Intervention de Victorin Lurel

Délégation sénatoriale aux outre-mer — Réunion du 22 janvier 2019 : 1ère réunion
Représentation et visibilité des outre-mer dans l'audiovisuel public — Audition de Mme Delphine Ernotte-cunci présidente de france télévisions

Photo de Victorin LurelVictorin Lurel :

Je commencerai par vous dire que j'ai peut-être un autre prisme que la délégation, même si je partage et appuie ce qui est en cours, à savoir se placer déjà dans quelque chose de l'ordre du fait accompli, à savoir la disparition prochaine de France Ô. J'avoue avoir du mal à l'accepter.

Je ne crois pas du tout à l'orientation qui a été prise ni à son efficacité, je l'ai dit et le redis ici. Et ce d'autant plus qu'un débat national est ouvert où le Président de la République sollicite les propositions et une vision nouvelle : j'espère que mes compatriotes diront qu'ils veulent conserver France Ô, même avec un petit budget de 25 millions d'euros pour 0,8 % d'audience, ce qui n'est pas moins, au demeurant, que France info.

Je me situe un peu en amont du fait accompli que nous sommes collectivement en train de ratifier et me demande comment, techniquement, améliorer l'offre télévisuelle qui sera faite aux outre-mer. J'estime qu'elle ne sera pas bonne, quel que soit le talent et le dévouement que vous y mettrez : le compte n'y sera pas, je le dis clairement.

Par exemple, sur la TNT, ce décrochage dont nous savons qu'en Europe les expériences n'ont pas été concluantes, la BBC le montre. Nous ne sommes pas correctement reliés au haut débit outre-mer. Sauf déjà à accepter le fait accompli que France Ô ne sera plus captée outre-mer. Le haut débit n'arrivera qu'en 2022 au mieux. On sait que la plupart des plans de financement de l'installation du haut débit et de la fibre optique n'est pas bouclée outre-mer, au point que l'on vient de donner 50 millions à la Martinique, autant peut-être pour la Guyane et l'arrière-pays guyanais : cela ne va pas arriver tout de suite.

France Télévisions n'a pas éprouvé le besoin de faire en sorte que Public Sénat soit captée outre-mer dans le bouquet gratuit. On nous a dit qu'il fallait 1 à 2 millions d'euros pour financer cela : personne ne l'a pris en compte au nom de la visibilité.

Ces situations vont persister. Aussi, si je souscris à l'exercice qui est fait ici, j'en connais les limites.

Enfin, on vous demande de faire des efforts, d'abord environ 50 millions d'euros d'économies, puis 400 millions d'euros dont 160 en baisses de dotations publiques et, dans le même temps, on vous demande d'investir 420 millions d'euros, de ne pas baisser la garde. Vous n'y arriverez pas. Pour le faire, vous allez supprimer 2 000 emplois dont 1 000 nets.

Bien sûr, Malakoff appartient à France Télévisions. Lorsque je vous avais entendue avec notre collègue Catherine Troendlé, vous nous aviez dit que la suppression de Malakoff n'était pas dans votre feuille de route. Madame la présidente, pouvez-me garantir que le siège de Malakoff ne sera pas vendu ? J'entends des choses contraires. Pouvez-vous m'assurer que pour financer l'installation de la cité du cinéma dans la plaine de Saint-Denis la vente de Malakoff ne sera pas un apport ? C'est peut-être ici une rumeur dont je me fais le porte-parole mais j'ai entendu cela de vos syndicats. Pouvez-vous nous garantir ici, devant la délégation, qu'au-delà des redéploiements internes le siège de Malakoff, cette visibilité physique, sera conservé ?

La visibilité réside aussi dans la présence de journalistes ultramarins à France Télévisions. Dans les séries, les documentaires, les émissions aujourd'hui, je ne vois aucun ultramarin en prime time : en Angleterre cela est différent. On a du mal dans le traitement de l'information à reconnaître les nôtres, qui ont pourtant fait de bonnes études. Peut-on avoir cette garantie de votre part dans le cadre de cette réforme ?

Peut-on dire ici que la délégation, à la faveur du débat national, demande que France Ô soit maintenue - certes revue et corrigée, avec une transformation vers un média global avec les chaînes La 1ère ? Je ne comprends pas le redéploiement proposé qui est une usine à gaz. On va nous vanter le numérique comme mode idéal de la diffusion et, d'ici quelques temps, on nous fera des rapports sur des progressions peu crédibles relatives au nombre de clics. Je suis très sceptique sur la pertinence de l'exercice qui nous est vendu là.

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