Intervention de Christophe Castaner

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 10 octobre 2019 à 9h00
Audition de M. Christophe Castaner ministre de l'intérieur et de M. Laurent Nunez secrétaire d'état auprès du ministre de l'intérieur à la suite de l'attaque survenue à la préfecture de police le 3 octobre 2019

Christophe Castaner , ministre :

Madame de la Gontrie, je ne veux pas vous laisser penser que le rétrocriblage n'existerait pas depuis deux ans. Je le répète : il existe et il fonctionne.

Une fois l'habilitation accordée, si des vulnérabilités apparaissent, un contrôle est possible à tous les niveaux. Le principe même de l'habilitation, c'est qu'il y a une enquête administrative, dont le contenu, très variable, est à l'appréciation du seul service enquêteur. En cas d'inquiétude, le service, par exemple la DGSI, peut organiser un entretien de sécurité avec le candidat. S'il y a une alerte supplémentaire, en plus de consulter tous les fichiers, on peut utiliser toutes les techniques de renseignement à la disposition de nos services et encadrées par la loi. Nous pouvons parfaitement organiser le rétrocriblage.

L'article L. 114-1 du code de la sécurité intérieure prévoit la possibilité de révoquer un agent en cas de radicalisation. Si nous ne l'avons pas utilisé, c'est parce que, jusqu'à présent, nous n'en avons pas eu besoin.

Le portefeuille de signalements n'a jamais dépassé une trentaine de cas au sein de la police nationale. Quand des éléments caractérisent une radicalisation, il faut engager une procédure. Mais plutôt que de s'enfermer dans une seule disposition, notre administration a fait le choix, depuis 2015, d'utiliser tous les moyens possibles pour écarter l'agent. Aujourd'hui, les personnes suivies sont au nombre de dix-neuf ; comme nous avons reçu en tout une quarantaine de signalements, une vingtaine de personnes nous ont quittés. Leur départ a pu prendre la forme d'une mise en disponibilité pour création d'entreprise, d'une révocation - l'une est actuellement suspendue à un jugement au fond -, du licenciement d'un adjoint de sécurité (ADS), d'une déclaration d'inaptitude professionnelle, du non-renouvellement d'un contrat d'ADS ou d'une fin de stage.

J'insiste : notre administration veille à utiliser tous les moyens possibles. Si, dans un mois, nous avons besoin d'utiliser la procédure prévue à l'article L. 114-1, nous aurons les moyens d'y recourir sans difficulté. Nous rétrocriblons déjà, dans le cadre légal, et nous continuons d'avancer. Ne cherchons donc pas à nous opposer sur ces sujets.

Oui, j'ai voulu que les maires soient au coeur de la prévention et de la lutte contre la radicalisation. C'est pourquoi j'ai signé la circulaire prévoyant leur information. Encore faut-il que les maires - je ne parle pas de la Ville de Paris, mais sur un plan général - demandent cette information et acceptent d'entrer dans cette logique, en signant une charte de confidentialité. Ce n'est hélas pas le cas de certains, ce qui est aussi une fragilité.

Quoi qu'il en soit, nous avons mis en place le dispositif permettant à un maire d'obtenir une information sur une personne radicalisée travaillant dans un service sensible et d'avoir un retour systématique sur les signalements. S'il y a un dysfonctionnement à la mairie de Paris, je propose qu'une réunion spécifique se tienne sur le sujet.

Monsieur Grosdidier, on a un temps de retard sur l'ennemi qui nous frappe, mais nos services, tous les jours, ont un temps d'avance sur l'ennemi. Mais, évidemment, ils ne sont pas à 100 % - on l'a vu jeudi dernier. Il nous faut donc être meilleurs.

S'agissant des possibilités de révocation, il n'est pas nécessaire de changer la loi pour les agents de la police nationale ; pour la gendarmerie nationale, c'est un peu différent, mais il n'y a pas forcément de besoin aujourd'hui. Si, au terme de la revue que nous engageons, nous constatons qu'il est nécessaire d'affiner, d'améliorer ou de changer certaines dispositions, je m'appuierai volontiers sur le Sénat pour avancer sur le terrain législatif.

Je n'ai jamais pourfendu la réforme Sarkozy, et ce n'est pas la question. En ce qui concerne la préfecture de police de Paris, un dispositif touchant aux habilitations au secret défense n'était pas suffisamment encadré ; nous avons amené la DGSI et la préfecture de police à signer un protocole en février dernier, afin de faire appliquer le référentiel national. La directrice du service de renseignement de la préfecture de police a pris les choses en main, et le référentiel qui s'applique est désormais placé sous le contrôle de la DGSI, qui étudie l'ensemble des signalements.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion