème de fond. C'est l'une des ambitions de ce projet de loi, qui s'inscrit dans une action de longue durée. Depuis deux ans, ce Gouvernement a pris des dispositions, à commencer par la loi mettant fin à l'exploration et à l'exploitation des hydrocarbures. C'est un choix fort. Aujourd'hui chacun le prend pour un acquis simple et facile mais je me souviens des débats extrêmement enflammés, il y a quelques années, sur l'exploitation du gaz de schiste que certains jugeaient utile. Nous avons aussi développé des aides aux ménages, inédites, telles que la prime à la conversion des voitures, le changement des chaudières au fuel, ou des mesures de solidarité comme la hausse du montant du chèque énergie ou l'élargissement de son nombre de bénéficiaires.
La présentation de la PPE a été faite à la fin de l'année dernière. Elle constitue la stratégie française pour l'énergie. C'est vrai que l'on pourrait considérer qu'il est étrange de la présenter avant la loi mais c'est l'application des grands équilibres de la loi de 2015. Nous nous inscrivons dans cette logique. Nous avions dit lors des campagnes présidentielle et législative que ce serait dans le cadre de cette loi que nous agirions. D'autres candidats avaient appelé à son abrogation. En revanche, dès le début du mandat, nous avons dit que l'objectif de 2025 serait modifié, par réalisme, pour tenir compte de ce qui n'a pas été fait au cours du quinquennat précédent.
Le premier objectif de ce projet de loi, et non des moindres, est de fixer dans la loi notre objectif d'émissions de gaz à effet de serre, avec la neutralité carbone comme référence. Les polémiques dont celle-ci a fait l'objet ont été totalement inutiles. Certains ont osé prétendre que c'était une baisse d'ambition, alors que cette dernière est accrue par rapport à la loi de 2015 ! Nous définissons la neutralité carbone plus précisément encore que par le passé en établissant qu'il s'agit d'une division des émissions par 6, et non par 4, d'ici 2050, par rapport à l'année de référence de 1990. Par ailleurs, nous passons d'une baisse de 30 % à une baisse de 40 % de la consommation énergétique primaire d'énergies fossiles d'ici 2030.
Nous fixons, outre les objectifs, des trajectoires, dans la stratégie nationale bas carbone (SNBC) et la PPE, qui sont les outils de leur déclinaison concrète.
Nous pérennisons par la loi le Haut Conseil pour le climat, installé à la fin de l'année dernière pour qu'il puisse rendre son premier rapport dès le premier semestre, ce qui a été fait - rapport qui montre que ce Haut Conseil est indépendant. Son rôle est de dire l'état de la science en matière de gaz à effet de serre car il est extrêmement important de s'appuyer sur les données scientifiques.
Le deuxième objectif de ce projet de loi est l'adoption définitive de la PPE, qui repose sur les économies d'énergie, pour réduire notre empreinte carbone et nos importations d'énergies fossiles, mais aussi sur le développement des énergies renouvelables et la diversification de nos modes de production d'énergies - et pas seulement de l'électricité. Pour ce qui la concerne, il s'agit de réduire la dépendance française au nucléaire dans sa production en visant un taux de 50 % d'ici 2035.
Le troisième objectif est de renforcer notre capacité afin de rendre irréversible la fermeture des centrales à charbon d'ici 2022. La voie est étroite mais nous l'empruntons pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Nous prévoyons un accompagnement social et territorial de la fermeture de ces centrales, ce qui n'a jamais été fait par le passé. L'impact de ces centrales sur le climat équivaut à 4 millions de véhicules thermiques - sur un parc automobile de 32 millions.
Le quatrième objectif est de régler des problèmes trop longtemps laissés en suspens. C'est le cas de l'article 4 sur l'autorité environnementale. Il s'agit de mettre fin à une insécurité juridique.
Nos mesures sur les tarifs de l'électricité sont le fruit d'une réflexion. Nous ne repartons pas de zéro quant au mode de calcul des tarifs régulés de l'électricité. Nous nous sommes battus l'an dernier pour défendre le principe d'une régulation des tarifs auprès de l'Union européenne et avons réussi. Nous proposons de modifier un paramètre : celui de l'accès au nucléaire historique. Le volume était plafonné à 100 térawattheures. L'Assemblée nationale a adopté un amendement afin de pouvoir aller jusqu'à 150 térawattheures afin de peser en faveur de la maîtrise des prix de l'électricité. Si cette mesure avait été appliquée, la hausse au 1er juin aurait été de 3 % au lieu de 5,9 %.
Sur les tarifs du gaz, le Parlement a déjà délibéré et voté dans le cadre de la loi Pacte, malheureusement le Conseil constitutionnel a jugé que les dispositions étaient des cavaliers législatifs. Nous les réintroduisons donc.
Nous proposons des dispositifs de lutte contre les fraudes aux certificats d'économies d'énergie (CEE). Beaucoup de parlementaires ont relayé des préoccupations sur cette question.
Enfin les députés ont souhaité enrichir le texte. Évidemment, il en résulte un nombre exponentiel d'articles, mais, en réalité, beaucoup d'articles additionnels sont rédactionnels ou de précision. Certaines dispositions importantes ont été ajoutées à l'Assemblée nationale puisque le pouvoir législatif s'exerce par voie d'amendement. Beaucoup d'entre elles ont été préparées conjointement avec le Gouvernement.
La majorité de l'Assemblée nationale avait une volonté forte de légiférer sur la rénovation énergétique des logements et les passoires thermiques, partagée par des députés de plusieurs groupes d'opposition. Le dispositif s'articule autour d'une première phase d'information et d'incitation d'ici 2023, puis une phase d'obligation de travaux à partir de 2023 puis, à partir de 2028, une phase plus contraignante quant à l'application de cette obligation. Les logements classés F et G sont sept millions en France, pour moitié en locatif.
On trouve par ailleurs des dispositions sur l'information lors de la location ou de la vente de logement, sur l'obligation d'informer sur la facture énergétique et pas simplement la consommation moyenne indiquée dans le diagnostic de performance énergétique, sur l'obligation de réaliser un audit énergétique afin d'évaluer le montant des travaux de rénovation, ainsi que sur l'intégration au décret dit « décence » de la notion de passoire énergétique, pour des logements dépassant largement les classes F et G, soit environ 200 000 biens assimilables à des logements insalubres ou indignes. Les dispositions plus contraignantes pourront être intégrées dans une loi de programmation de l'énergie qui serait votée tous les cinq ans.
Nous avons aussi introduit un article qui crée les conditions d'une vraie filière de l'hydrogène dans notre pays, grâce à des mécanismes de soutien.
Je salue votre volonté d'aboutir à un bon compromis en commission mixte paritaire. Cette volonté est partagée par le Gouvernement dans la mesure où le projet de loi ne serait pas dénaturé mais enrichi. Quant au calendrier, entre le 17 ou le 18 juillet et le 25 juillet, il y a plus d'une journée, me semble-t-il.