Je suis également membre du Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD). C'est un très grand honneur pour la mission de vous présenter aujourd'hui son travail. Au préalable, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de Mme Claire Waysand, collègue de l'IGF, co-auteur de ce rapport, qui n'a pas pu se joindre à nous, et je veux mentionner que nous avons reçu l'appui d'un jeune stagiaire Louis Stroeymeyt. Je profite de l'occasion qui m'est donnée pour remercier également les administrations et toutes les organisations que nous avons rencontrées dans le cadre de cette mission.
J'assurerai la présentation de la première partie de cet exposé, puis je donnerai la parole à ma collègue Florence Tordjman et Dorian Roucher interviendra en conclusion.
D'abord, j'exposerai le contexte de cette mission.
La France a pris des engagements environnementaux internationaux, qui ont donné lieu à de très nombreuses stratégies européennes ou nationales, la plus emblématique d'entre elles ayant trait au climat, avec la réduction des émissions de gaz à effet de serre de 40 % en 2030 par rapport à 1990 et la neutralité carbone en 2050. Antérieurement, la convention des Nations unies sur la diversité biologique avait été ratifiée en 1994, puis complétée par divers protocoles. D'autres objectifs ont également été fixés en matière d'économie circulaire, de pollution, de gestion des eaux et de protection des espaces naturels, et ils sont tous retracés dans une annexe du rapport.
Dans ce contexte, s'est exprimée la volonté de mieux retracer la contribution des politiques budgétaires et fiscales à la protection de l'environnement.
L'OCDE avait pris l'initiative d'évaluer la « compatibilité des budgets nationaux avec l'accord de Paris ». Pour ce faire, il fallait se doter d'une méthode susceptible de décrire l'impact environnemental des dépenses et des recettes.
De plus, dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2019, un rapport a été demandé sur le financement de la transition écologique. Il s'agissait alors de remplacer plusieurs « jaunes » budgétaires et documents transversaux par un seul document de synthèse qui retracerait tous les éléments relatifs à l'ensemble des politiques environnementales.
En outre, la loi relative à l'énergie et au climat prévoit la remise d'un rapport au Parlement sur « les incidences positives et négatives du projet de loi de finances pour 2020 sur le réchauffement climatique et sur l'atteinte des objectifs de développement durable du programme de développement durable à l'horizon 2030 ».
Ce contexte a justifié cette double commande à l'IGF et au CGEDD.
Pour identifier les recettes et les dépenses du budget de l'État - j'insiste sur ce périmètre - ayant un impact significatif, positif ou négatif, sur l'environnement, la mission a recherché une méthode permettant de rendre compte de la richesse des objectifs environnementaux sans pondération entre ces objectifs - on a toujours tendance à mettre l'accent sur l'objectif climatique - ; de distinguer plusieurs impacts pour une même dépense, une même dépense pouvant être à la fois favorable sur un impact et neutre ou défavorable sur un autre ; de nuancer la cotation en identifiant plusieurs classes, comme des dépenses favorables à court terme, par exemple, mais qui pourraient s'avérer moins favorables, voire défavorables à moyen ou long terme ; et, enfin, d'être transparente sur les choix effectués, notamment sur la situation de référence pour permettre qu'ils soient discutés - c'est peut-être là le point le plus important.
Concernant les recettes, nous nous sommes fondés sur la définition de la taxe environnementale retenue par Eurostat, qui est communément admise, car nous n'avions pas de raison de la remettre en cause : c'est une taxe qui est susceptible d'avoir un effet comportemental, sans écarter l'objectif de rendement. Selon cette définition, la fiscalité environnementale française représentait environ 53 milliards d'euros en 2017, dont 33 milliards entrent dans le champ du projet de loi de finances, le reste incombant à la sécurité sociale et aux collectivités territoriales. Sur le graphique, on constate que la France est un petit peu en dessous du niveau européen, mais elle s'attache à rattraper son retard. La mission a proposé d'ajouter certaines recettes, mais nous pourrons revenir sur ce point lors de vos questions.
Concernant les dépenses, y compris les dépenses fiscales, nous avons évalué les méthodes existantes ou répertoriées.
Premièrement, figurent dans le cadre des recensements issus des données budgétaires françaises le jaune « Protection de la nature et de l'environnement », le jaune « Transition énergétique », le document de politique transversale (DPT) « Lutte contre le changement climatique », tous les documents liés aux obligations vertes de l'État depuis 2017, ainsi que le rapport de la Cour des comptes sur les dépenses fiscales. Deuxièmement, en matière de statistiques publiques, nous avons eu à notre disposition des données qui ont constitué le noyau dur de nos études, même si leur champ est restreint. Troisièmement, nous avons demandé des explications à I4CE - Institute for Climate Economics, l'Institut de l'économie pour le climat -, cofondé par la Caisse des dépôts et consignations et de l'Agence française de développement (AFD), le Think Tank climat. Ce dernier a publié un panorama des financements climat et vient de publier un document sur le budget. Quatrièmement, nous avons regardé ce qui existe au niveau national et au niveau international en matière de finance verte, avec des méthodes développées pour les investisseurs sur les marchés financiers en vue de les attirer vers la finance environnementalo-compatible, si je puis dire. Nous nous sommes notamment intéressés aux discussions en cours portant sur la taxonomie des activités au sein de l'Union européenne pour voir de quelle manière sont classifiés les objectifs environnementaux. Cinquièmement, enfin, nous avons examiné les travaux des organisations internationales, notamment l'OCDE, avec les marqueurs de Rio et les subventions aux énergies fossiles, ainsi que ceux qui sont menés dans certains pays ; je pense au Green Budgeting mis en place en Irlande et au recensement des subventions favorables et défavorables à l'environnement en Italie.
Au final, peu de méthodes embrassent l'ensemble des objectifs environnementaux que nous avions identifiés. Il n'y a pratiquement pas d'exemple de recensement de dépenses défavorables. Peu de méthodes sont applicables aux dépenses de fonctionnement et d'intervention. Il n'existe pas vraiment d'accord sur les finalités de ces méthodes. Enfin, le champ des dépenses fiscales va bien au-delà des seules exonérations sur la fiscalité environnementale.
Notre objectif était de considérer toute la dépense fiscale, qu'elle soit environnementale ou pas.
Pour les dépenses budgétaires, nous devions trouver une méthode qui permette d'envisager l'ensemble des types de dépense, la diversité des objectifs, mais aussi les dépenses défavorables. En nous inspirant en partie de l'obligation verte et en partie du règlement en discussion sur la taxonomie des activités, nous avons identifié six objectifs environnementaux. On peut en discuter, mais il est déjà complexe de cibler très clairement chaque objectif... Ces objectifs sont la lutte contre le changement climatique, l'adaptation au changement climatique, la gestion de la ressource en eau, l'économie circulaire et les déchets, la lutte contre les pollutions de l'air, des sols, les pollutions sonores. Enfin, nous avons regroupé dans un seul axe la question de la biodiversité et, plus généralement, la question de la gestion durable des espaces naturels, agricoles et sylvicoles, ces questions étant intimement liées.