Intervention de Vincent Eblé

Réunion du 11 juillet 2019 à 14h30
Orientation des finances publiques règlement du budget et approbation des comptes de l'année 2018 — Suite du débat et rejet en procédure accélérée d'un projet de loi

Photo de Vincent EbléVincent Eblé :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, intervenant après une longue série d’orateurs dans cette discussion générale, je m’efforcerai d’allier concision et esprit de synthèse.

Je me réjouis que nous examinions cet après-midi, tout à la fois, l’exécution des comptes de 2018 et les perspectives de nos finances publiques, selon le schéma vertueux qu’a voulu mettre en place le législateur organique, même s’il convient aussi de souligner les limites inhérentes à cet exercice annuel.

Je reviendrai peu sur l’exécution de l’année passée, parce que le rapporteur général et les rapporteurs spéciaux ont, chacun dans leur domaine, procédé à une analyse très approfondie de cette exécution budgétaire, notamment de sa conformité avec l’autorisation donnée par le Parlement et avec les engagements du Gouvernement, qui figuraient également dans la loi de programmation des finances publiques. Leurs analyses sont détaillées dans deux tomes très documentés consacrés à l’exécution des comptes.

Notre commission des finances a par ailleurs choisi, en plus des nombreux contrôles réalisés par les rapporteurs spéciaux, d’entendre plusieurs ministres sur les crédits de leur département ministériel, afin d’obtenir les éclairages nécessaires en vue de l’appréciation que nous pourrons porter, cet automne, sur le projet de loi de finances pour 2020.

Globalement, l’exercice 2018 se caractérise par une meilleure sincérité budgétaire, même si des bémols peuvent être apportés, par exemple sur la manière dont on a utilisé ce que l’on nomme les « crédits non répartis ».

Mais cette sincérité budgétaire ne signifie pas que nous ne constatons pas déjà certains écarts significatifs avec la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022. Aussi je souhaiterais, monsieur le ministre, que le Gouvernement puisse nous dire si, oui ou non, il entend en tirer les conséquences dans une nouvelle loi de programmation des finances publiques, et à quelle échéance.

Il nous appartient aussi, en qualité de parlementaires, de distinguer l’exercice purement comptable, qui peut être réussi, de l’évaluation de l’action publique. La sincérité mise en avant par le Gouvernement ne veut pas dire que le budget de 2018 fut un bon budget, et nombre d’entre nous s’étaient d’ailleurs opposés aux choix qu’il portait. Je pense en particulier aux coupes concernant le logement social ou les contrats aidés, et au volet fiscal avec la transformation de l’impôt de solidarité sur la fortune, l’ISF, en impôt sur la fortune immobilière, l’IFI, ou encore la création d’une flat tax sur les revenus du capital.

Il faut, nous dit-on, revaloriser l’examen de la loi de règlement qui, pourtant, encadrée par l’article 37 de la loi organique relative aux lois de finances, la LOLF, ne laisse aucune place à l’initiative parlementaire. L’absence totale du moindre amendement de séance aujourd’hui le démontre à l’évidence.

En effet, son objet est simplement d’arrêter « le montant définitif des recettes et des dépenses du budget auquel elle se rapporte, ainsi que le résultat budgétaire qui en découle ». Elle concerne par ailleurs le seul budget de l’État, qui représente, je le rappelle, moins de 30 % de la dépense publique. Au minimum, une extension à l’exécution des comptes sociaux et des comptes locaux serait bienvenue, et les initiatives prises en ce domaine par la Cour des comptes vont dans le bon sens.

La période de juillet devrait surtout être propice à une réflexion sur ce qui doit être fait en matière budgétaire et fiscale, compte tenu de la situation de nos comptes publics. Mais, comme chaque année, nous resterons sur notre faim, le Gouvernement ne donnant rien à voir réellement de ses intentions. Comme chaque année, les mesures fiscales seront dévoilées à l’automne, avec un temps très court pour que les acteurs, publics comme privés, puissent les analyser et s’y adapter. Nous l’avons vu l’an passé avec la mesure sur le gazole non routier par exemple.

La ministre des transports vient certes d’annoncer la création d’une nouvelle taxe sur le transport aérien, mais l’information tombe au compte-gouttes et ne permet pas de disposer d’une vision d’ensemble. Je plaide, comme M. le rapporteur général, pour avancer le calendrier de la loi fiscale à l’été ; il serait possible ensuite de tirer les enseignements pour calibrer l’autorisation de dépense publique à l’automne. La vertu en matière de maîtrise budgétaire veut que l’on fasse passer les recettes avant les dépenses !

Quoi qu’il en soit, les défis sont importants. Le Gouvernement a engagé, sous l’impulsion du Président de la République, des baisses d’impôts d’un montant très significatif, répondant en partie aux demandes légitimes sur le pouvoir d’achat. Toute la difficulté est de savoir comment ces mesures, qui s’ajoutent à celles – déjà coûteuses – sur la taxe d’habitation, seront financées, dans un contexte où notre dette publique frôle les 100 % du PIB.

Des efforts importants ont été engagés au cours des dernières années pour sortir la France de la procédure pour déficit excessif et, désormais, elle bénéficie d’un contexte économique et financier beaucoup plus favorable, avec des taux d’intérêt bas, voire négatifs. Cette situation confortable pour les décideurs publics ne doit pas anesthésier notre vigilance et la transformation de l’action publique reste nécessaire.

Toutefois, cette transformation ne doit pas se faire au détriment des plus précaires, des plus fragiles, ni au service de quelques-uns seulement. Nous serons donc particulièrement attentifs aux dispositions proposées à l’automne, de même qu’à l’évaluation des mesures tant budgétaires que fiscales prises jusqu’à présent, notamment concernant l’imposition du patrimoine, sur laquelle, au sein de la commission des finances – M. le rapporteur général et moi-même au premier titre –, nous menons des travaux poussés d’évaluation.

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