Intervention de Emmanuelle Wargon

Réunion du 16 juillet 2019 à 14h30
Création de l'office français de la biodiversité — Adoption définitive des conclusions de commissions mixtes paritaires sur un projet de loi et un projet de loi organique

Emmanuelle Wargon :

Monsieur le président, monsieur le vice-président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais dire mon plaisir et ma satisfaction d’être de nouveau devant le Parlement pour le vote solennel de ce projet de loi, six mois après le début de son examen par l’Assemblée nationale et trois mois après les débats au Sénat.

Je veux remercier les sénateurs et les députés qui, comme l’a dit M. le rapporteur, se sont investis sur ce texte, ont été ouverts au dialogue et ont permis d’aboutir à une commission mixte paritaire conclusive en traitant les différents sujets portés par ce projet de loi, dans le cadre d’un travail extrêmement constructif.

Vous avez évoqué, monsieur le rapporteur, une question importante qui fut débattue lors de cette rencontre entre députés et sénateurs : le délit d’entrave. Le texte qui vous est proposé aujourd’hui, issu de cette CMP conclusive, ne comprend pas ce point. Nous avons rappelé l’engagement du Gouvernement sur ce sujet qui concerne la chasse, et au-delà diverses activités légales, et qui a fait l’objet – vous l’avez rappelé – d’une proposition de loi, portée par le sénateur Cardoux. Vous avez annoncé la possibilité d’une inscription rapide de ce texte à l’ordre du jour du Sénat ; le Gouvernement s’est engagé à faciliter son examen rapide à l’Assemblée nationale pour que ce sujet puisse être traité de façon transversale.

Si le présent projet de loi n’inclut pas le délit d’entrave, il comprend de nombreux points majeurs que je veux reprendre à la suite des propos de M. le rapporteur.

Il s’agit, d’abord, de la création de l’Office français pour la biodiversité.

L’opportunité de ce nouvel établissement faisait largement consensus. Nous avons eu des échanges nourris sur sa gouvernance et ses missions, ainsi que sur la juste représentation des outre-mer au regard de leur richesse en matière de biodiversité – nous le savons tous désormais, 80 % de la biodiversité française se situe dans nos territoires ultramarins. Nous avons, je le crois, trouvé un point d’équilibre.

Cet établissement réunira 2 700 agents aux compétences complémentaires sur l’eau et la biodiversité, marine et terrestre, rassemblés dans un établissement unique pour une action plus forte, mieux coordonnée, sur tous les territoires.

Il sera au service du ministère. Nous allons retravailler ses liens avec les services déconcentrés et les autres opérateurs pour la mise en œuvre de ses politiques en matière d’eau et de biodiversité.

L’office sera particulièrement mobilisé pour la mise en place de notre ambition commune, telle qu’elle est issue du plan Biodiversité et des assises de l’eau.

Le texte tend à renforcer la police de l’environnement. Après des débats nourris, nous avons accru les pouvoirs des inspecteurs de l’environnement, qui pourront, sous contrôle du procureur de la République, conduire leurs enquêtes de la constatation de l’infraction au renvoi du prévenu devant le tribunal, sans avoir à se dessaisir au profit d’un officier de police judiciaire généraliste.

Les inspecteurs bénéficieront d’un cadre de collaboration amélioré avec les autres services de police. Les peines sont renforcées pour les délits d’atteinte aux espèces et habitats protégés et pour le délit d’exercice illégal aggravé de la chasse.

Le projet de loi comprend également des mesures pour une chasse plus durable.

Je veux d’abord évoquer la question de la sécurité à la chasse. C’est une priorité du Gouvernement : même si le dernier bilan montre, et c’est heureux, une tendance à la baisse des accidents constatés, nous sommes confrontés à une hausse des incidents.

La loi prévoit ainsi – le Sénat et l’Assemblée nationale ont adopté ces mesures en commission mixte paritaire – des obligations minimales de sécurité homogènes au niveau national, un dispositif de rétention et de suspension du permis de chasser en cas de manquement grave à une règle de sécurité et une obligation de formation pour les accompagnateurs de jeunes chasseurs.

