Madame la ministre, une fois de plus, c’est vous qui allez me répondre, dans un domaine qui ne relève pas de votre compétence ! La dernière fois, ma question s’adressait en effet au ministre de l’agriculture. J’aurais évidemment préféré que M. le ministre de l’éducation nationale soit présent aujourd’hui, alors que je m’interroge sur la suppression des crédits dans les zones d’éducation prioritaires, les ZEP.
En novembre 2005, le président de l’UMP, qui n’était autre que Nicolas Sarkozy, devenu depuis Président de la République, proposait de « déposer le bilan des ZEP » en affirmant que « cette politique a échoué ».
Les zones d’éducation prioritaires ont été créées en 1982 afin d’accorder des moyens éducatifs renforcés aux secteurs défavorisés. L’objectif était bien de « donner plus » à ceux qui ont moins.
Ce dispositif de traitement préférentiel concernait 362 zones prioritaires en 1982 et 876 en 1997. En 2006, on est passé à 249 réseaux ambition réussite, soit une réduction de près de deux tiers, supposée limiter le saupoudrage des moyens.
Le responsable national du syndicat enseignant FSU déclarait alors : « Les moyens supplémentaires qui devraient être là pour les zones d’éducation prioritaires, les ZEP, on ne les voit pas. Il y a un manque d’encadrement éducatif, on a supprimé des postes ces dernières années ».
Cette situation s’est largement dégradée, 62 000 emplois d’enseignants ayant été supprimés depuis 2003. Au moment où l’on débat de la baisse des dépenses publiques, un rapport du ministère de l’éducation nationale vient d’ailleurs de confirmer que la part du coût de l’éducation dans le produit intérieur brut continue de baisser, celle-ci étant passée de 7, 6 % en 1995 à seulement 6, 6 % en 2008.
Aujourd’hui, les populations des quartiers des zones urbaines sensibles, les ZUS, au sein desquelles on trouve un nombre important de ZEP, sont davantage touchées par l’accroissement du chômage, dont on connaît les conséquences sur la vie des familles.
Alors que les besoins sont encore plus importants, c’est le moment que choisit l’inspecteur d’académie d’Indre-et-Loire pour supprimer les crédits ZEP aux écoles de notre département pour l’année 2010. Vous admettrez, madame la ministre, que cette suppression brutale est à la fois incompréhensible et inacceptable.
En réponse à mon questionnement, l’inspecteur d’académie a avancé l’argument de factures envoyées en retard. J’ai vérifié auprès des principaux responsables et je puis vous assurer que toutes les factures relatives aux ZEP ont été envoyées à temps.
L’inspecteur d’académie ajoute que c’est aussi à cause d’une diminution des crédits affectés au programme 140 « Enseignement scolaire public du premier degré » qu’il a été amené à « réétudier les priorités ». Sur ce point-là, je veux bien le croire. Mais je ne puis accepter qu’une fois de plus cette réduction des moyens se fasse au détriment des plus fragiles. Pourquoi s’en prendre ainsi aux classes des écoles des quartiers les plus défavorisés ?
Les enseignants s’accordent à dire que ces crédits sont bénéfiques pour les élèves. Un professeur de ma commune déclare ainsi : « Depuis onze ans, tout le projet pédagogique de l’école passe par le théâtre. Les crédits ZEP nous permettaient de payer les dix heures d’intervention d’un comédien en classe. » Un responsable syndical ajoute : « C’est un moyen d’amener des projets culturels et sportifs dans les quartiers, et ça disparaît ! » Avec cette décision, la continuité d’actions va être compromise, les inégalités scolaires vont être aggravées.
Ces décisions locales de restrictions budgétaires s’inscrivent dans la droite ligne des orientations qui ont été prises au niveau national. Elles en sont la conséquence, comme l’inspecteur d’académie l’indique lui-même dans sa lettre.
Pour la prochaine période, vous voulez aller au-delà, avec l’augmentation du nombre d’élèves par classe, le recours à des non-titulaires pour les remplacements et la suppression partielle ou totale des postes d’enseignants pour les réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté, les RASED, spécialisés contre l’échec scolaire. La punition est la même pour le collège, punition à laquelle vous ajoutez la fermeture ou le regroupement des petits établissements.
Et nous venons très récemment d’apprendre que vous auriez l’intention de mettre fin aux ZEP pour les remplacer par le projet CLAIR – collèges, lycées pour l’ambition, l’innovation et la réussite –, qui n’est autre que le démantèlement du service public de l’éducation. Ce programme « a vocation à se substituer aux dispositifs d’éducation prioritaires s’il fait la preuve de son efficacité », déclarait M. le ministre de l’éducation nationale le 26 juin dernier à Marseille. Serait-ce la confirmation de ce que disait M. Sarkozy en 2005 ?
Madame la ministre, que compte faire le Gouvernement pour ne pas aggraver davantage encore la situation des élèves les plus en difficultés dans les zones d’éducation prioritaires de notre département d’Indre-et-Loire ?
Il faut d’urgence rétablir les moyens financiers pour ces établissements, conformément aux souhaits des enseignants sur le terrain.