Intervention de Arnaud Montebourg

Commission des affaires économiques — Réunion du 11 juillet 2019 à 10h30
Situation de general electric et outils de l'état pour mieux anticiper les conséquences économiques des cessions d'entreprises françaises — Audition de M. Arnaud Montebourg ancien ministre entrepreneur

Arnaud Montebourg :

Sur le gaz, monsieur Martial Bourquin, il était prévu dans l'accord qu'entre 2015 et 2018, pendant trois ans, on ne touche pas à l'état des implantations et des emplois en France dans ce domaine. Cela concernait seulement le gaz, donc General Electric, mais pas Alstom.

Les syndicats s'alarmaient en effet, et cet accord a permis de bloquer la situation pendant trois ans. Il a été respecté, mais nous sommes aujourd'hui en 2019 et il a expiré. Peut-être aurions-nous dû négocier cinq ans ? General Electric aurait seulement attendu deux ans de plus. En tout état de cause, on ne peut pas geler indéfiniment une entreprise.

Il faut plutôt chercher à contrôler les outils de production et donc à reprendre le contrôle dans certains secteurs. Je vous soumets ainsi une proposition : General Electric est aujourd'hui en déconfiture et nous pourrions racheter des morceaux dont cette entreprise s'était emparée en acquérant la branche énergie d'Alstom. Pourquoi, par exemple, ne pas racheter la branche nucléaire, qui est une affaire de souveraineté ; qui est rentable, avec 1 milliard d'euros de chiffre d'affaires et un excellent résultat, pour l'industrie lourde, de 10 %. De plus, cette branche est invendable à un autre que la France, en raison du veto que j'avais négocié. Elle est en charge des îlots conventionnels des centrales nucléaires, de toute la maintenance et de tout le service sur un parc important aux États-Unis et en Russie, incluant les centrales Rosatom, ainsi que des cinquante-huit centrales françaises d'EDF. General Electric est disposé à vendre et des investisseurs privés pourraient se rallier à une impulsion minoritaire d'EDF et de Bpifrance pour mener à bien cette reprise.

Madame la présidente, si vous avez quelque influence auprès du Gouvernement, faites pression à ce sujet sur le Premier ministre et sur le ministre de l'Économie et des Finances. Le cas échéant, je suis prêt à apporter mon concours, à titre tout à fait bénévole, à ce tour de table dans lequel les capitaux publics seront présents, mais minoritaires, et qui nous permettra de reprendre le contrôle du nucléaire français, de nos bâtiments militaires et de notre parc. J'ai déjà évoqué cette idée devant les syndicats belfortains, il me semble que des investisseurs seraient intéressés pour faire revenir dans notre giron la technologie française.

L'État peut-il faire juger le plan de sauvegarde de l'emploi non conforme ? Oui, puisqu'il en est partie. Il a, en outre, les moyens de négocier avec General Electric. Les turbines à gaz sont en bas de cycle, mais elles vont remonter, il importe donc de négocier pour préserver l'outil industriel à Belfort.

S'agissant de la responsabilité du Parlement, il exerce un contrôle a posteriori, qui est nécessaire, mais il faudrait imaginer des missions permanentes d'enquête et de contrôle sur ce sujet ; vous en avez le pouvoir. Jeune parlementaire, j'ai participé, il y a vingt ans, à la mission parlementaire la plus longue de la Ve République sur les paradis fiscaux. Elle avait duré deux ans et demi, durant lesquels nous avions mené la vie dure à tous les paradis fiscaux d'Europe. M. Peillon en était le président, j'en étais le méchant rapporteur et nous avions obtenu des avancées, à Monaco, au Luxembourg, à Jersey et Guernesey, etc. Nous étions des pionniers ! Depuis lors, des progrès importants ont été réalisés, avec les échanges automatiques, par exemple.

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