Monsieur Capus, je confirme que nous allons supprimer la niche fiscale constituée par le GNR, en respectant deux principes : le temps et la concertation. Nous avons prévu un délai de trois ans à partir du 1er juillet 2020 pour permettre aux entreprises de s'adapter. Nous mettrons aussi en place des mesures de compensation : une clause générale de révision des prix, des dispositifs de suramortissement pour l'achat de matériels électriques, une avance versée par l'État aux PME portée de 5 à 10 % et l'inclusion des frais d'entretien des réseaux dans le FCTVA. Ces mesures résultent d'une négociation avec les fédérations professionnelles concernées. Nous pourrons ainsi abandonner la niche du GNR de façon sereine. Il ne s'agit pas d'une mesure punitive, motivée uniquement par des raisons budgétaires. Cette décision est cohérente avec notre politique de transition énergétique et avec notre volonté d'indépendance à l'égard des énergies fossiles
Madame Vermeillet, notre prévision de croissance, 1,3 % du PIB, est conforme aux estimations des grandes institutions internationales. Et ce n'est qu'à partir de 2021 qu'une fraction de la TVA commencera à être redistribuée. Pour le reste, je partage votre avis : nous avons besoin d'une stratégie de croissance européenne. J'en ai proposé une à nos partenaires européens. Il ne s'agit pas simplement de demander à l'Allemagne de dépenser plus, mais de s'inscrire dans un cadre d'ensemble où les pays qui doivent faire des réformes, comme la France, les font, où ceux qui doivent réduire leurs dépenses publiques le font, et où ceux qui ont des marges d'action budgétaires pour investir les utilisent. La zone euro ne doit pas être régie uniquement par la compétition mais aussi par la solidarité et la coordination des politiques économiques.
En ce qui concerne le CIR, nous avons retenu simplement la proposition de la Cour des comptes de réduire l'abattement sur les frais de fonctionnement. La Cour avait proposé de le réduire à un niveau entre 40 et 46 %. Nous proposons de passer de 50 à 43 %, sans toucher aux dépenses d'innovation et d'investissement. Je tiens à redire que l'innovation constitue un enjeu stratégique qui doit figurer au coeur de toutes les politiques publiques. Il faut développer les moyens de la financer. Nous voulons ainsi favoriser le capital-risque, très faible en France, en nous inspirant du rapport de Philippe Tibi. Nous voulons aussi développer l'union des marchés de capitaux au niveau européen pour que l'on ait enfin les moyens, au niveau européen, de financer l'innovation. Il est dramatique qu'une entreprise comme Devialet doive s'adresser à un fonds américain pour trouver un apport de 100 millions d'euros, à cause de l'absence d'un marché de capitaux européens. Si l'Europe n'a pas de géants du numérique, c'est parce que l'on ne peut pas lever les fonds suffisants. L'endettement des entreprises est déjà très élevé et les marges de manoeuvre me paraissent limitées. Le troisième levier de financement - cela vous surprendra peut-être de ma part - est le financement public. Le capital-risque et l'endettement des entreprises ne suffisent pas. L'investissement public est crucial si l'on veut rester dans la course technologique au XXIe siècle. Si je suis aussi déterminé sur les cessions d'actifs publics, ce n'est pas parce que je souhaite brader les actifs de l'État, c'est parce que je souhaite qu'on consacre davantage de financements publics à l'innovation, au travers des investissements d'avenir, de la BPI ou du fonds pour l'innovation de rupture. Nous devons aussi nous attaquer au décalage, spécifique à la France, entre la recherche, notamment publique, car les dépenses publiques de recherche sont élevées en France, et le développement industriel qui est insuffisant. Nous allons réfléchir à des mesures pour mieux articuler recherche publique et développement industriel. Il n'est pas absurde de vouloir concentrer notre recherche dans des secteurs où nous sommes déjà très bons, comme les nanotechnologies, l'aéronautique, le spatial, la santé, les biotechnologies, car nous disposons déjà d'outils industriels dans ces secteurs et une hausse de la recherche publique aura un effet de levier considérable sur le développement industriel privé et donc sur les emplois dans nos territoires.
Monsieur Raynal, j'assume toutes mes responsabilités. L'objectif était « 5, 3, 1 » et non « 5, 3, 2 ». Si nous avions pu faire davantage pour réduire la dette, j'aurais été le plus heureux des ministres des Finances. La dette baisse moins vite qu'escompté parce que la croissance est moindre, quoique meilleure que dans la zone euro. Nous ne parviendrons pas à réduire la dette de huit points et je suis le premier à le regretter. En revanche, nous allons réduire les dépenses publiques de 2,3 points d'ici 2022, ce qui n'est pas très éloigné de l'objectif initial des 3 points. Quant à la baisse des impôts, nous ferons mieux que prévu, avec une baisse de 1,3 point et non d'un point au cours du quinquennat.