Intervention de Jean-Raymond Hugonet

Réunion du 8 octobre 2019 à 14h30
Engagement dans la vie locale et proximité de l'action publique — Motion d'ordre

Photo de Jean-Raymond HugonetJean-Raymond Hugonet :

En point d’orgue de cette vertigineuse dégradation, la grave crise dite des « gilets jaunes » est venue stopper net l’arrogance du « nouveau monde » et a plongé le pouvoir dans la crainte et la fébrilité. Après avoir fait un chèque sans provision de plus de 10 milliards d’euros pour acheter la paix sociale, le Président de la République s’est lancé avec frénésie dans un tour de France des élus locaux, ne comptant plus son temps, prenant force notes et découvrant enfin les vertus de la proximité. « En même temps », il n’avait pas le choix, parce que c’est aux fantassins de la République, aux élus eux-mêmes qu’il faut redonner confiance, et ce maintenant. Il est indispensable de leur apporter l’appui de la Nation qu’ils incarnent au quotidien auprès de nos concitoyens, de leur signifier que la confiance des Français, dont plus de 80 % ont une image positive de leur maire, se traduit en actes, en clair qu’on ne les laisse pas tomber.

Est-ce réellement pour atteindre cet objectif que le projet de loi relatif à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique nous est présenté aujourd’hui ? D’un naturel optimiste, je me plais à le croire. Car oui, la situation est devenue intenable pour les élus locaux, les maires en tête. Entre sentiment d’abandon et absence de reconnaissance, ces derniers ont exprimé récemment un sentiment d’usure et d’impuissance encore jamais éprouvé jusqu’alors.

Au Sénat, conformément à la responsabilité que nous confère l’article 24 de la Constitution, nous avions entendu de longue date les appels au secours montant des territoires. Le texte qui nous est présenté aujourd’hui reprend d’ailleurs un grand nombre des positions tenues par le Sénat depuis plusieurs années, notamment sur l’articulation communes-EPCI ou encore sur les conditions d’exercice des mandats. Il était plus qu’urgent d’agir !

Apportant la preuve tangible que la vision du Sénat n’est pas « datée », sous l’impulsion de son président Philippe Bas, que je veux ici saluer, la commission des lois a lancé, de manière inédite, une vaste consultation des maires, des adjoints et des conseillers municipaux bénéficiant d’une délégation de fonctions. Les résultats n’ont pas tardé à remonter du terrain, en France métropolitaine et dans les territoires d’outre-mer.

La commission des lois a donc logiquement pris en compte leurs justes demandes et amendé profondément le projet de loi Engagement et proximité. Sur tous les points sur lesquels le texte initial avait été jugé timoré ou frileux par les associations d’élus, nous avons ajouté des dispositions nettement plus ambitieuses. Comme le soulignait Mathieu Darnaud voilà quelques instants, il ne s’agit évidemment pas d’opposer communes et intercommunalités, mais il est grandement nécessaire de rappeler que la commune est la porte d’entrée de l’intercommunalité, et non l’inverse.

C’est ainsi que nous avons entendu le souhait mille fois répété des associations d’élus de voir supprimer purement et simplement le transfert obligatoire de la compétence en matière d’eau et d’assainissement dans les communautés de communes et d’agglomération. Il ne s’agit plus là du mécanisme limité et compliqué proposé au travers du texte initial, mais d’une solution simple et efficace.

En ce qui concerne le renforcement des pouvoirs de police du maire, nous proposons notamment d’augmenter fortement le montant des amendes pouvant accompagner une astreinte et de codifier la possibilité d’interdire la vente de boissons alcoolisées la nuit dans les communes.

C’est à nous qu’il revient de faire en sorte que des orientations fermes de politique pénale en cas d’agression d’élus locaux soient diffusées à l’ensemble des parquets. C’est à nous de faire en sorte que les conditions de mutualisation des polices municipales soient assouplies.

Mes chers collègues, chacun d’entre nous le sait personnellement, la vie politique est ardue, chronophage et souvent ingrate. Mais chacun d’entre nous sait aussi qu’elle offre toutes les richesses d’un engagement humain au service de l’intérêt général, d’un projet de territoire, d’une Nation. Il est du devoir de notre démocratie de protéger ceux qui représentent la République ; la République doit aussi savoir se faire respecter !

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