Intervention de Claude Atcher

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 16 octobre 2019 à 9h35
Audition de M. Claude Atcher directeur général du groupement d'intérêt public « coupe du monde de rugby france 2023 »

Claude Atcher, directeur général du groupement d'intérêt public « Coupe du monde de rugby France 2023 » :

Tout d'abord, M. Kern s'est demandé comment sensibiliser les territoires et les animer avant et après la coupe du monde.

Nous avons mis en place, avec la FFR, des comités locaux de coordination. Ils ont trois missions essentielles, animer, mobiliser, promouvoir la coupe du monde de rugby. Y sont représentés les organismes décentralisés de la FFR - ligues régionales, comités départementaux et clubs. Sont également représentées les différentes associations professionnelles comme les chambres de commerce, les chambres d'artisanat, le MEDEF, ainsi que les collectivités - conseils régionaux, conseils départementaux villes -, de façon à nourrir une réflexion permanente.

Que se passera-t-il après la coupe du monde 2023 ? En 2007, le nombre de licenciés avait augmenté de 35 % en moyenne sur l'ensemble du territoire. En 2009, on avait toutefois perdu 50 % de ces 35 %. On travaille donc à un plan qui permette d'identifier club par club les ressources, les infrastructures, les équipements et le matériel nécessaires pour faire face à cette augmentation. Nous avons la faiblesse de croire que la coupe du monde va attirer de nouvelles populations.

Le GIP étudie avec le ministère du travail la mise en place d'un diplôme d'administrateur de club et la signature de 2 023 contrats d'apprentissage répartis entre les 2 000 clubs du territoire français dans le cadre de centres de formations d'apprentis (CFA). Nous allons réaliser une analyse des besoins et identifier les actions nécessaires pour accueillir ces nouvelles recrues dans les meilleures conditions.

À partir de 2023, nous allons pérenniser entre 300 et 400 emplois pris sur le boni de liquidation de la coupe du monde de rugby pour les répartir géographiquement sur l'ensemble du territoire.

Les territoires d'outre-mer seront bien évidemment concernés, même s'ils ne le sont pas par les camps de base.

Combien a coûté l'achat de l'événement ? Ce n'est pas une question taboue. Nous avons acquis les droits d'organisation, le sponsoring et les droits d'hospitalité.

En tant qu'organisateur, nous avons donc aujourd'hui les mains libres. Nous avons payé les droits d'organisation 170 millions d'euros, les droits de sponsoring 30 millions d'euros et les droits d'hospitalité 80 millions d'euros.

Ceci représente un investissement, mais il a été mesuré et calculé en liaison avec l'État et l'inspection générale des finances (IGF), qui a réalisé un audit complet du dossier de candidature.

Cela nous laisse les mains libres sur un grand nombre de sujets. Le GIP a ainsi la maîtrise de tous les droits de restauration. C'est un sujet extrêmement important pour la dynamique de mobilisation des territoires. On ne va pas servir à Toulouse les mêmes menus qu'à Lyon, Saint-Étienne ou Lille. On s'approvisionnera auprès d'un circuit court, et on favorisera les métiers de bouche locaux. Personne ne nous imposera de boissons américaines. Nous consommerons des jus de fruits français, des vins français, du champagne français. On mangera des produits français. C'est la raison d'être d'un événement sportif.

Monsieur Grosperrin, j'ai travaillé huit ans au Japon. Je connais donc bien ce pays. C'est moi qui ai fait venir en France le gouverneur de Yamanashi, il y a deux ans et demi pour rencontrer les instances sportives françaises de manière à promouvoir ce territoire. Aujourd'hui, onze équipes de France vont se préparer à Yamanashi pour les jeux Olympiques.

Rien ne peut donc empêcher les équipes, lors de la future coupe du monde de rugby ou des prochains jeux Olympiques, de se préparer en France. Les collectivités ont intérêt à utiliser le rugby comme porte d'entrée dans les fédérations sportives et auprès des comités olympiques pour proposer des camps d'entraînements sur leur territoire. C'est une opportunité à saisir. Le Comité d'organisation favorisera ce genre de contacts à chaque fois qu'il le pourra.

Je reviens sur la mobilisation de la France et les vertus républicaines que vous prôniez. J'ai la faiblesse de penser qu'un événement comme la coupe du monde de rugby va apporter un supplément d'âme à la société française. C'est notre ambition. Certes, nous ne sommes pas des politiques, mais nous avons un discours politique. Cet événement, il faut l'ancrer dans la société française, en faire un acte social, le mettre au service des territoires.

Deux mots s'agissant de l'équipe de France. Je rappelle que notre équipe de moins de vingt ans est deux fois championne du monde. On peut être dubitatif devant les résultats face au Japon, mais on est cependant en quarts de finale. Une génération de joueurs talentueux et ambitieux arrive sur le terrain. Un équilibre a été trouvé. On va découvrir ces jeunes joueurs lors du tournoi des six nations, en 2020. Une compétition reste une compétition, mais je suis très optimiste sur nos capacités d'être champions du monde en 2023. Si ce n'est pas le cas, on aura manqué une opportunité.

