Intervention de Philippe Bas

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 2 octobre 2019 à 8h35
Menaces et agressions auxquelles sont confrontés les maires — Communication

Photo de Philippe BasPhilippe Bas, président :

Je l'ai indiqué, seuls 37 % des participants ont saisi la justice à la suite d'une attaque. Seulement 21 % des plaintes déposées ont abouti à la condamnation pénale des fautifs ; 7 % sont en attente de jugement ; 16 % des plaignants n'ont pas d'information ; dans 6 % des cas, l'affaire a été classée sans suite et 40 % des plaintes ne font l'objet d'aucune suite pénale - des rappels à la loi peuvent toutefois avoir été prononcés. Cette enquête met en évidence le fait que les maires ayant porté plainte ne sont pas satisfaits du résultat, une partie d'entre eux n'en étant même pas informés. En outre, les maires estiment qu'ils ne sont pas suffisamment soutenus. Seuls 32 % des participants ont bénéficié d'une protection juridique. La procédure est longue : il faut demander l'autorisation du conseil municipal et la procédure grève le budget de la commune, déjà très faible. Parfois, la commune n'est pas assurée. Près de 85 % des élus déclarent ne pas avoir reçu d'assistance des services de l'État après avoir subi des agressions, menaces ou outrages. Dans 86 % des cas, les élus estiment ne pas avoir suffisamment de moyens de contrainte pour faire respecter leurs arrêtés de police administrative. Cette assertion est d'autant plus vraie si la commune ne dispose pas d'une police municipale. Ainsi, 21 % des maires qui en sont dotés déclarent avoir suffisamment de moyens, contre 11 % en l'absence de police municipale.

Au regard des résultats, je vous soumettrai des propositions, dont certaines sont de nature législative - les rapporteurs du projet de loi relatif à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique vous les présenteront tout à l'heure -, et d'autres des mesures d'organisation administrative. Deux grandes catégories d'actions se dessinent : celles qui consistent à renforcer l'autorité des maires et l'effectivité de leurs pouvoirs de police, et celles qui visent à accompagner et à protéger le maire dans l'exercice de son mandat. Concernant les mesures relatives aux sanctions, je vous propose de permettre aux agents de la police municipale de dresser des amendes forfaitaires ou timbres-amendes pour les infractions aux arrêtés de police municipale dont la constatation ne nécessite pas d'actes d'enquête : il s'agit d'une mesure très attendue que la commission des lois a déjà formulée à de nombreuses reprises, et qui est par ailleurs évoquée dans le rapport de François Grosdidier fait au nom de la commission d'enquête sur l'état des forces de sécurité intérieure. Aujourd'hui, sauf exception, les infractions ne peuvent pas donner lieu à des amendes forfaitaires. Nous demanderons au Gouvernement de prendre ce décret.

Nous demanderons également de porter de 38 à 150 euros le montant maximal de l'amende encourue en cas d'infraction à un arrêté de police, une mesure qui relève également d'un décret.

Par ailleurs, il conviendrait de développer les amendes administratives qui sont directement prononcées au nom de l'administration municipale. Le Gouvernement formule des propositions en ce sens dans la lettre rectificative au projet de loi relatif à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique, mais celles-ci soulèvent un problème constitutionnel : une sanction pénale et une sanction administrative ne peuvent être prononcées pour punir une même faute, et il faut que la sanction administrative soit proportionnée à la faute. Aussi, la mesure du Gouvernement mérite d'être améliorée. Nous proposons que le parquet soit informé du lancement d'un processus d'amende administrative dans la commune et, si ce dernier veut poursuivre, la procédure pénale l'emportera.

En outre, nous proposons de simplifier les conditions de mutualisation des polices municipales en vue d'une mutualisation au niveau intercommunal. Un plus grand nombre de maires pourront disposer sur le territoire de leur commune d'agents qu'ils n'ont pas à rémunérer directement et sur lesquels ils auront autorité pour faire constater un certain nombre d'infractions. Nous avons observé que les conventions de coordination pour l'utilisation des polices municipales sont trop formelles ; le procureur de la République ne les signe même pas. Donnons-leur davantage de substance ! C'est une proposition de nature législative, qui pourra être intégrée dans le cadre du projet de loi relatif à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique.

Nous proposons que l'information des maires sur les suites judiciaires soit renforcée. De nombreux maires demandent que les poursuites soient systématiques. Nous ne pouvons pas aller jusque-là compte tenu du principe d'opportunité des poursuites, mais nous pouvons faire en sorte que l'information des maires soit améliorée.

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