J’y insiste : en cas de QPC, alors que la mise en place des futurs exécutifs locaux serait bien avancée à la suite des élections municipales et communautaires de mars 2020, ou pourrait, outre le « fun » des accords locaux, devoir demander à tout le monde de refaire les élections. Il faut bien en avoir conscience.
Si par ailleurs ce projet de loi restait en l’état, les élections dont il s’agit se feraient au scrutin de liste : je ne le répéterai jamais assez. On peut avancer que les communes rurales seraient défavorisées par rapport aux plus grandes. Mais, à cet égard, on serait en inadéquation avec les mesures votées la semaine dernière par scrutin public, donc, souvent, par les absents… Je le souligne, car je ne le comprends toujours pas.
Monsieur Masson, on peut le dire, vous n’étiez pas là la semaine dernière : nombre de vos amendements devaient être examinés, mais, certainement pour de bonnes raisons, vous n’avez pas pu les défendre. Mes collaborateurs de la direction générale des collectivités locales, comme l’ensemble des administrateurs de la commission des lois, ont néanmoins travaillé sur vos amendements. Cela étant, nous avons déjà répondu à la plupart des interpellations que vous venez de faire, par exemple au sujet des grandes intercommunalités : je n’y reviens pas.
Je n’ai pas spécialement d’intérêt à défendre le Conseil constitutionnel : il se trouve qu’un décret du Président de la République m’a nommé ministre, mais je suis un élu local. Cela étant, je me dois de rappeler devant la Haute Assemblée que personne n’est soumis au Conseil constitutionnel !
Premièrement, cette institution a été imaginée par les pères de la Ve République : elle n’est pas sortie de nulle part. Deuxièmement, le président du Sénat nomme trois de ses membres. Troisièmement, ce n’est pas le Conseil constitutionnel qui, dans notre pays, est le Constituant. Le Constituant est, soit le peuple français, soit les parlementaires, qui représentent le peuple français.
On ne peut pas présenter, notamment aux personnes qui suivent nos débats, le Conseil constitutionnel comme une sorte d’autorité administrative indépendante, siégeant dans un coin, qui ferait ce que bon lui semble. Non ! On peut toujours supposer telle ou telle décision d’opportunité. Mais il s’agit de juges constitutionnels, dont un tiers sont nommés par le patron de cette maison ; de juges décidant sur la base d’un texte, la loi fondamentale, qui est le fruit de notre histoire et qui est l’œuvre à la fois du peuple français, sollicité directement, et des parlementaires, qui ont décidé de la modifier.
On s’étonne que plus personne ne croie en notre démocratie représentative : alors même que, avec ce projet de loi, nous voulons, sinon réinventer, du moins réenchanter la démocratie représentative locale, il faut éviter tout propos qui, en portant atteinte à la Constitution, abîmerait la démocratie représentative globale.
Monsieur Maurey, je n’ai pas lieu de me prononcer sur votre proposition : une saisine du Conseil constitutionnel sans attendre la QPC est du ressort des deux chambres du Parlement. Elle peut être effectuée par un nombre minimal de sénateurs et de députés, ou encore par les présidents des assemblées, et elle peut porter sur tout ou partie du texte.
M. Sueur milite déjà en faveur d’une proposition de loi en la matière : il faut saluer la ténacité avec laquelle il défend ce texte. Je constate également la volonté collective d’avancer : personne, dans cet hémicycle – pas même moi ! –, ne s’est prononcé contre de telles dispositions.
Certains prétendent se moquer du fait qu’elles soient constitutionnelles ou pas, et d’autres se disent prêts à prendre le risque d’une censure. Soit ! Mais, dès lors, le législateur et le Gouvernement doivent agir comme à l’accoutumée, c’est-à-dire sérieusement. Il s’agit, d’une part, de regarder l’impact pour les élus locaux – monsieur Reichardt, je le rappelle, nous sommes face au risque d’un nouveau vote intégral – et, d’autre part, d’interroger celui qui, en vertu de nos institutions, est là pour dire si une mesure est constitutionnelle ou non : le Conseil constitutionnel !
Enfin, merci à chacune et chacun d’entre vous de ce débat : il est au niveau, et il est attendu, non seulement par nos concitoyens, mais aussi par nos 600 000 collègues élus locaux à travers le pays.