S'agissant des Jeux handisport, j'ai rencontré Mme Cluzel il y a quelque temps. C'est l'un des objectifs prioritaires du Comité d'organisation. On a discuté de plusieurs projets, dont celui d'inclure dans le programme des volontaires un nombre important de personnes en situation de handicap. On va aussi réfléchir à la possibilité de faire travailler des centres d'aide par le travail (CAT) sur des objets promotionnels ou publicitaires qui doivent être distribués à différentes populations.

Je rappelle que la FFR a mis en place au stade de France un dispositif destiné à permettre à des personnes aveugles de suivre un match commenté par des commentateurs spécialisés. Nous le reproduirons en 2023.

Par ailleurs, nous avons mis en place depuis mars un plan de gestion de risques extrêmement détaillé en nous basant sur l'expérience de 2007. Nous avons un plan B, un plan C, voire un plan D pour chacun des 48 matches de la coupe du monde de rugby.

Je ne sais ce qui s'est passé au Japon puisque, le mardi précédant le week-end des derniers matches de poule, la manifestation devrait être délocalisée à Ôita. L'équipe de France devait être transférée pour y jouer le match contre les Anglais à huis clos. Le jeudi, la décision était différente. Je n'en connais pas les raisons.

Nous avons quant à nous des solutions de repli pour chaque match. On a la chance, en France, d'avoir des villes qui comptent deux stades. Les solutions sont souples à mettre en oeuvre : le premier scénario prévoit en premier lieu de jouer le match dans un stade en présence de spectateurs, le second de le jouer sans spectateurs mais en le retransmettant à la télévision, le troisième de le jouer à huis clos, avec une simple production télévisée.

Monsieur Karam, concernant les retombées financières, les petits clubs sont évidemment en première ligne. Les décisions qui seront prises par le conseil d'administration favoriseront les clubs amateurs sans ressources, par rapport à des clubs professionnels.

Nous avons engagé des discussions avec l'éducation nationale. En 2007, un programme appelé « scolar rugby », mis en place un an avant la coupe du monde, a permis de distribuer dans les collèges du matériel d'initiation au rugby. Ce programme a touché 370 000 jeunes, qui ont tous été invités aux matches. Nous allons essayer de reconduire ce programme avec l'éducation nationale et de l'améliorer.

Deuxième projet avec l'éducation nationale, faire chanter les hymnes des 48 matches par des collégiens ou des lycéens. L'hymne est un moment important. Les joueurs sont très concernés. Nous allons mettre en place un programme qui va permettre à des jeunes, durant un an, de bénéficier de cours sur le pays dont ils vont interpréter l'hymne.

Nous avons passé un contrat avec l'Opéra-Comique pour que celui-ci mette en oeuvre l'orchestration et la chorégraphie. Cent cinquante jeunes par pays, soit 12 000 personnes au total, deviendront acteurs de la coupe du monde.

Quant au slogan, je rappelle que celui de 2007 était « Aller au contact » et qu'on ne l'a jamais traduit en anglais. On va changer de signature d'ici 2023, et on a bien en tête qu'il faut qu'elle soit en français, la coupe du monde se déroulant en France.

Je n'ai pas dit que la FFR était écartée : j'ai précisé qu'elle n'était pas seule décisionnaire. On a créé un Comité héritage, à propos duquel on a d'ailleurs sollicité le Sénat pour qu'il délègue un sénateur afin de participer aux décisions concernant la distribution des fonds destinés à financer les projets.

Je sais que le président du Sénat s'y est opposé. Je pense que ceci résulte d'une incompréhension. Un député est déjà présent au sein de ce Comité. Il me semble important qu'un sénateur y siège également, ce débat devant présider à l'éligibilité des projets qui seront financés. L'État et la FFR devront tomber d'accord sur le financement. Il y va de l'intérêt général de la collectivité.

Concernant les « fans zones », nous considérons que cette appellation est davantage associée au football qu'au rugby. C'est une notion qui n'est pas toujours valorisante. Nous souhaitons que les villes ou les collectivités mettent en place des espaces d'animation liés au rugby, afin de mettre la culture française en avant. Nous leur laissons le soin de nous proposer des projets autofinancés ou pouvant faire l'objet de financements de partenaires de la FFR. Nous laissons la porte ouverte à leur créativité.

Si la France est en demi-finale, des « fans zones » seront automatiquement mises en place. On n'est pas certain que le faire dès le début de la compétition apporte une grande valeur ajoutée. Lors de l'euro 2016, ces « fans zones » ont coûté une fortune et sont demeurées vides certains jours. On a essayé de meubler avec des jeunes de l'Union nationale du sport scolaire (UNSS), mais ce n'était pas forcément efficace. Pour le reste, on préfère parler de « nuits du rugby », de « festivals du rugby » ou de « villages du rugby ».

Enfin, je suis entièrement avec M. Brisson, je l'ai dit : il me paraît intéressant de proposer aux collectivités d'associer l'accueil des équipes en lien avec les comités olympiques pour assurer la promotion du territoire auprès des autres équipes.

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