Intervention de Agnès Canayer

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 10 juillet 2019 à 9h30
Justice prud'homale — Examen du rapport d'information

Photo de Agnès CanayerAgnès Canayer, rapporteur :

Nous ne nous sommes pas rendues en Alsace, puisque le système y est dorénavant le même que dans le reste de la France, à savoir une justice prud'homale paritaire. En revanche, nous nous sommes rendues en Belgique, à Mons plus précisément. La Belgique est passée d'un système paritaire, avec des conseillers issus exclusivement du monde du travail, à un système écheviné, en première et en deuxième instance, à l'instar de tous les autres pays européens. La France est le seul pays qui a encore recours à une justice spécialisée sans la participation d'un magistrat professionnel en première instance.

Nous aurions aimé nous rendre à Mayotte, où existe un système particulier aussi...

En Belgique, l'entente entre les juges professionnels et les juges issus du monde du travail est réelle : chacun a sa place et travaille en collaboration étroite dans l'intérêt du justiciable. C'est la raison pour laquelle nous proposons une expérimentation pour tester plus de rapprochements en première ou en deuxième instance entre les juges professionnels et les juges issus du monde du travail.

Sur la question des motifs de contestation des jugements, le problème, c'est l'acceptabilité de la décision rendue par les conseils des prud'hommes, sa motivation et le raisonnement juridique qui en est à l'origine. C'est tout le paradoxe de la justice prud'homale ! On lui demande à la fois d'être ancrée dans le monde de l'entreprise, donc de rendre des décisions qui correspondent aux pratiques entrepreneuriales, et d'acquérir un raisonnement juridique. Or la formation actuelle est insuffisante pour permettre aux conseillers prud'homaux de tous produire une décision argumentée en droit. C'est l'un des principaux facteurs d'infirmation des décisions rendues en appel : si 66 % des décisions rendues en première instance font l'objet d'un appel, seuls 17 % d'entre elles sont entièrement confirmées. L'insatisfaction porte aussi sur le montant des indemnités prononcées.

Ce constat s'explique aussi par le fait que les situations qui arrivent devant les conseils de prud'hommes sont souvent très conflictuelles et n'ont pu se résoudre par le biais d'une rupture conventionnelle.

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