Nous avons aussi progressé sur la question de la maîtrise des dégâts de gibier, en suivant les recommandations de la mission du député Alain Perea et du sénateur Jean-Noël Cardoux : interdiction du nourrissage des sangliers et restriction des lâchers dans les enclos, ce qui permettra également de lutter contre l’engrillagement notamment observé en Sologne.

La loi incite financièrement les chasseurs à mieux réguler le grand gibier, en faisant davantage sur les territoires de chasse où les dégâts sont les plus importants.

Elle met également en place une gestion adaptative de certaines espèces pour adapter régulièrement les prélèvements de celles-ci en fonction de l’état de conservation de leurs populations. Pour ces espèces, la déclaration des prélèvements par chaque chasseur sera obligatoire auprès des fédérations de chasseurs et de l’OFB.

La loi instaure une éco-contribution afin que les fédérations de chasseurs financent chaque année, à hauteur de 5 euros par chasseur, des actions concrètes en faveur de la biodiversité, comme la plantation de haies, la restauration de milieux forestiers et de milieux humides, l’entretien d’habitats favorables à la biodiversité. Des crédits publics cofinanceront ces actions à hauteur de 10 euros pour 5 euros de contribution par chasseur.

Vous l’avez également cité, monsieur le rapporteur, la loi tend également à améliorer la définition des zones humides. Il s’agit d’un point très important abordé dans un rapport parlementaire de Frédérique Tuffnell et votre collègue Jérôme Bignon. Il y avait une ambiguïté sur cette définition, que nous avons levée, pour continuer à protéger ces zones humides comme nous nous y sommes engagés.

Après relecture attentive du texte issu de la CMP, nous avons noté quatre erreurs ou oublis de coordination. Le Gouvernement a donc déposé quatre amendements pour les corriger, lesquels seront examinés à l’issue de cette discussion générale, et qui ont été adoptés par l’Assemblée nationale mardi dernier.

Pour finir, je veux dire que le Gouvernement est pleinement mobilisé pour une mise en œuvre rapide de la loi. L’OFB sera créé au 1er janvier 2020, nous publierons rapidement les textes d’application. Trois rapports sont prévus, dont un sur le financement de la politique de l’eau et de la biodiversité, et un autre sur les questions de ressources humaines. Je m’attarderai quelques instants sur ces deux points avant de conclure.

Sur le premier point, je souhaite vous assurer que la totalité du besoin de financement nécessaire pour faire face à la baisse du permis de chasse sera assurée par des voies budgétaires, ce qui permettra de ne pas effectuer de prélèvements sur les agences de l’eau. Cette inquiétude avait été exprimée à de nombreuses reprises pendant les débats : je suis donc maintenant en mesure de vous affirmer que les agences de l’eau ne connaîtront aucune perte de recettes associée à la création du nouvel établissement et à sa budgétisation.

Comme dans n’importe quel rapprochement d’établissements, des questions légitimes sont posées par les personnels et leurs syndicats, que j’ai d’ailleurs reçus la semaine dernière. Nous avons avancé sur la possibilité d’effectuer une requalification en cinq ans des agents de catégorie C, en catégorie B, avec 300 agents par an pendant les trois premières années. Il s’agit d’une question importante pour l’établissement et nous travaillons sur les autres sujets de ressources humaines, afin de pouvoir créer cet établissement dans les meilleures conditions possible en respectant les personnels.

Nous savons tous que le déclin de la biodiversité est très préoccupant. Nous avons lu les rapports, le Président de la République a reçu les scientifiques de l’IPBES, la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques, la grande association scientifique qui pilote ces questions sur le plan international.

Ce projet de loi est un texte d’action qui nous permettra d’agir, sans opposer biodiversité et ruralité, et d’être pleinement opérationnels.

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