Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, dans le droit fil des propos tenus par les présidents Cambon et Éblé, à mon tour d’évoquer ce Conseil européen de la semaine dernière. Un épisode important de la saga du Brexit s’y est joué : les Vingt-Sept ont approuvé le nouvel accord de retrait conclu in extremis entre l’Union européenne et le Premier ministre britannique, ainsi que la nouvelle déclaration politique qui l’accompagne, ce point étant particulièrement important.
Je veux ici rendre de nouveau hommage, comme l’a fait Christian Cambon, à Michel Barnier, qui est parvenu à ce résultat en restant ferme sur les trois exigences de l’Union : préserver la paix, assurer l’intégrité du marché unique et subordonner tout futur accord de libre-échange avec le Royaume-Uni au respect de conditions de concurrence équitables.
Cet aboutissement ne signe pourtant pas la fin de l’histoire : le « super samedi » qui a suivi aura finalement été celui de la déception. Au lieu de voter sur l’accord, le Parlement britannique a adopté un amendement reportant le vote attendu, si bien que le Premier ministre britannique a été contraint de solliciter un troisième report de la date du Brexit. Enfin, hier, le président de la Chambre des communes, en lui interdisant de se prononcer sur l’accord, a définitivement réduit à néant le bref soulagement que certains avaient pu éprouver à la conclusion de l’accord de retrait révisé.
L’unité des Vingt-Sept, acquis principal du Brexit, ne l’oublions pas, pourrait même éclater si les Vingt-Sept devaient se prononcer sur une nouvelle extension du délai prévu à l’article 50, extension qui exigerait la nomination d’un commissaire britannique pour assurer le fonctionnement normal des institutions européennes. Il y a là quelque chose d’irrationnel. Madame la secrétaire d’État, comment éviter ce scénario catastrophe ?
Sur l’élargissement, autre sujet évoqué par le président Cambon, il ne serait pas bon que notre pays se trouve de nouveau isolé. Déjà, la semaine dernière, il a fait cavalier seul, ou presque. J’ai le sentiment que la France s’est distinguée par son exigence louable à l’égard du respect des conditions fixées pour ouvrir des négociations d’adhésion et par son appel à revoir le processus d’adhésion, ce à quoi nous souscrivons. Sans doute devons-nous revoir, en effet, la façon dont nous accompagnons les pays candidats à l’adhésion ; sans doute devons-nous dénoncer l’incohérence de ceux qui prônent l’élargissement et refusent en même temps d’augmenter le budget de l’Union ; sans doute faut-il cesser d’utiliser l’élargissement comme un seul instrument de politique étrangère, mais il est dangereux de tarder à tendre la main à des pays comme l’Albanie et, plus encore, la Macédoine du Nord, qui consentent des efforts importants pour se rapprocher de l’Union et voient leur jeunesse les quitter pour nous rejoindre.