Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai souhaité insérer dans le texte initial de ce projet de loi, au nom du Gouvernement, la possibilité d’ouvrir une dérogation sur le reste à charge pour le maître d’ouvrage.
La paternité de cette idée revient à Stéphane Bern, qui y a pensé dans le cadre du loto du patrimoine. Du patrimoine peut être en danger. Lorsqu’il s’agit de sauver du patrimoine intégralement classé, le préfet peut prendre un arrêté de dérogation pour porter les subventions à 100 %. Mais seule une partie du patrimoine peut être classée : il peut s’agir d’éléments vernaculaires, d’une voûte, que sais-je encore…
Nous nous trouvons donc dans une situation aberrante : des bâtiments menacent parfois ruine, mais la petite commune rurale doit consacrer plusieurs années à compléter son plan de financement avant de mener des travaux d’urgence. Nous avons par conséquent imaginé ce dispositif pour avancer, en conservant le verrou du préfet.
Je remercie la commission d’avoir maintenu ce verrou, parce que l’on ne peut pas défendre, d’un côté, l’autonomie financière des collectivités, la liberté, la responsabilité et, de l’autre, estimer qu’un maître d’ouvrage peut bénéficier jusqu’à 100 % de subventions quand il le souhaite. Entre nous, ce dernier cas de figure fait écho au discours de ceux qui considèrent qu’il y a trop de communes.
Quand un projet avance localement, c’est aussi parce que la collectivité, grâce aux ressources municipales, participe au financement de la rénovation de l’école, de la place du village, etc.
Monsieur le président Bas, vous avez souhaité, en commission, étendre cette possibilité de dérogation du préfet à toutes les opérations d’investissement et pas seulement à celles qui concernent le patrimoine. Cette perspective est intéressante, et je vous propose de la retenir. En réalité, si j’ai déposé cet amendement tendant au retour à la rédaction initiale du texte, c’est pour pouvoir prendre la parole à ce sujet.
Si l’on autorise une dérogation sur tout avec le verrou, le Gouvernement devra préciser au préfet les cas dans lesquels une telle dérogation semble intéressante. Vous connaissez le risque d’une dérogation générale : une absence de dérogation !
On en revient à une problématique chère au sénateur Loïc Hervé : des disparités importantes pourraient apparaître si, dans un département, la dérogation était possible, quand elle ne le serait pas dans un autre.
J’ai à l’esprit quelques thèmes qui pourraient faire l’objet de ce dispositif. Le sénateur Ladislas Poniatowski évoquait la défense contre les incendies ; il est vrai qu’il est compliqué, pour une petite commune, de la mettre en conformité et qu’il lui est difficile d’expliquer qu’il faudra attendre plusieurs années pour que les travaux nécessaires soient réalisés, en raison d’un problème financier.
Dans ce cas, typiquement, il est intéressant de porter la possibilité de subvention de 80 % à 100 %. Il en va de même pour ce qui concerne le patrimoine en danger.
Cela dit, je retire cet amendement, au bénéfice de la rédaction de la commission. Je préciserai aux préfets par voie de circulaire le champ d’application opportun d’une telle mesure.