Intervention de Claude Bérit-Débat

Réunion du 16 juillet 2019 à 14h30
Création de l'office français de la biodiversité — Adoption définitive des conclusions de commissions mixtes paritaires sur un projet de loi et un projet de loi organique

Photo de Claude Bérit-DébatClaude Bérit-Débat :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, comme vous le savez, nous sommes parvenus le 25 juin dernier à un accord sur le projet de loi portant création de l’Office français de la biodiversité, et je m’en félicite.

Je m’en félicite, car rien n’était acquis au vu des différends notoires exprimés dans les nombreux amendements déposés à l’Assemblée nationale et au Sénat.

Finalement, les mesures les plus clivantes ont été dans leur grande majorité supprimées ou aménagées par la commission mixte paritaire. Et bien qu’ayant défendu certaines d’entre elles, je ne vais pas m’opposer au texte que nous avons à voter.

Je tiens à souligner la véritable volonté de compromis des rapporteurs de l’Assemblée nationale et du Sénat, ainsi que du Gouvernement, mais aussi l’excellent travail effectué en amont par le groupe d’études « Chasse et pêche ».

Ce projet de loi corrige une anomalie qui n’avait pu être réglée lors de l’adoption de loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, portée par Ségolène Royal, car le projet d’intégration de l’ONCFS dans l’Agence française de biodiversité était alors combattu par l’ensemble du monde de la chasse, dont je faisais partie.

Aujourd’hui, tout est différent. L’accord passé entre le Président de la République et le président de la Fédération nationale des chasseurs, prévoyant notamment la fixation du prix du permis national à 200 euros et la contribution des chasseurs, couplée à celle de l’État, au nouveau fonds pour la protection de la biodiversité, a permis à cette fusion d’être désormais acceptée par la majorité des parties prenantes. Cette opération s’inscrit en effet dans la continuité de la stratégie nationale pour la biodiversité.

Mon collègue Jean-Michel Houllegatte l’affirmait ici, lors de la discussion générale de la première lecture du texte, « nous sommes convaincus qu’il existe entre le monde de la chasse et la protection de la nature une convergence des objectifs et une complémentarité justifiant la fusion de ces deux établissements », d’autant que le monde de la chasse affirme avec force depuis longtemps, même s’il n’est pas toujours écouté, le rôle qu’il joue dans notre biodiversité, afin d’en garantir la pérennité et la richesse.

Mes chers collègues, le texte issu de la commission mixte paritaire et soumis aujourd’hui à notre vote est, selon moi, acceptable, même s’il est le fruit d’un compromis. La voix du Sénat a été entendue, et nous pouvons collectivement nous en féliciter.

Tout au long de l’examen du texte, je me plais à le souligner, les sénateurs du groupe socialiste n’ont cessé de défendre une vision équilibrée du futur établissement. Attentifs à ce que ce dernier soit le plus fédérateur possible, nous nous sommes attachés à préserver ses missions essentielles de protection de l’environnement, mais surtout à prendre en compte les attentes des différentes parties prenantes. C’est pourquoi nous avons défendu un certain nombre d’amendements en ce sens.

Nous avons notamment milité pour que le monde agricole et forestier figure expressément au sein du conseil d’administration de l’Office.

De même, l’inscription dans le texte de la contribution de 10 euros de l’État, en contrepartie de celle de 5 euros des chasseurs, dans le cadre de la création du futur fonds pour la protection de la biodiversité, a également été soutenue et portée par le groupe socialiste. Ma conviction profonde est que la gestion de ce fonds, confiée à la Fédération nationale des chasseurs, permettra à celle-ci de mener à bien la lourde tâche de protection et de reconquête de la biodiversité, tout en sachant prendre en compte, je l’espère, les attentes et les souhaits des fédérations départementales des chasseurs.

