Intervention de Anne-Catherine Loisier

Réunion du 16 juillet 2019 à 14h30
Création de l'office français de la biodiversité — Adoption définitive des conclusions de commissions mixtes paritaires sur un projet de loi et un projet de loi organique

Photo de Anne-Catherine LoisierAnne-Catherine Loisier :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, comme nombre de nos collègues, nous nous félicitons de cette commission mixte paritaire conclusive sur ce texte qui suscite tant d’enjeux, mais aussi, nous le savons, tant de polémiques.

Ayant présenté un certain nombre d’amendements en faveur d’une meilleure gouvernance, partagée entre tous les usagers et les professionnels des espaces naturels – j’entends par là les chasseurs, mais aussi les forestiers et les agriculteurs –, je regrette, pour l’efficacité et l’équilibre de l’OFB, que certaines dispositions aient finalement été retirées de ce texte. En effet, tenir à l’écart de l’Office français de la biodiversité et de la gestion des plans de chasse les propriétaires agricoles ou forestiers, acteurs, selon moi, légitimes des territoires ruraux, ne me semble pas une posture souhaitable et durable.

Quel est l’intérêt d’ignorer des problématiques de multiusages bien réels, qui ne feront que s’exacerber ? Je pense notamment à l’amendement qui visait à prévoir la compatibilité entre les plans de chasse et les plans d’aménagement des forêts publiques, au regard des dégâts croissants de gibier sur des massifs forestiers affaiblis – on le voit aujourd’hui – par des déficits croissants et de plus en plus vulnérables aux attaques parasitaires. Quel est l’intérêt de refuser une gestion durable et partagée, responsabilisant l’ensemble des acteurs des territoires ?

Ainsi, en matière de gouvernance, le seuil minimum de 10 % des membres du conseil d’administration représentant les organisations professionnelles agricoles et forestières a été supprimé. Il demeure toutefois possible de déléguer des compétences du conseil d’administration à des commissions spécialisées. Nous comptons donc sur la sagesse des décisionnaires de l’OFB, qui les conduira, je l’espère, à s’emparer de ces options d’équilibre qui figurent encore dans le texte, pour une gouvernance plus légitime et, donc, plus durable au service de la biodiversité.

Il en est ainsi de la levée de l’obligation de constituer une réserve dans une ACCA pour le grand gibier ; de l’avis de la Commission régionale de la forêt et du bois pour fixer le nombre du grand gibier soumis au plan de chasse ; des pouvoirs renforcés du préfet pour lutter contre les dégâts du grand gibier ; et, enfin, de la péréquation entre la Fédération nationale des chasseurs et les fédérations départementales de chasseurs qui comptent un faible nombre d’adhérents.

La commission mixte paritaire a également maintenu l’ajout introduit par notre collègue Daniel Dubois dans un souci d’efficacité visant à raccourcir le délai pour l’adoption par le maire de mesures de police administrative en matière de réglementation des déchets.

En revanche, cela a été dit, la CMP a supprimé l’article relatif au délit d’entrave, à la suite de l’engagement du Gouvernement de faire examiner la proposition de loi de notre collègue Jean-Noël Cardoux par le Parlement, ce que nous attendons tous dans les plus brefs délais, vu les tensions sociétales qui se manifestent aujourd’hui pour la chasse, comme pour d’autres activités pourtant régulièrement autorisées.

La commission mixte paritaire a également supprimé l’extension de la contribution à l’hectare aux territoires « susceptibles d’être chassés », ce qui risque, malheureusement, de créer des comportements d’aubaine.

Elle a rétabli la rédaction de l’Assemblée nationale sur l’encadrement du droit d’opposition à l’intégration d’un terrain dans une ACCA, une association communale de chasse agréée, en contradiction, je l’avais dit, avec une décision du Conseil d’État d’octobre 2018, fondée sur la convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

En matière de financement, elle a tout de même confirmé le souhait du Sénat, en sanctuarisant les ressources des agences de l’eau, vous l’avez dit, madame la secrétaire d’État. Elle a précisé le schéma de financement des actions en faveur de la biodiversité, en retenant le principe d’une contribution des fédérations départementales à un fonds géré par la Fédération nationale et dont l’utilisation sera déterminée par convention.

Enfin, elle a maintenu l’engagement de l’État à soutenir les efforts des fédérations à hauteur de 10 euros par permis de chasser validé dans l’année, en visant explicitement la réalisation des actions de protection ou de reconquête de la biodiversité.

Le texte final apporte donc un certain nombre d’avancées, sans écarter pour autant l’épée de Damoclès qui pèse désormais dangereusement sur la biodiversité en forêt, à savoir l’augmentation massive de dégâts de gibier dans un contexte, je l’ai dit, de vulnérabilité sans précédent des forêts, alors que le Gouvernement, dans le cadre du programme national de la forêt et du bois, incite à exploiter plus. De telles attentes, madame la secrétaire d’État, ne sont pas compatibles avec le renouvellement des forêts et mettent en danger la pérennité de nos massifs.

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