Intervention de Michel Amiel

Réunion du 16 juillet 2019 à 14h30
Organisation et transformation du système de santé — Suite de la discussion et adoption définitive des conclusions modifiées d'une commission mixte paritaire

Photo de Michel AmielMichel Amiel :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous examinons ce texte intitulé « organisation et transformation du système de santé », le troisième en dix ans après la loi HPST de 2009 et la loi Touraine de 2016.

Traduction de la stratégie Ma Santé 2022, annoncée par le Président de la République le 18 septembre dernier, ce texte a pour ambition de transformer en profondeur notre système de santé pour assurer à chaque Français la qualité et la sécurité des soins.

Réformer les études de médecine, notamment en supprimant le numerus clausus, réarticuler médecine de ville et hôpital, développer l’offre numérique, améliorer l’offre hospitalière de proximité, promouvoir les communautés professionnelles territoriales de santé : tels ont été les points centraux de nos discussions.

Si les deux assemblées n’avaient pas la même vision de ces enjeux, je me félicite de ce que les échanges en commission mixte paritaire aient abouti à un compromis, un texte équilibré qui reprend en particulier les avancées du Sénat, représentant des territoires, sur la lutte contre les déserts médicaux.

Sur la réforme des études de santé, si je réitère ma crainte sur la suppression du numerus clausus, qui n’aura d’effets – l’arrivée sur nos territoires des professionnels formés – que dans dix à quinze ans, j’applaudis l’ambition d’un véritable changement de culture qui permettra à des étudiants non issus de la première année commune aux études de santé, la Paces, d’accéder aux études médicales.

Restent, comme je le rappelais lors des explications de vote sur l’ensemble du texte en première lecture, des inconnues : la capacité des universités et des hôpitaux d’accueillir les étudiants, l’orientation des étudiants via Parcoursup, et les critères de définition des besoins en professions médicales des territoires, discutés entre universités et ARS. Sur ces points, notre groupe restera attentif. Il le sera aussi sur les modalités modifiant l’accès au troisième cycle, et donc au choix de spécialité, avec le vote de la suppression de l’examen classant national actuel pour le remplacer par un dispositif qui, s’il visera à s’assurer du niveau de connaissances des étudiants, prendra également en compte les compétences cliniques acquises, les qualités humaines développées et l’ensemble du parcours des candidats.

Mais si une réforme des études médicales a d’abord pour ambition de mieux former les étudiants, elle vise aussi à offrir aux territoires un meilleur accès aux soins. Comme vous l’avez dit vous-même, madame la ministre, cela « ne réglera pas le problème de la démographie médicale ».

Aussi, je salue l’accord trouvé concernant la professionnalisation de la dernière année de l’internat de médecine. Proposé par les sénateurs soucieux d’assurer une prise en charge dans l’ensemble des territoires qu’ils défendent et représentent, cela prendra la forme d’un stage devant être effectué en ambulatoire, en priorité dans les zones sous-dotées, pendant six mois – contre un an dans la version initiale du dispositif sénatorial –, le tout encadré par un maître de stage.

À cet effet, les conditions pour devenir maître de stage ont été assouplies.

Je salue tout autant la volonté de développer les CPTS, outil d’organisation donné aux professionnels du terrain, qui sont les mieux à même d’évaluer les besoins et d’élaborer les solutions de circuits de prise en charge de la population.

Mes chers collègues, la notion et la prise en compte de la responsabilité populationnelle des professionnels de santé doivent être encouragées, car le médecin, l’infirmier mais aussi les aides-soignants et les kinésithérapeutes sont bel et bien des acteurs de santé publique.

Je regrette toutefois que les avancées prévues par le Sénat n’aient pas été suivies en ce sens, notamment l’ambition de réaffirmer la notion d’infirmier référent, outil majeur dans le cadre d’une coordination des soins promue par les CPTS.

Toujours dans l’objectif de simplifier la prise en charge coordonnée des personnes, le numérique – et les outils qu’il offre, notamment pour le suivi des patients – constitue un virage essentiel qu’il convient d’encourager, mais surtout de faciliter. Aussi, l’automaticité de l’ouverture du dossier médical partagé, ou d’un espace numérique de santé, l’ENS, permettra de déployer cet outil pour tous. Les acteurs de la santé pourront ainsi mieux prendre en charge, et de manière plus coordonnée, leurs patients.

À ces fins, nos assemblées ont pu s’accorder sur la nécessité d’une offre de proximité de qualité.

Les hôpitaux de proximité sont un des éléments forts du maillage territorial et de la vision d’un exercice coordonné de la médecine. La gradation des soins doit être vue non pas comme une médecine à deux vitesses, mais bien pour ce qu’elle est : une réorganisation d’un système à bout de souffle, comme l’ont montré les difficultés des services d’urgences qui s’amplifient, et une meilleure coordination ville-hôpital.

Enfin, notre groupe se félicite des enrichissements du texte, qui bénéficieront aux territoires d’outre-mer, particulièrement en ce qui concerne l’autorisation d’exercer des praticiens à diplôme hors Union européenne.

Le groupe s’est par ailleurs montré vigilant sur la question de Mayotte, où l’urgence sanitaire est on ne peut plus alarmante. Il le restera quant au financement de la future agence régionale de santé.

Mes chers collègues, si cette nouvelle loi de structuration de l’offre de santé dans notre pays a pour objectif l’amélioration des conditions d’exercice de la médecine et d’accès aux soins, il faudra aussi penser dès la rentrée, avec le projet de loi de financement de la sécurité sociale, aux mécanismes de financement d’un tel projet qui devra s’inscrire dans la durée.

Madame la ministre, vous avez avec beaucoup de sagesse montré la voie. Puisque M. Milon a cité Pascal et Mme Cohen Descartes, j’évoquerai quant à moi Confucius : quand le sage montre la lune du doigt, l’insensé regarde le doigt.

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