Intervention de Olivier Touvenin

Mission d'information Sous-utilisation des fonds européens — Réunion du 26 juin 2019 à 15h05
Audition de Mm. Olivier Touvenin chef du service comptable de l'état à la direction générale des finances publiques du ministère de l'action et des comptes publics et charles simonnet chef du bureau des dépenses de l'état rémunérations et recettes non fiscales

Olivier Touvenin, chef du service comptable de l'État à la direction générale des finances publiques du ministère de l'action et des comptes publics :

Le service comptable de l'État s'occupe de la comptabilité de l'État, de la production des comptes et du compte général de l'État, des opérations de certification avec la Cour des comptes et de l'ensemble du back office financier de l'État sur la dépense et la rémunération.

Il lui a également été confié le pilotage des autorités de certification étatiques dans le cadre de la gestion des fonds européens.

Historiquement, la mission de certification avait été confiée à la direction générale de la comptabilité publique, lorsque les autorités de gestion relevaient presque toutes de l'État. Pour la programmation en cours, qui s'achèvera en 2021, il a été décidé, avant même la fusion des régions, de décentraliser assez largement à celles-ci la gestion des fonds européens, même si certains, comme le Fonds social européen (FSE), restent gérés par l'État.

Il faut toutefois distinguer plusieurs niveaux d'intervention : les autorités de gestion sélectionnent et financent les projets ; l'autorité de certification contrôle les dépenses en fonction des critères définis dans la réglementation européenne ; cette autorité est à son tour placée sous la surveillance de la Commission interministérielle de coordination des contrôles (CICC) ; enfin, la Commission européenne peut elle-même procéder à des audits.

Malgré la décentralisation de la gestion, la certification est restée de la compétence de la DGFIP pour la programmation en cours. Deux autres schémas auraient pu être envisagés : l'internalisation de la fonction de certification, retenue par la région Alsace - elle nécessite toutefois une stricte séparation entre les fonctions de gestion et de contrôle -, ou au contraire l'externalisation de celle-ci à des cabinets d'audit ou d'expertise comptable. Les régions ont toutefois souhaité que la DGFIP reste dans le circuit pour la programmation en cours afin d'apporter soutien et conseils aux nouvelles autorités de gestion.

Au début de la programmation, un document de cadrage, contenant des engagements réciproques, a été signé avec Régions de France. Des contacts et des réunions ont par ailleurs lieu régulièrement entre autorités de certification et autorités de gestion ; ils permettent d'assurer un pilotage rapproché et d'évoquer certaines difficultés.

Les points de contrôle, arrêtés chaque année par les autorités de certification en s'appuyant sur la réglementation européenne, portent par exemple sur l'éligibilité des dépenses, le respect d'un certain nombre de règles juridiques ou encore le principe du paiement après service fait.

Lorsque nous constatons que certaines dépenses ne sont pas éligibles aux fonds européens, nous jouons également un rôle de conseil auprès des autorités de gestion, en leur expliquant pourquoi le dossier ne peut pas être présenté au paiement.

Plusieurs difficultés sont apparues dans l'application de ce nouveau schéma.

La première tient à la modernisation des systèmes d'information. Voilà quelques années, le Commissariat général à l'égalité des territoires (CGET), a engagé un projet de refonte des systèmes informatiques de gestion et de certification des fonds européens. Le développement du projet a pris du retard, puis chaque région a voulu développer son propre outil de gestion. L'imperfection des applications informatiques et l'absence de mutualisation ont entraîné des difficultés, tant pour les activités de gestion que pour celles de certification. Aujourd'hui, tout n'est pas parfait, mais les problèmes sont globalement résolus.

La seconde tient à la nouveauté de la fonction d'autorité de gestion pour les régions. Celles-ci ont dû comprendre qu'il était nécessaire de respecter la réglementation européenne pour pouvoir toucher les fonds européens. Et nos services ont dû s'habituer à de nouveaux interlocuteurs et à de nouvelles questions. Là encore, les difficultés sont aujourd'hui résiduelles. Régions de France juge notre prestation satisfaisante, mais formule le voeu que nos effectifs soient maintenus au niveau qui était le sien en début de programmation pour ne pas allonger les délais de paiement.

On reproche en effet souvent à la DGFIP d'être trop tatillonne dans ses contrôles. En réalité, nous sommes nous-mêmes surveillés, et donc tenus à une certaine qualité de nos prestations de contrôle. Si nous faisons preuve de laxisme, nous pouvons être sanctionnés par la CICC, le risque étant alors une reprise des fonds. Par ailleurs, la Commission européenne procède elle-même régulièrement à des audits sur le taux d'anomalies rencontrées dans la gestion des fonds européens. Au-delà d'un certain taux, elle interrompt les paiements.

On se demande ensuite si la réglementation européenne n'est pas un peu lourde, si elle ne multiplie pas à l'excès les contrôles. C'est probable, en effet. Entre nos contrôles, ceux de la CICC et ceux de la Commission, on est plutôt dans le « sur-contrôle » que dans le « sous-contrôle ».

Le système est toutefois globalement satisfaisant, car, à ma connaissance, nous n'avons pas eu, à ce jour, de fraude importante aux fonds européens en France.

La Commission a toutefois tenu compte de certaines remarques. Pour la prochaine programmation, elle a ainsi décidé de supprimer la fonction de certification des fonds européens, tout en maintenant la fonction comptable, innovation de l'actuelle programmation, également exercée par nos services. Il ne s'agit pas de comptabilité au sens où on l'entend généralement, mais plutôt d'un suivi de consommation budgétaire. Je l'avoue, l'utilité de cette fonction comptable ne me saute pas aux yeux. Il me semble qu'on aurait pu supprimer la certification et la fonction comptable pour se recentrer sur les contrôles de processus, véritable enjeu de la gestion des fonds européens.

Les problèmes de sous-consommation des fonds européens ne trouvent pas leur origine dans nos contrôles, les dossiers étant traités au fur et à mesure. Nos services pointent plutôt des difficultés dans la sélection des projets. Certaines régions ont fait le choix de flécher des crédits régionaux plutôt que des fonds européens sur certains projets, ce qui peut aussi expliquer la sous-consommation de ces derniers.

Je précise, enfin, que nos opérations de certification dans le cadre de la programmation actuelle se poursuivront jusqu'en 2023 ou 2024, puis la mission de certification, qui mobilise aujourd'hui environ 80 équivalents temps plein (ETP), disparaîtra.

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