Votre question est particulièrement pertinente au regard de notre action dans la durée. Il y a une quinzaine d'années, l'Inria a conclu un partenariat stratégique avec un grand acteur technologique extra-européen ; et, à l'époque, plusieurs de ses partenaires ont exprimé la crainte qu'une telle initiative ne porte atteinte à notre souveraineté numérique.
Bien au contraire, nous suivons en la matière une position constante : de telles actions sont le moyen de faire avancer notre pays, car il faut être au contact des meilleurs pour prendre part aux évolutions à l'oeuvre et attirer nous-mêmes des talents. La ligne de crête est étroite, mais c'est le seul chemin permettant d'avancer.
Cela étant dit, nous devons également être capables de travailler avec d'autres partenaires, notamment pour irriguer le tissu français des grandes entreprises et des ETI, afin de renforcer nos interactions avec l'industrie. Les « garde-fous », pour reprendre vos termes, relèvent de la gouvernance des partenariats. C'est à nous de définir quels sujets peuvent ou non faire l'objet de coopérations de cette nature.
Cette mécanique de partenariats maîtrisés avec le monde industriel doit relever d'une véritable stratégie. Elle ne doit pas obéir, avant tout, à une recherche de financements, ce qui est souvent un petit travers français. Pour sa part, l'Inria a toujours suivi une stratégie de l'impact. Ainsi, il serait essentiel de nouer des partenariats avec quelques acteurs économiques français permettant de diriger vers eux un flux massif de jeunes formés, sans pour autant développer un modèle économique - nous n'allons pas nous transformer en agence d'intérim. Cette initiative aurait sans doute un impact beaucoup plus fort pour le tissu économique français que la construction de partenariats fondés sur des enjeux de financements. Mais un tel effort exige d'affirmer que l'Inria est avant tout un outil au service de la souveraineté numérique.