Intervention de Jean-Marie Bockel

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 24 septembre 2019 à 18h05
Sécurité des maires dans l'exercice de leur mandat — Audition de M. Jean-Marie Bockel président de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation

Photo de Jean-Marie BockelJean-Marie Bockel, président de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation :

Nous avons effectivement échangé sur l'initiative heureuse de la commission des lois. Lors des consultations des élus que nous avions faites précédemment, le sujet des violences n'était pas remonté. Le décès de M. Michel a été la goutte d'eau qui a fait déborder le vase et dévoilé une situation qui s'est installée et à laquelle, trop souvent, nous nous sommes, collectivement, habitués.

Chacun peut en la matière y aller de son anecdote. J'ai personnellement souvenir de menaces contre ma famille que m'avait valu le déplacement du champ de foire qui était jusqu'alors en centre-ville. Plus récemment dans ma communauté d'agglomération, un maire s'est fait casser le bras lors d'une altercation avec des gens du voyage. Ce climat général de remise en cause des institutions, de dégradations des comportements, s'ajoute à la pression que subissent les maires. L'analyse des réponses au questionnaire sera intéressante. Le projet de loi relatif à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique a pris en compte certains aspects de la question du statut de l'élu et envisage des pouvoirs supplémentaires pour les maires. Tout cela est bien, mais pas suffisant. Ce projet de loi ne sera de toute façon pas la réponse à toutes les questions posées, notamment, par exemple, celle du dépôt sauvage des déchets. 2 400 collectivités ont répondu à une étude de l'Agence de l'environnement de la maîtrise de l'énergie (Ademe) : 87 % d'entre elles n'ont pas de données chiffrées, ce qui appelle à une certaine prudence sur les statistiques, mais il y a un sentiment d'exaspération et d'impuissance face à un phénomène qui s'aggrave. Pourtant les collectivités locales sont précurseurs en matière de traitement des déchets, tant au niveau technique qu'au niveau de l'information des citoyens. Or la question de l'incivilité impacte fortement le travail des collectivités sur ce sujet.

Un autre enjeu du quotidien, c'est l'attitude de certains groupes de gens du voyage. C'est un sujet très difficile, sur lequel beaucoup de collectivités locales ont fait d'importants efforts, dans le cadre des textes qui se sont succédé. Là aussi, beaucoup de territoires ont été innovants. Le dialogue avec le préfet est depuis facilité. Mais, de la même manière, la montée en puissance des incivilités vient perturber ce travail de fond. La proposition de loi de notre collègue Jean-Claude Carle, devenue la loi du 7 novembre 2018 relative à l'accueil des gens du voyage et à la lutte contre les installations illicites, a été considérablement amodiée par l'Assemblée nationale. Et encore faut-il qu'elle soit appliquée : il manque des décrets, onze mois après la promulgation. La tranquillité publique, la prévention de la délinquance et l'urbanisme sont aussi la cause d'incidents nombreux.

Nous avons réussi, avec les gouvernements et les lois successifs, à créer un climat de confiance sur les questions de sécurité, dans un dialogue entre collectivités locales, préfecture, sous-préfecture et gendarmerie, justice et école. Sur la question du respect des maires, il faut aussi instaurer ce climat de confiance, on n'a pas besoin de légiférer pour tout. Lorsque les maires sont agressés, l'agression est aussi psychologique et peut pousser certains au découragement et au renoncement. Lorsque les maires se sentent fortement soutenus par les autorités qui se sentent concernées, cela change la donne.

Au sein de la délégation, nous avons quelques pistes de réflexion. La formation des élus en premier lieu. Ensuite l'accompagnement des élus dans leurs démarches : les choses sont plus simples lorsqu'il existe un « fil direct » avec le préfet, le sous-préfet, la gendarmerie. Enfin sur la question judiciaire, toujours pour créer et préserver le climat de confiance, il faut que la justice ne laisse pas un pouce d'impunité sur les agressions contre les maires. Afin que la part d'autorité du maire soit respectée. Il faut donc des évolutions concrètes sur la manière dont le signalement et la plainte sont recueillis, sur l'attention portée au suivi judiciaire de la plainte. Vous avez enfin dû voir le travail intéressant effectué par le ministère de l'intérieur avec les 361 maires agressés.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion