Il s’agit de demander un rapport…
Lors de leur stationnement en port, les grands navires de croisière continuent très majoritairement à se fournir en énergie en consommant des carburants lourds qui émettent une quantité très importante de polluants atmosphériques, dont le dioxyde de soufre, l’oxyde d’azote et les particules fines.
La réglementation internationale en vigueur, bien qu’elle exige l’utilisation de carburants moins polluants lors du séjour en port que pendant la navigation, reste très peu efficace en la matière. Le plus haut standard appliqué pour le fioul marin en matière de teneur en soufre du carburant reste 100 fois supérieur à celui qui est en vigueur depuis quinze ans pour celui des voitures – 0, 1 % contre 0, 001 % – et le carburant qui sera utilisé massivement à partir de 2021 contiendrait toujours 500 fois plus de soufre que le gazole routier.
Par ailleurs, les zones ECA, Emission Control Area, restent rares et ne concernent pas les grands ports français. Ainsi, selon l’étude de l’ONG Transport & Environnement, les 47 navires de la compagnie maritime Carnival émettent plus de soufre en un an que l’ensemble des voitures circulant en Europe. En France, quatre ports figurent dans le top 50 des ports les plus pollués par ces navires qui auraient émis plus de 5, 9 tonnes de soufre sur notre territoire : Marseille, Le Havre, Cannes et La Seyne-sur-Mer.
À ce propos, la même ONG a mesuré la quantité des oxydes de soufre émis par ces paquebots lors de leurs escales en port. Sur toute la France, en 2017, ces bateaux ont effectué 162 escales, au cours desquelles ils ont émis les 5, 9 tonnes de dioxyde de soufre et d’oxyde d’azote que je viens de mentionner. Ces oxydes sont à l’origine de problèmes respiratoires et de crises d’asthme ; par ailleurs – c’est la chimiste qui vous parle –, lorsqu’ils se combinent avec l’oxygène de l’air et l’eau qui est présente dans l’air, cela donne de l’acide sulfurique. C’est pourquoi ils attaquent les voies respiratoires, puisque, quand vous les respirez, de l’acide sulfurique se forme directement sur vos muqueuses. Cela a donc un impact extrêmement important sur la santé des riverains. Et que dire des particules fines !
Une étude de 2015 menée par l’université allemande de Rostock a conclu que les émissions maritimes sont responsables de 60 000 décès prématurés en Europe en un an.
Je reprends les propos de ma collègue Samia Ghali : à Marseille où la qualité de l’air est particulièrement préoccupante, cette tendance va s’accentuer, car la ville vise la première place de port de croisière en Méditerranée, avec un objectif de 2 millions de passagers en 2020, soit 400 000 de plus qu’aujourd’hui.