Intervention de Claude Atcher

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 16 octobre 2019 à 9h35
Audition de M. Claude Atcher directeur général du groupement d'intérêt public « coupe du monde de rugby france 2023 »

Claude Atcher, directeur général du groupement d'intérêt public « Coupe du monde de rugby France 2023 » :

Il n'y a pas de compétition avec la ville de Paris. Il existe une véritable complémentarité. La maire de Paris s'est engagée par écrit à mettre à disposition de la coupe du monde de rugby des lieux prestigieux pour accueillir le Centre international des médias, le Centre international de télévision, et mettre en place de moyens supplémentaires pour développer le rugby à Paris.

Il n'y a par ailleurs aucune interaction avec les jeux Olympiques.

J'ai trouvé la question de M. Hugonet extrêmement intéressante. Il ne faut pas nier l'intensité de ce sport de combat collectif. Cela signifie des chocs d'une certaine intensité entre les différents acteurs, ce qui nécessite une autorité incontestable de l'arbitre.

Au rugby, vous ne verrez pas ses décisions remises en cause par les joueurs. Je pense que c'est la meilleure école de droit. Si jamais un joueur n'accepte pas la sanction - c'est assez rare, mais cela peut arriver -, on applique une punition collective qui concerne toute l'équipe : il recule en effet de dix mètres. C'est un élément important dans la façon de contrôler cette liberté dont vous avez fait état.

Je n'ai toujours pas compris pourquoi le football n'a pas matérialisé le carton jaune par une expulsion temporaire. Au rugby, c'est un élément fondamental du respect de la règle. C'est souvent lorsqu'un joueur doit sortir dix minutes que s'établit la différence. Si les footballeurs devaient jouer à neuf contre onze, cela pourrait changer leur comportement. Cette règle s'applique également au hand-ball et au basket-ball.

D'autre part, je préfère quant à moi parler de vertus que de valeurs. En effet, les valeurs du rugby sont celles du sport en général, même si le rugby possède quelques valeurs particulières, notamment du fait de la notion de sport de combat collectif.

Mme Jouve a demandé si la coupe du monde prendrait en compte la notion de contact par rapport à l'évitement. Je vais être très honnête : je ne suis pas à l'aise avec l'évolution de ce sport. Au départ, le rugby est un sport d'évitement. Malheureusement, le sport professionnel a fabriqué des joueurs qui font 1,95 mètre, pèsent 120 kilos et qui se rentrent dedans. Ce n'est pas du rugby ! L'évitement est aussi important que l'affrontement.

Autrefois, des joueurs comme les frères Boniface, Jo Maso, ou Jean Gachassin n'avaient pas les mêmes gabarits que ceux d'aujourd'hui, mais étaient capables de semer le désordre sur un terrain grâce à leur sens de l'évitement et à leurs qualités techniques.

Je fais partie de ceux qui estiment qu'il faut redonner un équilibre à ce sport. Le sport professionnel a souvent privilégié la tactique par rapport au jeu. Le premier geste essentiel, au rugby, c'est la passe. Or on en voit moins. Pourtant les meilleures équipes sont celles qui se font le plus de passes ! Ce sont des questions qu'il faut se poser pour redonner envie aux jeunes de pratiquer ce sport et aux spectateurs de se rendre dans les stades. Olivier Mantei, directeur de l'Opéra-Comique, dit que le rugby est, comme la danse, un spectacle vivant. Il nous faut donc absolument travailler dans cette direction.

Les équipes éliminées pourront soit rester dans la région qui les hébergera pendant les matches de poule, soit être déplacées dans d'autres régions. Dans le Grand Est, on n'a malheureusement pas trouvé de stades.

J'avais organisé, il y a quelques années, un match à Sochaux entre l'équipe de France et les joueurs du Pacifique. C'est une enceinte intéressante, mais on n'a pas suffisamment d'infrastructures hôtelières pour accueillir des matches de la coupe du monde. Nous avons cependant un devoir de déplacer des équipes pour réaliser des animations et créer la mobilisation.

Quant au ministère des sports, je ne sais pas trop quoi dire. Notre interlocuteur privilégié, vous l'avez compris, est la Délégation interministérielle aux grands événements sportifs. C'est elle qui fait le lien avec tous les ministères. Ce sont nos interlocuteurs quotidiens. Nous n'avons pas vraiment de missions identifiées avec le ministère des sports. Nous essayons de les tenir au courant de la préparation.

