Intervention de Anne-Marie Idrac

Réunion du 19 janvier 2010 à 9h30
Questions orales — Législation sur l'action de groupe

Anne-Marie Idrac, secrétaire d’État chargée du commerce extérieur :

Monsieur Yung, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence de Christine Lagarde, qui m’a chargée de vous apporter les éléments de réponse suivants.

Tout le monde le sait, les litiges de consommation constituent un domaine privilégié des contentieux de masse, en particulier dans le secteur des services. Vous l’avez rappelé, les nouvelles technologies, tels la téléphonie mobile et internet, ou encore les cartes de crédit, sont autant de phénomènes qui ont complexifié et multiplié les contrats de consommation et les techniques de vente, impliquant des moyens de résolution des litiges proportionnés et efficaces.

Les dispositifs dits d’« action de groupe » font actuellement l’objet de nombreuses réflexions au niveau aussi bien national, y compris de la part des parlementaires, qu’européen, notamment au sein de la direction générale Concurrence et de la direction générale Marché intérieur et services. Ces réflexions montrent – c’est le point que Christine Lagarde me demande de souligner auprès de vous – que les effets pervers de ce système d’action de groupe ont été largement occultés, ce qui nous amène effectivement à agir avec une certaine prudence.

En effet, la création d’une telle procédure, s’inspirant directement du modèle en vigueur outre-Atlantique, pourrait avoir de fâcheuses conséquences pour les entreprises : non seulement celles-ci se verraient fragilisées, mais en outre, sous prétexte qu’elles risqueraient de devoir faire face à des procédures judiciaires très coûteuses, elles seraient amenées à enregistrer un certain nombre de provisions, en clair à augmenter leurs tarifs. Le système se retournerait finalement contre le consommateur.

Au-delà des enseignements tirés de l’analyse de l’expérience menée outre-Atlantique, et comme vous l’ont rappelé Luc Chatel, en son temps, et Hervé Novelli, plus récemment, un certain nombre de conditions ou de préalables ne sont pas remplis.

D’une part, en ces temps de crise économique, ce n’est franchement pas le moment d’ajouter à une inquiétude économique une inquiétude juridique : ce serait mal compris, notamment par les salariés des entreprises concernées.

D’autre part, le mouvement consumériste n’est pas organisé, comme il peut l’être dans d’autres pays, pour piloter des procédures aussi complexes. À long terme, des effets défavorables en même temps aux consommateurs et aux salariés risquent donc de se produire.

Pour toutes ces raisons, nous préconisons plutôt le développement de la médiation civile, qui nous semble être de nature à résoudre bien plus sûrement les petits litiges, pour lesquels une résolution extrajudiciaire est parfaitement adaptée et moins coûteuse.

Cette réflexion rejoint celle qui est menée sur la directive 2008/52/CE, qui porte sur certains aspects de la médiation en matière civile et commerciale et dont l’objet est d’« apporter une solution extrajudiciaire économique et rapide aux litiges en matière civile et commerciale ». Les services de Christine Lagarde et ceux de la Chancellerie sont en train de travailler à sa transposition la plus rapide possible dans notre droit national.

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