Enfin, le groupe socialiste a fait adopter l’affectation à titre gratuit à l’OFB de biens mobiliers dont, à l’occasion d’une décision de justice, la propriété avait été transférée à l’État, ainsi que des mesures permettant de renforcer la lutte contre les dégâts causés par le grand gibier.

Lors de l’examen du texte, j’ai été particulièrement attentif à ce dernier point. En effet, le département dont je suis élu, la Dordogne, est directement touché par ces dégâts, le plus souvent occasionnés par des sangliers. Je me réjouis d’ailleurs du travail mené en commun avec le sénateur Jean-Noël Cardoux pour faire adopter la fixation, par le préfet, de quota d’animaux à prélever annuellement ainsi que le renforcement des pouvoirs de ce dernier en matière de plans de chasse.

Je me félicite aussi de l’adoption de l’amendement que certains collègues et moi-même avons défendu visant à accorder aux fédérations départementales des chasseurs les compétences consistant à assurer la validation du permis de chasser, à délivrer des autorisations de chasse accompagnée et à concourir à l’organisation des examens du permis de chasse.

Toutes ces mesures serviront, j’en suis convaincu, à rendre plus fort et efficient le nouvel Office.

Toutefois, il me paraît nécessaire, mes chers collègues, d’appeler votre attention sur un certain nombre de points.

Tout d’abord, vous y avez fait allusion, madame la secrétaire d’État, il nous faudra veiller à ce que l’engagement du Gouvernement dans le fonds de protection soit intégré au budget général ; l’argent ne peut provenir des agences de l’eau, dont les fonds de roulement ne permettent pas un tel financement. C’est pourquoi la majorité des travées du Sénat ont tenu à inscrire dans la loi la sanctuarisation des ressources des agences de l’eau.

Vous le savez, je suis un défenseur de la chasse populaire. Dans mon département, la Dordogne, j’ai été sollicité par de nombreux chasseurs qui n’étaient pas convaincus par la baisse du prix du permis de chasse national couplée à la disparition du permis bi-départemental. Ces chasseurs doivent aujourd’hui s’acquitter du permis national pour chasser dans le département voisin, et cela représente une hausse tarifaire discriminante pour les chasseurs les plus modestes. Cette question doit être étudiée le plus rapidement possible par la Fédération nationale des chasseurs, comme elle s’y est engagée ; j’attends une réponse très rapide de sa part.

Il nous faudra également rester attentifs, mes chers collègues, au respect de toutes les parties prenantes au sein du conseil d’administration de l’Office. Le droit de veto accordé au Gouvernement en contrepartie d’une participation minoritaire ne doit pas mener à des abus qui seraient préjudiciables au bon fonctionnement de l’OFB.

Concernant l’indemnisation des dégâts de grand gibier, je regrette que l’extension du dispositif de participation des territoires de chasse aux territoires « susceptibles d’être chassés », introduite par le Sénat, ait été supprimée, au motif qu’elle relevait d’une loi de finances. Ce dispositif ayant vocation à devenir la principale source de financement des fédérations départementales des chasseurs, en remplacement du timbre national grand gibier, il sera nécessaire d’être attentif à son intégration dans la loi de finances.

Enfin, des questions demeurent sur le financement de l’établissement. Une baisse du prix du permis de chasse représentant 21 millions d’euros, une participation de l’État au fonds national à hauteur de 10 millions d’euros et une compensation du transfert de certaines missions représentant 9 millions d’euros : cela porte à près de 40 millions d’euros le financement non assuré de l’OFB à compter du 1er janvier 2020.

Madame la secrétaire d’État, ce sujet sera évidemment évoqué lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2020, et nous serons, une fois encore, très attentifs à ce que l’État tienne ses engagements.

Je conclus, mes chers collègues, en saluant de nouveau la qualité du travail parlementaire lors de l’examen de ce projet de loi ; bien que celui-ci ne soit pas parfait et qu’il reste des zones à éclaircir, notamment en matière de financement, le groupe socialiste votera majoritairement pour l’adoption de ce texte.

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