Nous travaillons avec eux sur l'augmentation de la pratique sportive. On se doit de mesurer la façon dont celle-ci évolue dans les différentes couches de la population. C'est la seule véritable collaboration que nous partageons avec le ministère des sports.

S'agissant du sport féminin, je suis fan de l'équipe de France de rugby féminine. C'est une équipe exceptionnelle, numéro deux mondiale. Certaines joueuses ont des personnalités incroyables. Nous publions un manifeste, quatre ans avant la finale, en association avec Le Journal du Dimanche. Je vous recommande de lire l'interview de Safi N'Diaye, qui dit que le rugby est un sport d'homme qui lui a permis de devenir une femme. Tout est presque dit dans une phrase !

Bien évidemment, le rugby féminin est une des priorités du développement de ce sport en matière d'image, de relations mères-joueuses et de pratiques. L'équipe de France a l'intention de devenir championne du monde de la Coupe de rugby féminine, qui aura lieu en 2021 en Nouvelle-Zélande. Nos joueuses en ont parfaitement les moyens.

S'agissant de la violence dans le rugby, on vient de vivre une année catastrophique, inacceptable, parsemée d'accidents mortels qui ont touché de jeunes joueurs. Le rugby est l'un des sports où les blessures par commotion sont le plus analysées, avec des médecins et des vidéos qui examinent toutes les situations. Un médecin a la capacité de faire sortir un joueur du terrain à tout moment s'il suspecte une commotion.

On a créé un carton bleu dans les championnats amateurs pour obliger le joueur chez qui l'arbitre suspecte une commotion à sortir du terrain. Ce problème est bien pris en compte pas la Fédération. Les commotions ont baissé de 16 %, même si ce n'est pas le débat, étant donné les décès qui ont eu lieu.

Par ailleurs, la FFR a mis en place cette année de nouvelles règles dans les écoles de rugby. Aujourd'hui, on y sanctionne le passage en force, comme au basket-ball. Au bout de deux contacts, les jeunes doivent rendre le ballon à l'adversaire. La prise de conscience et la volonté de diminuer les accidents sont réelles.

Concernant les violences faites aux enfants, le rugby n'est à l'abri de rien. L'association Colosse aux pieds d'argile, dont le président est un ancien joueur de rugby lui-même victime de violences sexuelles dans son enfance, essaie de sensibiliser les jeunes dans les écoles et les collèges à ce sujet.

Je ne sais comment la législation peut nous aider dans ce domaine. Je ne pense pas posséder la compétence requise pour en parler, mais je pense qu'il est nécessaire que l'État se penche sur le sujet.

Je rêve moi aussi que les équipes du nord battent celles du sud. Rouen en est un excellent exemple. Vannes est une équipe remarquable. J'espère que le stade de La Meinau, qui va être rénové, pourra à l'avenir accueillir de grands matches de rugby. Strasbourg a une très bonne équipe. Ils ont malheureusement eu quelques ennuis financiers l'année dernière.

Il n'y a aucune raison pour qu'il n'existe pas une très bonne équipe de rugby dans l'est de la France. C'est le voeu que je forme. Plus le rugby rayonnera sur ces territoires, mieux on assurera la promotion du sport.

On a assisté depuis quelques années à une évolution des typologies de joueur qui pratiquent le rugby. Celui-ci a longtemps été installé dans la ruralité, les petites villes et villes moyennes. Aujourd'hui, il s'implante de plus en plus dans les quartiers des grandes villes. On le voit au niveau des joueurs de l'équipe de France, qui viennent de Bobigny, Sarcelles ou Massy. Mathieu Bastareaud a été un des précurseurs. Aujourd'hui, on compte des joueurs comme Sekou Macalou. Je suis convaincu que le fait de mettre en place des actions de développement ou de promotion des vertus éducatives du rugby dans les zones d'éducation prioritaires (ZEP) constitue un élément important pour atteindre les objectifs de la coupe du monde.

La coupe du monde a la chance de maîtriser son organisation. La FFR, c'est aujourd'hui 1 200 matches par week-end. C'est chronophage, et elle n'a pas toutes les ressources pour développer ce genre d'action. Nous, nous disposons de ce temps pour rééquilibrer l'image du rugby et assurer la promotion du sport.

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