Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ma question, qui s’adresse à M. le ministre de l’éducation nationale, concerne l’enseignement de la langue arabe dans l’enseignement public.
Le nombre d’élèves suivant des cours d’arabe dans l’enseignement public est en constante diminution. Alors que l’enseignement de langues dites « rares » ne cesse de se développer, puisque 15 000 élèves de l’enseignement secondaire étudient le chinois, 12 000 le portugais, 14 000 le russe, à peine 7 300 collégiens et lycéens suivent des enseignements de langue arabe. Et encore faut-il préciser que, parmi ces élèves, 1 800 suivent les cours du centre national d’enseignement à distance, le CNED, et 1 500 résident à la Réunion et à Mayotte.
Pourtant, la demande est forte, motivée autant par des raisons culturelles que par la réalisation de projets professionnels.
L’arabe est en effet l’une des dix langues les plus parlées au monde, et certains pays arabes, en plein développement économique, sont des partenaires commerciaux importants, comme l’actualité nous le montre tous les jours. Plusieurs États européens l’ont d’ailleurs fort bien compris. Ainsi, le Danemark développe l’enseignement de cette langue dès le collège. Ce pays n’a pourtant pas, de par son histoire, des relations privilégiées avec des pays arabophones, comme c’est par exemple le cas de la France.
À l’éducation nationale, les créations de poste ne suivent pas. Pourquoi ?
On nous dit que certains chefs d’établissement seraient réticents à ouvrir des classes d’arabe, aussi bien dans l’établissement défavorisé, où l’on craint que cette langue ne contribue à la ghettoïsation de ce dernier, que dans les lycées de centre-ville, où l’on redoute que l’ouverture de cette option n’attire des « populations à problèmes ».
Cela concerne aussi la politique gouvernementale puisque, en quatre ans, le nombre de postes d’enseignant de la langue arabe proposé au concours du certificat d’aptitude au professorat de l’enseignement du second degré, le CAPES, a été divisé par quatre : vingt postes en 2002 contre cinq seulement en 2006.
En revanche, comme vous l’avez sans doute remarqué, monsieur le ministre, l’enseignement privé de l’arabe est en pleine croissance. Entre les cours dispensés par des associations privées financées par des États étrangers et ceux, dispensés dans les lieux cultuels, qui donnent souvent lieu à du prosélytisme, 100 000 personnes seraient concernées. Ces formations se développent au détriment de l’enseignement laïc, avec des risques évidents de dérive communautariste.
Sous la pression de l’opinion publique, les assises de l’enseignement de la langue et de la culture arabes ont été organisées le 9 octobre 2008 à l’Assemblée nationale. À l’issue de cette journée, votre prédécesseur, M. Xavier Darcos, avait annoncé cinq grands axes de développement pour l’enseignement de la langue arabe : une généralisation des classes de sixième « bilangues » dès la rentrée 2009, l’identification et la création d’établissements pilotes pour l’arabe afin d’éviter la dispersion des moyens, la généralisation des regroupements inter-établissements en centre-ville dans les grandes agglomérations, le développement des sections internationales et de langues orientales, dont l’ouverture était d’ailleurs prévue en 2009, ainsi que le développement de l’arabe dans l’enseignement professionnel, notamment dans l’hôtellerie, le tourisme et la restauration.
Plus d’un an après ces assises, il semble que rien n’ait été concrétisé. Où en êtes-vous, monsieur le ministre, dans la mise en œuvre d’une véritable politique d’enseignement de la langue et de la culture de l’arabe dans nos écoles publiques, afin de répondre à la demande des élèves, arabophones ou non, et, surtout, pour s’assurer de son encadrement par l’enseignement public laïc, seul garant de la défense des valeurs de la République ?