Intervention de Jean-François Husson

Réunion du 25 septembre 2019 à 21h30
Lutte contre le gaspillage et économie circulaire — Article 6

Photo de Jean-François HussonJean-François Husson :

Mes chers collègues, le secteur de la construction représente aujourd’hui une part non négligeable de la production de déchets, avec près de 230 millions de tonnes produites chaque année, soit environ 77 % des déchets français uniquement pour le secteur de la démolition.

Aujourd’hui, seuls 5 % à 10 % des chantiers réalisent vraiment un diagnostic « déchets », pour de multiples raisons.

L’extension du recours au diagnostic, qui est prévue à l’article, va dans le bon sens, mais ne me semble traiter qu’une partie minime du problème. La démolition n’est que l’avant-dernière étape de la vie d’un matériau, avant sa réutilisation ou avant son recyclage.

Il me paraît d’ailleurs nécessaire de souligner l’importance de traiter la question des déchets le plus en amont possible, afin d’être plus exigeant sur la date de construction.

Peut-être pourrions-nous proposer aux maîtres d’œuvre d’utiliser davantage de matériaux recyclables, voire les y obliger, et, pourquoi pas, leur imposer de réfléchir en amont, au moment de la conception des bâtiments, sur un prédiagnostic de l’utilisation future des matériaux. Je sais que ce n’est pas simple, et je prendrai un exemple tout à l’heure, mais cela me paraît important.

Nos règles d’urbanisme doivent donc évoluer. On ne peut plus, aujourd’hui, se contenter de bâtiments dont l’avenir se limite à quelques décennies et qui sont ensuite, pour le dire poliment, « déconstruits » parce qu’ils sont inadaptés dans le temps et dans la durée.

De la même manière, les règles de la commande publique doivent évoluer. Je pense que l’État, tout d’abord, et les collectivités territoriales, ensuite, doivent essayer de travailler avec une politique immobilière attentive aux règles de construction et à ce que j’appellerai l’éco-conditionnalité.

Madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le renforcement du diagnostic « déchets » avant démolition est utile, mais ce n’est en fait qu’une partie du problème.

Sur ce sujet, comme sur d’autres, il nous faut assurément élargir le cadre de la réflexion pour prendre en compte le devenir des produits à partir de l’analyse de leur cycle de vie, notamment en l’état actuel des connaissances.

En disant cela, je pense notamment, dans les matériaux de construction, aux plaques de fibrociment qui contiennent de l’amiante : à l’époque où elles ont été vendues, elles avaient tous les labels nécessaires, et l’État donnait, bien évidemment, son blanc-seing. Aujourd’hui, il revient finalement aux utilisateurs, malgré eux, voire à celui ou celle qui a acheté un bien, de traiter la question en payant cher le coût de l’élimination.

Nous avons une responsabilité collective en tant que législateur. C’est la raison pour laquelle, mes chers collègues, je vous invite, au moment où nous commençons l’examen de cet article 6, à garder constamment cette préoccupation en tête.

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